Situation bien compliquée que celle de la France au Mali. Les relations sont de plus en plus tendues avec, aujourd’hui, l’expulsion de l’ambassadeur de France, cas unique dans la région depuis les indépendances. Ceci vient après une longue dégradation et un sentiment anti français croissant.
Rappelons que nous sommes présents y compris militairement avec 6000 hommes depuis que le président malien Traoré appela à l’aide en 2013 François Hollande. Les terroristes djihadistes étaient en effet à 200 km de Bamako et auraient pris la ville en quelques heures. Rappelons que nous participons à une force internationale sous mandat de l’ONU (MINUSMA) et que cinq pays d’Afrique de l’Ouest combattent avec nous. Le bilan de ces neuf années de présence est mitigé : l’action de la Minusma a permis de garder les grandes villes hors du djihadisme, mais n’a pas empêché plusieurs mouvements comme l’EIS ou le GSIM de contrôler de vastes parties du pays par une guérilla quasi impossible à saisir. De plus les problèmes politiques du Nord et de l’Est (Adrar des Ifoghas) n’ont pas connu le moindre début de solution malgré les accords d’Alger. L’armée malienne est toujours incapable de mener des opérations, minée par la corruption et les luttes ethniques. Le pouvoir politique malien, lui, passe de coups d’Etat en coups d’Etat et l’ancien président IBK (décédé depuis), renversé par la dernière junte, n’a rien fait.
Alors que faire ? La tentation est grande de retirer nos troupes (53 morts au combat) et laisser la junte s’occuper des djihadistes avec l’aide peu convaincante des Russes. Ceux ci ne sont là, on le sait, que pour mettre la main sur les ressources naturelles du pays et se faire payer leur intervention. Ils veulent aussi reprendre pied en Afrique de l’Ouest d’où ils ont été chassés depuis une trentaine d’années.
Mais ceci serait une vue à court terme. La junte putschiste menée par Assimi Goïta ne pense qu’à se maintenir au pouvoir (les élections libres sont promises pour dans cinq ans…) et n’a aucune légitimité ni capacité. Les djihadistes seront à Bamako en quelques mois. Or la Mali a des frontières avec huit pays de la région qui risquent d’être “contaminés” rapidement. L’Algérie, qui vit en état de coma dépassé, ne fera rien, quoi que ce soit une grande menace pour elle.
Le plus sage pour nous sera sans doute de nous replier sur les frontières est du Niger et du Burkina et sud (Côte d’Ivoire) pour protéger ces pays et observer l’évolution de la situation à moins que l’opinion malienne, très politisée, ne renverse les militaires.
A ce stade, ma pensée va vers la communauté française et franco-malienne du pays, très intégrée mais qui risque de faire les frais de la politique nationaliste et xénophobe de Goîta.