Il est exact que nous avons une relation particulière et forte avec l’Algérie. Dans notre imaginaire, elle reste en partie française : les noms des villes, des régions, de sa littérature, de sa musique nous sont familiers, même à nous qui n’y avons jamais habité. C’est de plus une terre d’une très grande beauté que ce soient les violets et les bleus de la côte, les jaunes du désert, les ocres des montagnes kabyles.
Et pourtant nous n’arrivons pas, 60 ans après la fin de cette affreuse guerre civile, à nous rencontrer. Emmanuel Macron a fait des efforts mais le poids de l’armée algérienne et des Moudjahidines d’un côté, des associations pieds-noirs de l’autre, bloquent tout rapprochement. Nous pourrions non être frères du moins cousins, collaborer pour un ensemble économique, culturel méditerranéen. Au lieu de cela, nous nous regardons en chiens de faïence avec un profit nul pour les deux parties.
Il est vrai que la politique algérienne est difficile à comprendre : un budget de la défense de 23 milliards $ (soit le tiers du budget total) pour des achats d’armes plus ou moins sophistiquées et achetées à la Russie. Pour quoi faire, grands dieux ! La guerre avec le Maroc : ce serait un drame pour le Maghreb et pour le monde arabe ! Pas de conflits avec la Tunisie. Il y a la très longue frontière avec la Libye, le Mali, mais qui n’est pas source de conflits militaires. Au contraire, il est bien connu que l’Algérie accueille sur son territoire du sud les katibas du Groupe de soutien à l’Islam au Maghreb (GSIM) d’Ilyad AG Gholi qui y trouvent repos, ravitaillement et leurs familles.
Pour le reste, l’Algérie s’est toujours vantée d’être “neutre” et de ne pas intervenir en dehors de ses frontières. Autant dire que ces sommes abyssales sont “jetées “par les fenêtres alors même que le pays manque de tout : hôpitaux, écoles, huile, semoule, blé….. Elles ne servent à rien sinon à faire peur à la population algérienne elle-même et à éviter le retour du Hirak pendant lequel le peuple algérien avait montré une telle maturité et volonté de démocratie.
Pendant ce temps-là, l’émigration (clandestine) vers l’Europe se développe (il n’y a pas d’emplois), la corruption règne partout et la répression autoritaire, anti démocratique progresse chaque jour (voir l’arrestation hier d’Ihsane El Kadi, patron de Radio M et de journaux et la fermeture du seul quotidien en français El Watan). Voilà à quoi aboutit la grande amitié Poutine-Tebboune qui nous ne laisse que nos yeux pour pleurer.
Quelle tristesse ! Comment tendre la main à nos amis du peuple algérien et construire une nouvelle fraternité à travers la Méditerranée ?
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