Objet du texte
La présente proposition de loi, présentée par M. Yvon Collin (RDSE - Tarn-et-Garonne) et plusieurs membres du groupe du Rassemblement démocratique, social et européen, a pour objet de rétablir une circonscription unique pour l'élection des représentants de la France au Parlement européen. La commission des lois, jugeant inopportune cette proposition, a décidé de ne pas adopter de texte afin que la discussion en séance publique porte sur le texte de la proposition de loi.
(Voir le communiqué commun sur ce sujet)
M. le président. La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, jusqu’en 2003, les représentants français au Parlement européen étaient élus dans le cadre d’une circonscription unique, mais à la suite de la régionalisation, les Français établis hors de France, qui votaient dans les consulats et les ambassades de leur pays de résidence, ont perdu ce droit de vote.
M. del Picchia a quitté l’hémicycle, mais j’aurais voulu attirer son attention sur le fait que tout l’intérêt de la proposition de loi dont nous débattons, c’est que, précisément, elle permettrait de réintégrer les Français hors de France dans le scrutin. En effet, dans la mesure où existerait une circonscription unique, ils retrouveraient leur droit de vote dans les consulats et dans les ambassades, de la même façon qu’avant 2003.
Je ne comprends donc pas qu’il argue du fait que la proposition de loi ne changerait rien à la situation actuelle pour voter contre alors que, précisément, elle change tout pour les Français de l’étranger.
À l’heure actuelle, le scrutin ne peut plus avoir lieu dans les centres de vote à l’étranger.
Les Français résidant dans l’Union européenne peuvent voter aux élections européennes, mais uniquement pour les listes nationales du pays où ils sont installés. Par exemple, lorsque je résidais en Allemagne, j’ai voté aux élections européennes pour les listes allemandes – je ne vous dirai pas lesquelles, mais vous le devinerez certainement…
En revanche, les Français résidant dans un État tiers ne peuvent voter que s’ils sont inscrits sur les listes électorales de communes françaises. Ils doivent alors voter soit en personne, soit par procuration. Cette dernière faculté n’est pas facile à exercer pour eux, car on n’est pas toujours en suffisamment bons termes avec sa belle-mère pour lui confier sa procuration ! (Sourires.)
Mme Jacqueline Gourault. Tout de suite, les belles-mères… (Nouveaux sourires.)
M. Richard Yung. C’est un exemple qui me vient spontanément à l’esprit, mais il y en a d’autres !
À de nombreuses reprises, nous avons signalé ce déni de droits civiques au Gouvernement. Nous nous sommes appuyés sur deux résolutions, adoptées à l’unanimité, de l’Assemblée des Français de l’étranger, demandant la réouverture des centres de vote dans les consulats et proposant différentes solutions.
J’ai posé une question orale, le 28 octobre 2008, à M. le secrétaire d'État, qui m’a répondu qu’il n’était pas question de modifier la législation.
Avec mes collègues Monique Cerisier-ben Guiga et Claudine Lepage, j’ai déposé des propositions de loi prévoyant diverses possibilités pour corriger cette situation : le rattachement des Français de l’étranger soit à la circonscription d’Île-de-France, dans le cadre du scrutin existant, bien que nous n’y adhérions pas, soit à celle de Nantes, qui est la préfecture, comme on dit, des Français de l’étranger, soit encore à la circonscription Outre-mer.
Toutes ces raisons, s’ajoutant à l’ensemble de celles qui ont été excellemment développées par d’autres intervenants, militent en faveur de l’adoption de cette proposition de loi
J’ajoute que, selon nous, l’idéal serait de créer des sièges au Parlement européen pour représenter globalement les Européens établis hors de l’Union. Ce serait un pas en avant important pour l’Europe.
Une autre possibilité, qui semble avoir été écartée, aurait été d’attribuer aux représentants des Français de l’étranger les deux sièges supplémentaires du Parlement européen qui échoient à la France. J’ai compris que tel n’était pas le souhait du Gouvernement.
Il m’a semblé, monsieur le secrétaire d'État, que vous plaidiez un peu a minima pour le maintien du mode de scrutin actuel, qui ne paraît pas selon votre cœur. Je le comprends d’autant mieux que je partage ce sentiment. (Sourires.)
En tout état de cause, j’appellerai, pour ma part, à voter cette proposition de loi. (Applaudissementssur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur les travées du RDSE.)
[…]
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Monsieur le président, je souhaiterais répondre aux sénateurs représentant les Français de l’étranger, Mme Joëlle Garriaud-Maylam et MM. Robert del Picchia et Richard Yung.
La suppression de la circonscription unique a en effet eu pour conséquence de priver nos concitoyens établis à l’étranger de la possibilité de voter aux élections européennes dans les centres de vote ouverts à leur intention dans les consulats ou les ambassades.
Ils se trouvent donc dans l’obligation de voter dans leur commune d’inscription en France. Je le rappelle, ceux qui résident dans un pays membre de l’Union européenne peuvent également voter dans leur pays de résidence, mais uniquement pour des listes de candidats de ce pays.
Je sais que cette situation préoccupe légitimement nombre d’entre vous, notamment ceux qui représentent nos compatriotes installés à l’étranger. Je présenterai rapidement les deux solutions envisageables pour y remédier.
La première consisterait à rattacher à l’une des huit circonscriptions existantes les quelque 1,4 million à 2 millions de Français établis officiellement à l’étranger. Cette solution est défendue par les députés Thierry Mariani et Jean-Jacques Urvoas dans la proposition de loi visant à favoriser l’exercice par les Français établis hors de France du droit de vote pour l’élection des représentants français au Parlement européen, proposition qui a été adoptée par la commission des lois de l’Assemblée nationale en 2007, je tiens à le préciser, à l’unanimité des membres de celle-ci. Dans ce texte, le choix retenu est celui d’un rattachement à la circonscription d’Île-de France, mais ce n’est pas la seule option possible.
La seconde solution serait de créer une nouvelle circonscription comprenant l’ensemble des pays étrangers et de la doter des deux fameux sièges supplémentaires dont disposera la France en application du traité de Lisbonne.
À ce jour, le Gouvernement n’a pas encore tranché entre ces différentes solutions ; je serai donc particulièrement attentif aux propositions qui seront faites sur le sujet.
J’en arrive à ma conclusion, monsieur le président. La question devra être tranchée assez vite. Les conseils européens de décembre 2008 et juin 2009 ont en effet décidé que les deux sièges supplémentaires pourraient être pourvus avant les élections européennes de 2014 par une désignation émanant du suffrage universel direct. Le dernier Conseil européen a en outre convoqué une conférence intergouvernementale, qui se déroule aujourd’hui même, pour approuver le protocole permettant à ces futurs représentants de siéger au cours de la mandature actuelle.
Une fois ce protocole ratifié par tous les États membres, la loi qui sera nécessaire pour le mettre en œuvre dans notre pays devra régler les conséquences d’un passage de 72 à 74 membres pour la représentation française au Parlement européen, à la fois pour la période transitoire, pour laquelle nous avons choisi, conformément aux décisions du Conseil européen, la désignation par l’Assemblée nationale, et à partir des élections européennes de 2014.
[…]
M. le président. Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
(La proposition de loi est adoptée. – Applaudissementssur les travées du RDSE, du groupe socialiste et de l’Union centriste.)
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