Le 1er février, j’ai présenté devant la commission des affaires européennes du Sénat une communication sur la réforme de la gouvernance économique et budgétaire européenne.
Depuis le début de la crise des dettes souveraines, en 2010, l’Union européenne a renforcé les exigences applicables aux cadres budgétaires des États membres, au point d’enfermer ces derniers dans un véritable carcan budgétaire.
Un premier train de mesures, communément appelé « six pack », est entré en vigueur le 13 décembre dernier. Il prévoit un renforcement de la coordination des politiques économiques et budgétaires des 27 pays de l’Union – via la procédure dite du semestre européen – ainsi qu’une réforme du Pacte de stabilité et de croissance (déficit inférieur à 3% du PIB ; dette inférieure à 60% du PIB). Adopté en 1997, ce dernier avait été assoupli en 2005 à la demande des gouvernements allemand et français.
Concrètement, le « six pack » élève d’un cran la surveillance budgétaire des États au moyen de sanctions plus précoces et quasi-automatiques. Ainsi, le déclenchement de la procédure pour déficit excessif peut désormais intervenir si la dette dépasse 60% du PIB, même avec un déficit inférieur à 3%
Le « six pack » a, par ailleurs, créé une nouvelle procédure de surveillance des déséquilibres macroéconomiques basée sur un mécanisme d’alerte. En cas de déséquilibres excessifs, des sanctions graduelles et quasi-automatiques sont également prévues.
Conséquence de l’accélération de la crise de la zone euro, la Commission européenne a présenté un second paquet législatif – le « two pack » – le 23 novembre dernier. C’est sur ce nouvel ensemble de mesures que portait l’essentiel de ma communication.
Le « two pack » propose tout d’abord d’imposer aux pays de la zone euro de fonder leurs projets de budget sur des prévisions de croissance indépendantes et de les soumettre chaque année à la Commission européenne, qui pourra présenter un avis devant les parlements nationaux qui le demanderont.
A l’instar du projet de traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance dans l’Union économique et monétaire (UEM), le « two pack » vise aussi à obliger les États de la zone euro à introduire dans leur droit interne, de préférence dans leur Constitution, une « règle d’or » budgétaire, dont un conseil budgétaire indépendant sera chargé de surveiller la mise en œuvre. Rappelons que François HOLLANDE est défavorable à cette mesure et propose de faire adopter au début du prochain quinquennat une loi de programmation des finances publiques. Une telle initiative aurait l’avantage d’être plus efficace.
L’autre volet du « two pack » concerne le renforcement de la surveillance économique et budgétaire des pays sous assistance financière qui menacent la zone euro. Il est prévu un suivi draconien par la Commission européenne de l’exécution de leurs budgets. A mes yeux, il importe que les États en difficulté puissent bénéficier d’une solidarité financière en accédant notamment au Mécanisme européen de stabilité (MES) qui sera prochainement mis en place.
La réforme de la gouvernance économique et budgétaire européenne n’est pas satisfaisante car elle est confuse. De mon point de vue, la révision du Pacte de stabilité et de croissance, fondée sur la méthode communautaire (« six pack » et « two pack »), rend inutile le futur traité intergouvernemental qui devrait être adopté lors du Conseil européen de mars.
Par ailleurs, toutes les initiatives engagées ne répondent pas à l’impérieuse nécessité de relancer la croissance au niveau européen. L’institutionnalisation de l’austérité budgétaire à l’échelle européenne aura immanquablement pour effet d’aggraver la récession économique.
Elles posent aussi un problème de légitimité démocratique. Je déplore en effet que la plus grande ingérence de la Commission européenne dans les processus budgétaires des États membres ne s’accompagne pas d’un renforcement du rôle des parlements nationaux, qui sont seuls compétents pour voter les projets de budget.
C’est notamment pour ces raisons que François HOLLANDE s’est engagé, s’il est élu le 6 mai prochain, à négocier avec nos partenaires européens la mise en place d’une véritable union budgétaire alliant discipline budgétaire ET solidarité financière.