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Richard Yung
Octobre 2021

Le 19 février, j’ai participé, dans le cadre de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, à l’audition de la secrétaire d’État chargée des affaires européennes, Amélie de Montchalin, sur l’ouverture de négociations en vue d’un nouveau partenariat entre l’Union européenne et le Royaume-Uni.

Le 3 février, la Commission européenne a adressé au Conseil un projet de directives de négociation, qui portent sur tous les domaines d’intérêt pour les négociations (coopération commerciale et économique, coopération des services répressifs et judiciaires en matière pénale, propriété intellectuelle, politique étrangère, sécurité et la défense, participation à des programmes de l’Union, etc.).

J’ai interrogé Mme de Montchalin sur l’impact du Brexit sur la juridiction unifiée du brevet (JUB) et le brevet européen à effet unitaire.

La création de la JUB est prévue par un accord intergouvernemental du 19 février 2013. Cet accord a été ratifié par 16 pays, dont la France (mars 2014) et le Royaume-Uni (avril 2018). Son entrée en vigueur conditionne celle des règlements instituant le brevet européen à effet unitaire. Elle est toujours suspendue à la ratification allemande, ratification qui dépend d’une décision de la cour constitutionnelle de Karlsruhe.

L’accord du 19 février 2013 prévoit que la JUB devra « coopérer » avec la CJUE. De plus, il résulte de la jurisprudence de la CJUE (avis du 8 mars 2011) que le statut d’État membre de la JUB est conditionné à celui d’État membre de l’UE. Se pose alors la question de la participation du Royaume-Uni à la JUB. Cette question n’est pas évoquée dans le volet « propriété intellectuelle » du projet de directives de négociation.

Vous trouverez, ci-dessous, des extraits du compte rendu de l’audition.

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Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes. - Nous sommes au cœur d’une semaine européenne intense. Demain, un Conseil européen extraordinaire se réunira au sujet du budget. Nous y porterons quatre grandes priorités : l’agriculture - afin de ne pas demander aux agriculteurs de faire plus avec moins d’argent et de maintenir l’enveloppe de la PAC en euros courants pour l’Europe et pour la France -, la politique de cohésion - afin de préserver l’aide aux régions en transition ainsi qu’aux régions ultrapériphériques -, nos priorités thématiques - la défense, l’espace, Erasmus sont des programmes essentiels pour notre souveraineté -, et enfin de nouvelles ressources propres : aucun accord ne sera possible si nous n’avançons pas sur cette question. En effet, il n’est pas question d’augmenter les impôts sur les contribuables, mais il faut faire contribuer des acteurs qui bénéficient du marché intérieur sans y contribuer - importateurs de plastique, entreprises polluantes, Gafam, etc. Cette orientation est d’ailleurs assez convergente avec les résolutions adoptées par le Sénat.

Nous entrons dans ce débat de manière offensive. Nous n’accepterons pas de conserver indéfiniment les rabais : la France est contributeur net et n’a pas vocation à faire des chèques aux uns et aux autres. Nous ne voulons pas non plus d’une Europe au rabais, qui serait moins ambitieuse au motif qu’elle aurait perdu un membre.

Cette semaine a également été marquée par la réunion consacrée au Brexit qui s’est tenue lundi autour de Michel Barnier à Matignon. Le Brexit est désormais une réalité : le Royaume-Uni a quitté l’UE le 31 janvier sur un plan politique : il n’y a plus de commissaire britannique à la Commission, de députés européens britanniques au Parlement, ni de ministres britanniques au Conseil. Il s’agit d’un choix souverain et démocratique que nous respectons. Nous serons vigilants sur la mise en œuvre des dispositions relatives aux droits des citoyens afin de préserver les conditions de séjour et de travail des citoyens européens au Royaume-Uni et des citoyens britanniques en France - qui n’auront plus le droit de vote ni d’éligibilité aux prochaines élections municipales. Nous veillerons en outre à ce que le Royaume-Uni mette bien en place l’autorité de surveillance indépendante, conformément aux engagements qu’il a pris dans l’accord de retrait.

L’accord de retrait garantit aussi que le Royaume-Uni honore les engagements qu’il a déjà contractés : ce qui a été décidé à 28, sera payé à 28. Le coût de la sortie est donc à la charge du Royaume-Uni.

Enfin, notamment en ce qui concerne les entreprises, l’accord de retrait prévoit que le droit européen continuera à s’appliquer au moins jusqu’au 31 décembre 2020. Pendant cette période de transition, les choses ne changent pas, ce qui nous permet de négocier dans un cadre apaisé.

Mais le délai de négociation a été fixé par Boris Johnson lui-même à onze mois. Ce calendrier contraint ne doit pas nous détourner de l’essentiel : notre objectif est d’aboutir à un accord équilibré, ambitieux et conforme aux intérêts de l’Union. Nous ne pouvons pas demander aux acteurs économiques européens de faire face à la concurrence déloyale du Royaume-Uni, sous prétexte que nous aurions mal négocié le traité. Atteindre un tel accord est difficile : les sujets sont complexes, nombreux, et nous sommes nous-mêmes nombreux autour de la table pour négocier.

Plusieurs écueils sont à éviter dans cette négociation. Nous ne devrons pas revenir sur nos ambitions. Boris Johnson déclare depuis quelques semaines qu’il ne voit pas de raisons de se restreindre, notamment sur la question des conditions équitables de concurrence - ce que nous appelons le level playing field. Or cette notion est au cœur de la déclaration politique de l’accord de retrait, approuvée par le Conseil et le Parlement européens, mais aussi le gouvernement et le Parlement britanniques : il ne s’agit pas d’un diktat européen.

L’Union ne doit pas craindre d’affirmer ses principes : les droits devront avoir des obligations en contrepartie ; plus l’Europe s’ouvre, plus elle doit exiger une relation équilibrée et loyale. Il en va de la protection du projet européen et autrement, il deviendra difficile de prendre des décisions coûteuses à 27 - comme le Green deal européen - en raison de la présence d’un concurrent à nos portes.

Nous ne devrons pas non plus céder à la pression du temps, en intériorisant les contraintes du calendrier politique britannique. À chaque étape, le fond doit primer le calendrier. Nous ne signerons pas le 31 décembre 2020 un mauvais accord qui nous engagerait pour plusieurs décennies.

Soyons lucides : la situation post-Brexit ne sera pas comme avant. Le statut d’État tiers ne peut pas être aussi avantageux que celui d’État membre de l’UE. Il n’y aura pas de statu quo : le Royaume-Uni ne bénéficiera plus de la politique de cohésion, de la PAC ni d’Eurojust, etc. Nous devons sensibiliser nos entreprises et nos partenaires à cette nouvelle réalité.

Ne nous divisons pas sur les priorités et sachons tenir un front commun. Cela a été notre force ces trois dernières années.

Le 3 février dernier, Michel Barnier a présenté un projet de mandat dont les principes doivent refléter les intérêts de l’Union. Ce mandat doit être approuvé mardi prochain lors du conseil des ministres des affaires générales, afin que les négociations puissent être lancées la première semaine de mars. Nos points de vigilance absolus concernent la situation des citoyens, des agriculteurs, des pêcheurs et des entreprises.

Le partenariat que nous allons bâtir est inédit par son étendue et sa profondeur. Au-delà des sujets thématiques, il y a des enjeux de gouvernance, de règlement des différends et de sanctions. Boris Johnson ne veut pas que la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) ait cette compétence. Mais il nous faudra contrôler le respect des engagements pris et sanctionner les écarts ! Évitons de rééditer ce qui a été fait avec la Suisse, de manière progressive et sans cadre de gouvernance commun. Des mécanismes transversaux doivent être établis.

En matière de conditions de concurrence, nous ne pourrons proposer zéro tarif et zéro quota au Royaume-Uni que s’il y a zéro dumping. Quelle que soit la nature de l’accord, il y aura des contrôles aux frontières : le libre-échange, même maximal, ne signifie pas absence de contrôle.

S’agissant de la pêche, nous poursuivons trois objectifs : l’accès aux eaux, la gestion de la ressource et le maintien des clés de répartition actuelles.

Ces quatre sujets - gouvernance, accord commercial, level playing field et pêche - seront liés dans la négociation : nous ne serons d’accord sur rien, si nous ne sommes pas d’accord sur tout. Cela nous met dans une position de force.

Pour la pêche, le choix de la date du 1er juillet est lié aux demandes de la filière qui a besoin d’un peu de visibilité, mais il n’y aura pas d’accord séparé sur la pêche. D’ici au mois de juillet pourraient être fixées les grandes orientations.

Les services financiers, qui constituent un enjeu important pour le Royaume-Uni, ne font pas partie de l’accord. L’équivalence financière est en effet accordée à un pays tiers par une décision unilatérale de l’Union : une telle décision ne se négocie pas et n’est pas permanente dans le temps. Il en va de même en matière de circulation des données personnelles.

S’agissant de la sécurité et de la défense, nous cherchons à établir un partenariat étroit avec deux piliers : la sécurité intérieure et la politique étrangère. Le Royaume-Uni est désormais un État tiers. Certains programmes sont ouverts aux États tiers, d’autres non, et nous ne ferons pas d’exception.

Nous sommes particulièrement attentifs aux prérogatives des parlements nationaux et à continuer à les informer et à les associer. Ne connaissant pas encore le contenu de l’accord, nous ne pouvons présumer de sa nature mixte ou pas. Il a donc été décidé que le sujet n’était pas encore tranché. Ce qui sera soumis aux parlements nationaux dépendra donc du contenu de l’accord.

Nous sommes préparés à tous les scénarios, il en va de la crédibilité de l’UE. Des infrastructures sont en place dans les ports normands et bretons, à Calais, à Boulogne, etc. ; certaines dispositions des ordonnances devront être renouvelées ; les mécanismes restent en sommeil, mais nous pourrons les déclencher le moment venu.

En conclusion, je tiens à redire, avec beaucoup d’amitié pour le Royaume-Uni, que l’on ne peut pas être un pied dedans, un pied dehors. Nous ne sommes pas en position de faiblesse face au Royaume-Uni, nous ne sommes pas demandeurs et nos principes sont clairs et fermes.

[...]

M. Richard Yung. - Le brevet unitaire va prochainement entrer en vigueur. Le Royaume-Uni fait partie de cet accord, qui prévoit une juridiction à Paris et la CJUE comme instance d’appel. Or Boris Johnson ne reconnaît pas l’autorité de la CJUE. Que va-t-il se passer ? La France souhaite-t-elle que le Royaume-Uni quitte l’accord sur le brevet unitaire ?

[...]

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d’État. - Sur l’immigration, un système à points a été présenté hier, avec plusieurs critères : la maîtrise de l’anglais, une offre d’emploi, un niveau de salaire minimum... L’objectif recherché, tel qu’annoncé pour le moment, est bien d’organiser une immigration légale de travailleurs qualifiés. Ayons en tête que 70 % des Européens vivant actuellement sur le sol britannique, avec le système tel qu’il est présenté, n’auraient pas pu y entrer. Le ministre de l’intérieur et l’administration s’efforcent depuis hier d’analyser ce nouveau système. Une partie de l’analyse relève de la souveraineté nationale, une autre du marché intérieur. Or, les quatre libertés du marché intérieur sont liées : on ne peut pas ouvrir totalement une liberté sans réciprocité. Je placerais donc cela dans un paquet global, que nous suivrons avec vigilance, de construction de notre relation future. Des échanges auront lieu de manière à la fois bilatérale et collective. Chaque pays européen a ses propres points d’attention. Pour nous, c’est la pêche. Pour d’autres, c’est ce système nouveau d’immigration.

Nous suivons de très près les enjeux de mise en œuvre du settled status. Il faut que nous arrivions à bien faire comprendre à tous les Européens présents sur le sol britannique que nous avons bataillé pour qu’ils puissent rester au Royaume-Uni dans les mêmes conditions s’ils se sont installés avant la fin de la période de transition, c’est-à-dire avant le 31 décembre 2020 - ou plus longtemps si cette période se prolonge. Il reste du travail, et l’organisme de gouvernance devra assurer un travail collectif qui soit à la hauteur des attentes des citoyens européens qui sont installés sur le sol britannique, et dont nous devons assurer réellement la protection des droits.

Le brevet unitaire est un sujet qui est au cœur du marché unique. Effectivement, il n’est pas encore en vigueur. Je peux toutefois vous dire qu’il est hors mandat et qu’il n’est pas question qu’y participent des pays tiers. Dans les négociations sur le cadre financier pluriannuel, l’espace, le Fonds européen de la défense et la politique de recherche font bien partie de nos priorités et sont au cœur de notre capacité à préparer le futur en tant qu’Européens. Il s’agit d’éléments de souveraineté essentiels, comme Thierry Breton l’a rappelé.

S’agissant de la pêche, Boris Johnson, dans son discours à Greenwich le 3 février que je vous invite à lire, n’a pas dit qu’il voulait la fermeture des eaux britanniques - et c’est un changement de pied important. Je l’ai entendu dire que les eaux britanniques seront sous contrôle britannique et qu’il chercherait à avoir un accord avec l’Union européenne tous les ans. C’était le point de départ de la négociation. Des dizaines de milliers d’emplois, de la filière dans son ensemble, sont concernés. Reste à négocier un bon accord.

Vous évoquiez les divisions entre les 27. La résolution du Parlement européen sur le mandat du Brexit est très claire, et correspond largement au discours que je vous tiens. Même si chaque État membre est concerné différemment, les échanges politiques au niveau ministériel avec le Parlement et la Commission permettent de mesurer une convergence certaine.

Il me semble y avoir un malentendu, Monsieur Poniatowski : beaucoup des points que vous évoquez sont réglés. Ils faisaient partie de l’accord de retrait, qui est entré dans le droit international depuis le 31 janvier. Sur les droits des citoyens, tout est en place.

M. Ladislas Poniatowski. - Rien n’est réglé !

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d’État. - En France, un système très simple permettra à tous les citoyens britanniques, dès le 1er juillet, d’accéder à des titres de séjour de dix ans ou plus. Tout a été préparé, en concertation avec les Britanniques et la Commission européenne. Nous sommes en train de mettre en place les procédures, et il ne faut pas donner l’impression que nous n’aurions rien fait, au contraire ! Nous ne souhaitons pas rendre la vie des Britanniques en France plus compliquée.

Sur l’Irlande, il en va de même : nous avons le cadre et tous les acteurs sont vigilants sur la mise en oeuvre de l’accord. Il doit y avoir des contrôles en mer d’Irlande, parce que tous les produits qui passeront de la grande île britannique à l’Irlande du Nord et qui passeraient ensuite cette mer d’Irlande doivent être contrôlés au même titre que s’ils entraient dans le marché intérieur. Nous avons délégué les contrôles européens aux douaniers britanniques.

M. Ladislas Poniatowski. - Oui, britanniques !

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d’État. - Comme sur les droits des citoyens, les engagements pris doivent être tenus. S’ils ne contrôlent pas comme nous le souhaitons, nous pouvons prendre des mesures de rétorsion. Sur le comité de suivi des droits des citoyens et sur cette question de l’Irlande, la priorité n’est plus de négocier, mais de contrôler la mise en oeuvre. C’est pourquoi la gouvernance future doit nous armer pour pouvoir, si les engagements pris ne sont pas tenus, prendre des mesures de rétorsion, de sanction, de sauvegarde, de suspension.

L’accord de retrait a déjà réglé un certain nombre de points. S’il n’y avait pas d’accord au 31 décembre, nous tomberions dans le régime de l’OMC. Boris Johnson a dit souhaiter un accord « à l’australienne ». Je rappelle qu’il n’y a pas d’accord commercial entre l’Union et l’Australie aujourd’hui. Cela équivaudrait donc au régime de l’OMC, ce qui signifie qu’il y aurait des tarifs douaniers et des quotas. Il y aurait des contrôles aux frontières et des droits de douane. Mais l’accord de retrait nous assure un certain nombre de protections.

Les milieux d’affaires britanniques veulent continuer à avoir accès au marché intérieur de la manière la plus ouverte possible : dans un cas, 65 millions de consommateurs, dans l’autre, 460 millions ! Les entreprises veulent donc conserver les mêmes règles parce que c’est pour elles la garantie d’avoir accès à un grand marché.

En ce qui concerne la gouvernance, le Royaume-Uni aura le statut de pays tiers. Cela ne constitue pas une originalité. Il existe déjà des organes de gouvernance qui règlent nos rapports avec des pays tiers, comme dans le cadre du CETA par exemple.

Monsieur Leconte, je comprends votre inquiétude sur les droits des citoyens : les engagements pris devront être tenus.

Monsieur del Picchia, vous évoquiez les sujets financiers et fiscaux : le Conseil Ecofin, hier, a ajouté les îles Caïmans à la liste noire des paradis fiscaux de l’Union européenne. L’Union a donc des moyens d’action et ne laissera pas faire n’importe quoi. Nous serons très vigilants à l’égard du dumping fiscal et Michel Barnier connaît très bien ces sujets.

Monsieur Vaugrenard, il faudra évidemment que nous puissions nous coordonner dans le cadre des instances multilatérales. Avec l’Allemagne et le Royaume-Uni, nous avons déjà l’habitude de nous réunir en format « E3 ». Ce format pourra être utilisé de manière plus fréquente, dans la mesure où nous ne pourrons plus nous coordonner au sein des instances de l’Union. Je ne crois pas que les Britanniques se désolidariseront systématiquement de nos positions. Il appartiendra à notre diplomatie de travailler dans un cadre bilatéral là où les sujets étaient traités dans le cadre européen.

J’en viens au risque politique. Il faut être clair : nous ne nous inscrivons pas dans une logique de punition ou de revanche. Notre position est économiquement rationnelle, à tel point que notre position en faveur de l’application de règles identiques est aussi défendue par de nombreuses entreprises britanniques. Toutefois, le Royaume-Uni ne peut avoir un pied hors de l’Europe et un pied dedans ; le Brexit doit avoir des conséquences. Le statu quo ne peut perdurer. Si l’on jouit des mêmes avantages en étant hors de l’Union européenne, pourquoi se plier aux contraintes de l’Union ? Mais les agriculteurs britanniques ne bénéficieront plus de la politique agricole commune ; les régions n’auront plus accès aux fonds de cohésion ; les chercheurs britanniques ne pourront plus participer aux programmes européens de recherche, sauf si le gouvernement britannique en fait la demande explicite ; il en va de même pour les étudiants avec Erasmus. L’Europe, c’est aussi des politiques concrètes. Le Brexit aura donc des conséquences concrètes dans la vie des Britanniques. Notre but n’est pas de pénaliser les Britanniques ni de les punir, mais nous devons exprimer une position rationnelle, et si nous signons un accord, celui-ci doit être équilibré et protéger nos acteurs économiques.

Monsieur Huré, vous avez raison sur le cadre financier pluriannuel, et le parallèle avec les intercommunalités est éclairant : les compétences doivent aller de pair avec les responsabilités et les moyens. Mais trop souvent au niveau européen, on veut faire des choses ensemble, sans s’en donner les moyens. La position des États « frugaux », qui consiste à chercher à définir le budget européen en fonction de ce que chacun est prêt à donner et de voir ensuite comment on répartit les parts du gâteau, aboutit à une Europe au rabais. C’est prendre les problèmes à l’envers. Il faut commencer par examiner les politiques qui gagnent à être exercées en commun plutôt que séparément, puis y consacrer les moyens nécessaires, pourvu qu’in fine, comme le disait Jean Arthuis, on ne paie pas plus cher au total et que l’on évite les doublons. C’est pourquoi nous avons ces discussions au niveau européen sur les ressources propres, sur le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, la taxe plastique, la fiscalité des Gafa, la taxe sur les transactions financières... Un certain nombre d’outils existent. Deux semblent plus mûrs : la taxe carbone et la taxe sur le plastique, pour taxer ceux qui nous inondent de plastique sans financer aucunement le recyclage, tout en permettant de moduler le taux en fonction du recyclage.

La question des exonérations de CSG et de CRDS est une question bilatérale qui ne concerne pas l’Union européenne. M. Darmanin pourrait mieux vous répondre que moi.

Enfin, je ne peux pas, pour des raisons évidentes me prononcer d’un point de vue politique sur la question de l’unité du Royaume-Uni. En revanche, il m’apparaît important que l’État de droit soit pleinement respecté dans tous les pays. Partout, les évolutions doivent se produire dans le respect de la Constitution.