Le 25 janvier 2008, je me suis rendu à la CIMADE (service œcuménique d’entraide) afin de m’entretenir avec son président, M. Patrick PEUGEOT, et son secrétaire général, M. Laurent GIOVANNONI.
Le Comité inter-mouvements auprès des évacués – traduction de l’acronyme CIMADE – a été créé par des protestants en 1939 afin de venir en aide aux populations évacuées d’Alsace et de Lorraine (plus de 200 000 personnes).
La CIMADE est une association loi 1901 qui est financée par des fonds publics et privés (les dons sont collectés par le biais de la fondation du protestantisme, présidée par M. Pierre JOXE). Elle fonctionne grâce à l’excellent travail de salariés, basés à Paris et en province, et bénévoles, qui sont répartis dans une centaine de groupes locaux.
Depuis 1985, la CIMADE intervient auprès des étrangers retenus dans les centres de rétention administrative. Elle est la seule association autorisée à entrer dans les CRA afin de surveiller les conditions de rétention et d'apporter l'aide juridique nécessaire aux personnes en voie d'expulsion. Cette mission centrale mobilise à la fois des salariés (70) et des bénévoles. Dans le cadre d’une convention signée avec l’administration pénitentiaire, la CIMADE intervient également au sein des prisons auprès des détenus étrangers (intervention de bénévoles, dont une soixantaine d’interprètes).
La CIMADE accueille également des étrangers dans ses 80 permanences régionales (demandeurs d’asile, personnes menacées d’expulsion, etc.) afin de leur apporter un appui juridique.
D’autre part, la CIMADE gère deux foyers qui accueillent des demandeurs d’asile (Béziers) et des réfugiés (Massy).
La CIMADE coordonne aussi des actions de formation linguistique (cette mission est désormais incluse dans le contrat d’accueil et d’intégration).
Enfin, la CIMADE entretient des partenariats avec les sociétés civiles étrangères sur les questions migratoires. Elle a déjà créé une permanence au Maroc et souhaite étendre son action en Afrique de l’ouest et au Maghreb. Au Mali, elle a lancé un projet destiné à accompagner les Maliens expulsés lors de leur retour dans leur pays. Dans un avenir proche, la CIMADE envisage de lancer des projets en Europe de l’est.
La CIMADE n’apporte aucune aide matérielle, cette mission étant assurée par l’Agence nationale d’accueil des étrangers et des migrations (ANAEM).
La CIMADE n’est pas non plus compétente pour intervenir auprès des personnes sans domicile fixe. Cependant, son intervention devient de plus en plus fréquente en raison des nombreux contrôles d’identité effectués dans certains centres d’hébergement.
Après m’avoir présenté le fonctionnement de la CIMADE, MM. PEUGEOT et GIOVANNI ont appelé mon attention sur les dossiers brûlants.
Nous avons d’abord évoqué la question du projet de directive européenne sur le retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, qui devrait être examiné par le Parlement européen en mai 2008. Ce texte propose de porter à 18 mois la durée maximale de la rétention des étrangers. Rappelons qu’en France, paradoxalement, la législation est plus favorable malgré la loi SARKOZY de 2003, qui avait fait passer la durée maximale de privation de liberté de 12 jours à 32 jours. D’autre part, ce projet vise à introduire une sorte de double peine en assortissant systématiquement les décisions d’éloignement d’une interdiction de réadmission d’une durée de 5 ans. Décidé à combattre cette harmonisation par le bas, je leur ai assuré que je ferai tout mon possible afin de sensibiliser mes collègues du Sénat sur cette question. Le 14 février 2007, lors d’une réunion de la commission des lois, j’avais déjà eu l’occasion de dénoncer les dispositions inacceptables de ce texte. Pour signer la pétition contre le projet de directive : http://www.directivedelahonte.org/
MM. PEUGEOT et GIOVANNI m’ont également fait part de leurs préoccupations quant au souhait de M. Brice HORTEFEUX, ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du co-développement, de modifier le décret qui, depuis 1984, autorise la CIMADE à intervenir au sein des centres de rétention administrative. Ils craignent à juste titre de voir leur mission remise en cause par le gouvernement.
Ils ont aussi abordé la question de l’admission exceptionnelle au séjour. Créée par la loi du 24 juillet 2006, une commission nationale de l'admission exceptionnelle est chargée de s'assurer de l'homogénéité des décisions de régularisation sur l'ensemble du territoire. Cependant, M. GIOVANNI m’a signalé que les commissions départementales pour l’admission exceptionnelle n’ont pas encore été mises en place. D’autre part, la loi du 20 novembre 2007 a autorisé la régularisation, à titre exceptionnel, des étrangers exerçant un métier dans un secteur et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement. Or, certains sans papiers se trouvant dans cette situation se sont déjà fait interpeller dans des préfectures alors même qu’ils s’apprêtaient à solliciter leur régularisation. D’autres personnes ont même perdu leur emploi suite à la condamnation de leur employeur !
A l’occasion de la Saint-Valentin, la CIMADE lancera une campagne nationale, « les amoureux au ban public », qui dénoncera la politique restrictive et discriminatoire du gouvernement à l’égard des couples binationaux. Lors de mes prochains déplacements à l’étranger, je relaierai cette action auprès de nos concitoyens concernés par cette question.
Pour plus d’informations, consulter le site Internet de la CIMADE : Http://www.cimade.org/