Le Comité national anti-contrefaçon (CNAC), dont j’assure la présidence depuis quelques mois, a tenu son assemblée générale le mardi 10 décembre.
Organisé au siège social de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI), à Courbevoie, cet évènement a rassemblé une centaine de partenaires publics et privés, qui ont été accueillis par le directeur général de l’INPI, M. Yves LAPIERRE.
Les travaux ont été ouverts par la ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l’innovation et de l’économie numérique, Mme Fleur PELLERIN, qui a notamment insisté sur la nécessité d’associer les acteurs de la toile à la lutte contre la contrefaçon dans le cadre d’un « CNAC 2.0 ». Elle souhaite également que les consommateurs soient mieux informés sur les engagements des sites de vente en ligne en matière de lutte contre la contrefaçon. À cet égard, elle a suggéré d’étendre les chartes de bonnes pratiques aux intermédiaires bancaires (Paypal, etc.). Constatant que les fêtes de fin d’année sont une période faste pour la contrefaçon, elle s’est réjouie du succès d’une opération menée le 2 décembre par les autorités européennes, américaines et hongkongaises, qui a permis la saisie de 690 noms de domaine soupçonnés d’avoir favorisé la vente de produits contrefaisants.
L’assemblée générale a été l’occasion pour les présidents des cinq groupes de travail qui composent le CNAC de dresser le bilan des actions menées au cours des deux dernières années et de tracer quelques perspectives pour l’année 2014.
Le président du groupe de travail « coopération internationale », M. Michel DIEUDONNÉ (CCI France), a mis l’accent sur les actions de coopération menées avec le Maroc, l’Italie et la Chine. Il a également évoqué les actions de sensibilisation menées en direction du Parlement européen. Un déplacement à Bruxelles devrait être organisé après les élections européennes afin d’échanger avec la Représentation permanente de la France auprès de l’UE, des députés européens et des experts de la Commission européenne. Par ailleurs, M. DIEUDONNÉ entend resserrer les liens entre la France et l’Allemagne (DIHK). Il souhaite également que le CNAC se penche sur les dispositions de l’accord commercial anti-contrefaçon (ACTA), qui avait été rejeté par le Parlement européen en juillet 2012. Autre priorité : relancer le CNAC EUROMED (France, Tunisie, Turquie, Maroc, Italie, etc.).
Les activités du groupe de travail « sensibilisation » ont été exposées par le président de l’Union des fabricants (Unifab), M. Christian PEUGEOT. En 2012 et 2013, deux expositions temporaires ont été présentées au musée de la contrefaçon, qui accueille environ 10.000 visiteurs par an (exposition « Faux du logis » consacrée à la contrefaçon dans l’environnement domestique ; exposition « À vos marques, innovez ! » consacrée aux sports et loisirs). Une nouvelle exposition, intitulée « Ces emballages qui changent nos vies », vient d’être inaugurée. Par ailleurs, une exposition itinérante (« Contrefaçon, sans façon »), coproduite par l’INPI, le CNAC, l’Unifab, la direction générale des douanes et droits indirects, Renault et PSA, a déjà été présentée en France et à l’étranger (Laguiole, Lunéville, Sochaux, Mulhouse, Troyes, Shanghai). Organisé chaque année par l’Unifab, le forum européen de la propriété intellectuelle est aussi l’occasion d’aborder la question de la lutte contre la contrefaçon. L’édition 2014, qui se tiendra les 13 et 14 février, aura pour thème « compétitivité et propriété intellectuelle ». Autre évènement important : la journée mondiale anti-contrefaçon, créée à l’initiative du Global Anti-Counterfeiting Group (GACG). Des campagnes de sensibilisation estivales ont également été menées auprès de 200.000 vacanciers. En 2014, le groupe de travail souhaite poursuivre le dialogue avec les associations de consommateurs, développer les actions menées lors des foires et des salons professionnels, lancer une campagne de sensibilisation sur internet et engager une coopération avec le ministère de l’éducation nationale.
Au cours des deux dernières années, le groupe de travail « aspects normatifs et juridictionnels », représenté par Mme Christelle MARÉCHAL (LEEM), a suivi la mise en œuvre de plusieurs textes juridiques européens (directive de 2011 sur les médicaments falsifiés ; règlement de 2003 concernant l’intervention des autorités douanières à l’égard de marchandises soupçonnées de porter atteinte à certains droits de propriété intellectuelle ; directive de 2004 relative aux mesures et procédures visant à assurer le respect des droits de propriété intellectuelle ; directive de 2000 sur le commerce électronique ; etc.). Autre sujet d’intérêt : la révision du code des douanes de l’Union (CDU). Le groupe de travail s’est également penché sur ma proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon, que le Sénat a adoptée le 20 novembre dernier et qui sera examinée à l’Assemblée nationale au mois de février. Constatant que l’on est arrivé à la fin d’un cycle en matière normative, j’ai encouragé le groupe de travail à suivre de près la mise en place du brevet unitaire européen, les négociations sur le paquet législatif européen relatif au droit des marques ainsi que les travaux de la Commission européenne visant à moderniser les règles européennes sur le droit d’auteur.
Présidé par M. Quang-Minh LEPESCHEUX (Microsoft), le groupe de travail « cyber-contrefaçon » s’est réuni à quatre reprises en 2012 et 2013 afin d’auditionner des experts et des entités étrangères (Google, Paypal, etc.). M. LEPESCHEUX souhaite donner une « coloration plus opérationnelle » à ce groupe de travail en allant au-delà du simple constat. À cette fin, il propose trois axes de travail : sensibiliser le consommateur final, encourager les saisies de noms de domaine et entreprendre une action au niveau des intermédiaires de paiement en ligne.
Représenté par M. Ludovic JULIÉ (ministère de la culture), le groupe de travail « contrefaçon des œuvres d’art » a essentiellement orienté ses réflexions sur des normes juridiques (modification du décret du 3 mars 1981 sur la répression des fraudes en matière de transactions d’œuvres d’art et d’objets de collection, proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon, etc.). M. JULIÉ a suggéré plusieurs pistes pour l’avenir : réflexion sur la responsabilité civile et pénale sur les réseaux de communication en ligne (adoption d’une charte de bonnes pratiques) ; rédaction d’un vade mecum des textes applicables afin de permettre à la police, à la gendarmerie et à la douane de disposer d’un outil exhaustif pour la lutte contre la contrefaçon d’œuvre d’art ; analyse des procédures applicables lors des foires et salons ; réflexion sur les conséquences de la démocratisation des imprimantes 3D (création d’une plateforme de contact, élaboration d’une charte) ; audition des représentants du marché de l’art (galeristes, antiquaires).
Pour ma part, j’ai indiqué aux partenaires du CNAC que la lutte contre la contrefaçon s’apparente à un combat idéologique. Il faut combattre l’idée communément admise selon laquelle la contrefaçon ne serait pas une pratique répréhensible car elle permettrait de faire circuler les idées et les concepts. J’ai également exprimé le souhait de voir le CNAC conserver un caractère informel. C’est ainsi qu’il peut agir efficacement comme force d’influence. Le CNAC doit aussi continuer à travailler dans le cadre des groupes de travail.
J’ai également présenté les axes de travail du CNAC pour l’année 2014.
1) Approfondissement de la coopération internationale. Je souhaite développer les contacts et les accords avec nos partenaires étrangers (UE et hors UE). S’agissant de la relance du CNAC EUROMED, une réunion devrait se tenir à Rome à l’automne prochain. Il convient également de développer la coopération avec l’Observatoire européen des atteintes aux droits de propriété intellectuelle, dirigé par M. Paul MAIER.
2) Renforcement des outils de sensibilisation. Je fais de la rénovation du site Internet du CNAC une priorité. Quant au lancement de la campagne de sensibilisation sur Internet, il nécessitera le concours des partenaires privés du CNAC. La coopération avec l’Observatoire européen des atteintes aux droits de propriété intellectuelle pourrait également se traduire par la participation du CNAC à une campagne de sensibilisation à l’échelle européenne.
3) Amélioration de la lutte contre la cyber-contrefaçon. Le développement très rapide de la contrefaçon sur internet appelle la mise en œuvre de nouveaux outils de lutte efficaces. À cette fin, je propose que le CNAC élabore une feuille de route qui serait remise au Gouvernement. Les chartes de bonnes pratiques doivent également être développées car elles constituent un outil précieux. Il conviendra aussi de se pencher sur la question des moyens de paiement sur internet.
Après avoir annoncé l’adhésion au CNAC du Comité national des conseillers du commerce extérieur de la France (CNCCEF), j’ai précisé que les entreprises qui souhaitent rejoindre le CNAC doivent s’impliquer elles-mêmes, et non passer par des intermédiaires (avocats, cabinets de lobbying, etc.).
À l’issue d’un échange avec la salle, la ministre du commerce extérieur, Mme Nicole BRICQ, est intervenue pour encourager le CNAC à « aller le plus loin possible ». La lutte contre la contrefaçon est « un combat qui doit être mené sur tous les champs de bataille » et doit concerner toutes les entreprises, quelle que soit leur taille. 40.000 emplois sont en jeu. La ministre a incité les PME à recourir davantage aux outils de protection de la propriété intellectuelle. Elle a également rappelé les grandes lignes du plan gouvernemental de lutte contre la contrefaçon, présenté lors du conseil des ministres du 3 avril dernier : accentuation de l’action douanière sur internet ; amélioration de la proposition de la Commission européenne pour la révision du droit des marques ; renforcement de la coordination et de l’harmonisation des pratiques douanières au niveau européen (voir mon rapport) ; promotion de la défense des droits de propriété intellectuelle lors de la négociation de nouveaux accords commerciaux ; etc.
La matinée de travail s’est achevée avec la signature de la charte « France-PME sans contrefaçons », qui a été élaborée par le CNCCEF et s’inspire de la charte régionale « Lorraine sans contrefaçons ».
Pour de plus amples informations, vous pouvez consulter le dossier de presse de l’assemblée générale en cliquant ici.