Préoccupé par l'explosion du trafic international de faux médicaments, j'ai interrogé le ministre des affaires étrangères et du développement international sur la ratification par la France de la convention Médicrime.
M. Richard YUNG attire l’attention de M. le ministre des affaires étrangères et du développement international sur la convention du Conseil de l’Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique. Ouvert à la signature le 28 octobre 2011, ce texte, communément connu sous le nom de convention Médicrime, constitue le premier instrument international dans le domaine du droit pénal. Il prévoit que les États parties prennent les mesures nécessaires pour ériger en infractions pénales la fabrication, la fourniture, l’offre de fourniture et le trafic de contrefaçons. Il tend par ailleurs à améliorer la coopération et l’échange d’informations entre les autorités compétentes, tant au niveau national qu’international. Il comprend également des mesures de prévention et de protection des victimes.
Déjà signée par vingt-six États, dont la France, la convention Médicrime offre un cadre juridique international pour combattre un phénomène qui prend une ampleur très inquiétante. En effet, selon le Conseil de l’Europe, les ventes mondiales de faux médicaments ont doublé entre 2005 et 2010. Elles représenteraient aujourd’hui plus de 57 milliards d’euros. Aucun pays n’est épargné et tous les médicaments sont concernés (Viagra ; anticancéreux ; traitements contre le paludisme ; anti-thrombotiques ; etc.). D’après l’agence de santé américaine, un médicament sur dix vendu dans le monde serait une contrefaçon. Pis, dans certains pays africains, la moitié des médicaments en circulation seraient des faux. En France, les médicaments de contrefaçon ont représenté 18% des 7,6 millions d’articles saisis par la douane en 2013. En février 2014, les douaniers du Havre ont découvert 2,4 millions de faux médicaments en provenance de Chine, soit la plus importante saisie de contrefaçons de médicaments jamais réalisée par les services douaniers dans l’Union européenne.
La croissance exponentielle du trafic de faux médicaments s’explique principalement par l’essor du commerce en ligne. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), un médicament sur deux vendu sur internet est faux. Il en résulte que les produits médicaux contrefaisants sont désormais les premières marchandises saisies aux frontières de l’Union européenne via le trafic postal.
La contrefaçon de médicaments est une activité particulièrement lucrative. Elle serait dix à vingt-cinq fois plus rentable que le trafic de drogue. D’après l’Institut international de recherche anti-contrefaçon de médicaments (IRCAM), la contrefaçon d’un "blockbuster", c’est-à-dire un médicament rapportant plus d’un milliard de dollars pour un laboratoire, peut générer un bénéfice d’environ 500.000 dollars pour un investissement initial de 1.000 dollars. Au total, le trafic de faux médicaments génèrerait environ 250 milliards de dollars par an. Ces sommes colossales servent en grande partie à financer des organisations criminelles transnationales.
L’économie mondiale s’en trouve de plus en plus fragilisée. Plus grave encore, la contrefaçon de médicaments met en danger la santé des consommateurs. Les faux médicaments sont en effet des produits qui, selon les cas, ne contiennent aucun principe actif, des principes actifs mal dosés ou des principes actifs totalement différents de ceux devant être utilisés. Selon l’OMS, ce fléau cause environ 100.000 morts par an en Afrique.
Compte tenu de la gravité des menaces induites par la contrefaçon de médicaments, il importe que la convention Médicrime entre en vigueur dans les plus brefs délais. Pour ce faire, deux ratifications sont encore nécessaires. Aussi souhaite-t-il connaître l’état d’avancement du processus de ratification, par la France, de cette convention.