L’impression 3D est une technologie qui est née aux États-Unis au début des années 1980. Initialement conçue pour la réalisation de prototypes, elle permet, à partir d’un fichier numérique, de fabriquer un objet physique.
Longtemps réservée à l’industrie (santé, aéronautique, automobile, énergie, etc.), l’impression 3D est aujourd’hui accessible au grand public. Les particuliers peuvent désormais acquérir des imprimantes 3D pour un prix relativement modique (à partir de 300 euros).
La combinaison de la technologie de l’impression 3D et de celle du scanner 3D, qui permet de scanner toute forme dans un fichier numérique, donne aux particuliers la capacité de copier et de reproduire en grand nombre des objets tels que des jouets ou des pièces détachées.
La démocratisation de l'impression 3D accroît les risques d'atteinte aux droits de propriété intellectuelle. Permettant une réplication à l’infini d’objets protégés par des titres de propriété intellectuelle (droit d’auteur, marques, dessins et modèles, brevets), l’impression 3D est susceptible de faciliter la commission d’actes de contrefaçon par des particuliers bénéficiant de l’exception pour copie privée.
C’est la raison pour laquelle j'ai proposé, lors de la discussion au Sénat du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, d'étendre le principe de la rémunération pour copie privée aux outils de reproduction des œuvres en trois dimensions (imprimantes 3D, scanners 3D), l'objectif étant de compenser le préjudice subi par les titulaires de droit de propriété intellectuelle du fait des copies privées. Un dispositif similaire figure parmi les pistes de réflexion que le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a évoquées dans un avis adopté le 12 mars dernier.
Tout en regrettant que mon amendement n'ait pas été adopté, je me réjouis que le Gouvernement se soit engagé à faire émerger une solution adaptée d'ici à la fin de l'année.
Vous trouverez, ci-dessous, le compte rendu de la discussion de mon amendement.
Séance du 17 avril 2015
Article additionnel après l'article 41 ter
M. le président. L'amendement n° 257, présenté par MM. Guillaume et Yung, Mme Bricq, MM. Bigot, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 41 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Le second alinéa de l’article L. 311-1 est complété par les mots : « , ou de leur reproduction par une technologie d’impression en trois dimensions » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 311-5, après le mot : « support », sont insérés les mots : « ou de technologie ».
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Cet amendement concerne l’impression en trois dimensions, ou 3D. C’est un domaine nouveau.
Désormais, on peut maintenant installer chez soi des imprimantes qui coûtent entre 500 euros et 1 500 euros et permettent, grâce à l’achat, voire au piratage d’un logiciel, de fabriquer pratiquement tout objet matériel dans sa cuisine ou son salon !
Cela pose le problème des droits de propriété industrielle : il y a reproduction d’un objet, invention, marque, dessin ou modèle, sans contrepartie pour le titulaire du droit.
Les imprimantes ont longtemps été réservées à l’industrie. Aujourd’hui, c’est dans le domaine public. La combinaison de la technologie 3D et du scanner permet de fabriquer tout objet.
J’ai le sentiment que nous sommes au début d’une grande évolution, avec la généralisation des imprimantes 3D. Ces machines, qui ne sont ni très rapides ni très commodes pour l’instant, seront efficaces dans cinq ou dix ans. Dès lors, elles se généraliseront.
Nous avons cherché une solution pour régler le problème des droits de propriété industrielle. L’une de nos propositions, celle qui fait l’objet de l’amendement n° 257, consiste à s’inspirer du principe de la protection du droit d’auteur.
Prenons le cas de la musique. Quand vous achetez un support audio, vous payez la redevance pour copie privée, qui est assez modeste, mais qui alimente un fonds destiné à dédommager les auteurs dont les œuvres sont copiées.
Par parallélisme, nous avons imaginé la création d’une redevance pour copie privée qui s’appliquerait à l’imprimante 3D. Lors de l’achat d’une machine, on paierait une redevance qui permettrait aux inventeurs ou titulaires de brevets, marques, dessins et modèles, de percevoir une rémunération.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, corapporteur. Les auteurs de cet amendement soulèvent un sujet important. Mais le dispositif envisagé n’est pas abouti.
Par nature, les œuvres d’art matérielles sont exclues de l’autorisation légale de copie privée. Certes, on peut graver chez soi, à titre privé, un CD ; c’est pour cette raison qu’une taxe sur les CD existe. Mais il ne saurait y avoir de rémunération pour copie privée pour les dessins ou les sculptures.
L’extension qui nous est proposée reviendrait à taxer la technologie de reproduction, et non le support d’enregistrement. Une telle innovation du dispositif n’est pas prévue par l’article L. 311-4 du code de la propriété intellectuelle. Il manque donc une coordination.
Du point de vue de la protection, un objet fabriqué par une imprimante 3D, au mépris des règles, est, en soi, une contrefaçon.
De plus, des questions fondamentales sur la nature des œuvres matérielles se posent. Imaginez que vous vouliez faire une copie d’un bronze ou d’une sculpture en marbre de Carrare d’un grand artiste, comme Pompon : l’imprimante 3D va vous faire une copie en résine, et non en bronze. S’agit-il là du même objet ? Cela pose un problème.
Il serait malavisé de clore une réflexion qui en est à ses débuts par une loi imparfaite.
D’ailleurs, nos collègues de l'Assemblée nationale travaillent actuellement sur un sujet connexe, celui de la répartition de la rémunération pour copie privée. Attendons donc le résultat de leurs travaux, qui interviendra assez rapidement.
Eu égard à ces observations juridiques et pratiques, je sollicite le retrait de cet amendement, qui porte, certes, sur un vrai sujet. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre. La question est en effet complexe du point de vue de la propriété intellectuelle et de l’organisation de notre chaîne de valeur productive. C’est à juste titre que M. Yung la soulève.
Nous sommes progressivement en train d’investir et de réorganiser la production des imprimantes 3D. Mais ces équipements et les éléments qui en découlent sortent du champ des œuvres culturelles protégées par la rémunération pour copie privée. Ce sont des composantes industrielles ; il faut donc trouver le bon critère de protection.
Aujourd'hui, le secteur se développe. D’ailleurs, certains acteurs français se débrouillent très bien. Ils sont de véritables concurrents des acteurs internationaux. Je pense, entre autres, au groupe Gorgé.
L’enjeu est de connaître le bon critère de protection, surtout au regard de la compétition internationale, sans pour autant contraindre de manière excessive les acteurs concernés et les gêner dans leur développement industriel. La protection des œuvres culturelles est supérieure à celle qui s’applique pour les composants industriels classiques.
L'Assemblée nationale a engagé une réflexion sur le sujet. Je suggère que la Haute Assemblée mette en place un groupe de travail, en collaboration avec mon ministère, qui est également saisi. Nous devons avancer de manière patiente, mais résolue, afin de trouver le cadre adéquat dans les prochains mois ; le bon agenda serait d’ici à la fin de l’année. Les Allemands sont aussi très actifs dans ce domaine. À mon avis, la solution ne saurait être une application classique de la copie privée.
À la lumière de cet engagement, je vous invite à bien vouloir retirer cet amendement, monsieur le sénateur.
M. le président. Monsieur Yung, l'amendement n° 257 est-il maintenu ?
M. Richard Yung. Non, je vais le retirer, monsieur le président.
Je souhaite toutefois répondre à M. le corapporteur. La redevance pour copie privée a été créée pour les droits d’auteur. Mais rien n’interdit d’en élargir le champ. Il faut avoir une certaine souplesse dans l’approche des choses. Je signale d’ailleurs qu’un excellent rapport du Conseil économique, social et environnemental traite de la question des imprimantes 3D. Une autre possibilité serait de taxer les programmes utilisés pour activer l’impression. On pourrait imaginer une redevance sur les programmes informatiques.
Quoi qu’il en soit, je prends la balle au bond, monsieur le ministre. J’accepte votre offre de travailler ensemble pour affiner les propositions, et je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 257 est retiré.
L’impression 3D est une technologie qui est née aux États-Unis au début des années 1980. Initialement conçue pour la réalisation de prototypes, elle permet, à partir d’un fichier numérique, de fabriquer un objet physique.
Longtemps réservée à l’industrie (santé, aéronautique, automobile, énergie, etc.), l’impression 3D est aujourd’hui accessible au grand public. Les particuliers peuvent désormais acquérir des imprimantes 3D pour un prix relativement modique (à partir de 300 euros).
La combinaison de la technologie de l’impression 3D et de celle du scanner 3D, qui permet de scanner toute forme dans un fichier numérique, donne aux particuliers la capacité de copier et de reproduire en grand nombre des objets tels que des jouets ou des pièces détachées.
La démocratisation de l'impression 3D accroît les risques d'atteinte aux droits de propriété intellectuelle. Permettant une réplication à l’infini d’objets protégés par des titres de propriété intellectuelle (droit d’auteur, marques, dessins et modèles, brevets), l’impression 3D est susceptible de faciliter la commission d’actes de contrefaçon par des particuliers bénéficiant de l’exception pour copie privée.
C’est la raison pour laquelle j'ai proposé, lors de la discussion au Sénat du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, d'étendre le principe de la rémunération pour copie privée aux outils de reproduction des œuvres en trois dimensions (imprimantes 3D, scanners 3D), l'objectif étant de compenser le préjudice subi par les titulaires de droit de propriété intellectuelle du fait des copies privées. Un dispositif similaire figure parmi les pistes de réflexion que le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a évoquées dans un avis adopté le 12 mars dernier.
Tout en regrettant que mon amendement n'ait pas été adopté, je me réjouis que le Gouvernement se soit engagé à faire émerger une solution adaptée d'ici à la fin de l'année.
Vous trouverez, ci-dessous, le compte rendu de la discussion de mon amendement.
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Séance du 17 avril 2015
Article additionnel après l'article 41 ter
M. le président. L'amendement n° 257, présenté par MM. Guillaume et Yung, Mme Bricq, MM. Bigot, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 41 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Le second alinéa de l’article L. 311-1 est complété par les mots : « , ou de leur reproduction par une technologie d’impression en trois dimensions » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 311-5, après le mot : « support », sont insérés les mots : « ou de technologie ».
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Cet amendement concerne l’impression en trois dimensions, ou 3D. C’est un domaine nouveau.
Désormais, on peut maintenant installer chez soi des imprimantes qui coûtent entre 500 euros et 1 500 euros et permettent, grâce à l’achat, voire au piratage d’un logiciel, de fabriquer pratiquement tout objet matériel dans sa cuisine ou son salon !
Cela pose le problème des droits de propriété industrielle : il y a reproduction d’un objet, invention, marque, dessin ou modèle, sans contrepartie pour le titulaire du droit.
Les imprimantes ont longtemps été réservées à l’industrie. Aujourd’hui, c’est dans le domaine public. La combinaison de la technologie 3D et du scanner permet de fabriquer tout objet.
J’ai le sentiment que nous sommes au début d’une grande évolution, avec la généralisation des imprimantes 3D. Ces machines, qui ne sont ni très rapides ni très commodes pour l’instant, seront efficaces dans cinq ou dix ans. Dès lors, elles se généraliseront.
Nous avons cherché une solution pour régler le problème des droits de propriété industrielle. L’une de nos propositions, celle qui fait l’objet de l’amendement n° 257, consiste à s’inspirer du principe de la protection du droit d’auteur.
Prenons le cas de la musique. Quand vous achetez un support audio, vous payez la redevance pour copie privée, qui est assez modeste, mais qui alimente un fonds destiné à dédommager les auteurs dont les œuvres sont copiées.
Par parallélisme, nous avons imaginé la création d’une redevance pour copie privée qui s’appliquerait à l’imprimante 3D. Lors de l’achat d’une machine, on paierait une redevance qui permettrait aux inventeurs ou titulaires de brevets, marques, dessins et modèles, de percevoir une rémunération.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, corapporteur. Les auteurs de cet amendement soulèvent un sujet important. Mais le dispositif envisagé n’est pas abouti.
Par nature, les œuvres d’art matérielles sont exclues de l’autorisation légale de copie privée. Certes, on peut graver chez soi, à titre privé, un CD ; c’est pour cette raison qu’une taxe sur les CD existe. Mais il ne saurait y avoir de rémunération pour copie privée pour les dessins ou les sculptures.
L’extension qui nous est proposée reviendrait à taxer la technologie de reproduction, et non le support d’enregistrement. Une telle innovation du dispositif n’est pas prévue par l’article L. 311-4 du code de la propriété intellectuelle. Il manque donc une coordination.
Du point de vue de la protection, un objet fabriqué par une imprimante 3D, au mépris des règles, est, en soi, une contrefaçon.
De plus, des questions fondamentales sur la nature des œuvres matérielles se posent. Imaginez que vous vouliez faire une copie d’un bronze ou d’une sculpture en marbre de Carrare d’un grand artiste, comme Pompon : l’imprimante 3D va vous faire une copie en résine, et non en bronze. S’agit-il là du même objet ? Cela pose un problème.
Il serait malavisé de clore une réflexion qui en est à ses débuts par une loi imparfaite.
D’ailleurs, nos collègues de l'Assemblée nationale travaillent actuellement sur un sujet connexe, celui de la répartition de la rémunération pour copie privée. Attendons donc le résultat de leurs travaux, qui interviendra assez rapidement.
Eu égard à ces observations juridiques et pratiques, je sollicite le retrait de cet amendement, qui porte, certes, sur un vrai sujet. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre. La question est en effet complexe du point de vue de la propriété intellectuelle et de l’organisation de notre chaîne de valeur productive. C’est à juste titre que M. Yung la soulève.
Nous sommes progressivement en train d’investir et de réorganiser la production des imprimantes 3D. Mais ces équipements et les éléments qui en découlent sortent du champ des œuvres culturelles protégées par la rémunération pour copie privée. Ce sont des composantes industrielles ; il faut donc trouver le bon critère de protection.
Aujourd'hui, le secteur se développe. D’ailleurs, certains acteurs français se débrouillent très bien. Ils sont de véritables concurrents des acteurs internationaux. Je pense, entre autres, au groupe Gorgé.
L’enjeu est de connaître le bon critère de protection, surtout au regard de la compétition internationale, sans pour autant contraindre de manière excessive les acteurs concernés et les gêner dans leur développement industriel. La protection des œuvres culturelles est supérieure à celle qui s’applique pour les composants industriels classiques.
L'Assemblée nationale a engagé une réflexion sur le sujet. Je suggère que la Haute Assemblée mette en place un groupe de travail, en collaboration avec mon ministère, qui est également saisi. Nous devons avancer de manière patiente, mais résolue, afin de trouver le cadre adéquat dans les prochains mois ; le bon agenda serait d’ici à la fin de l’année. Les Allemands sont aussi très actifs dans ce domaine. À mon avis, la solution ne saurait être une application classique de la copie privée.
À la lumière de cet engagement, je vous invite à bien vouloir retirer cet amendement, monsieur le sénateur.
M. le président. Monsieur Yung, l'amendement n° 257 est-il maintenu ?
M. Richard Yung. Non, je vais le retirer, monsieur le président.
Je souhaite toutefois répondre à M. le corapporteur. La redevance pour copie privée a été créée pour les droits d’auteur. Mais rien n’interdit d’en élargir le champ. Il faut avoir une certaine souplesse dans l’approche des choses. Je signale d’ailleurs qu’un excellent rapport du Conseil économique, social et environnemental traite de la question des imprimantes 3D. Une autre possibilité serait de taxer les programmes utilisés pour activer l’impression. On pourrait imaginer une redevance sur les programmes informatiques.
Quoi qu’il en soit, je prends la balle au bond, monsieur le ministre. J’accepte votre offre de travailler ensemble pour affiner les propositions, et je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 257 est retiré.
L’impression 3D est une technologie qui est née aux États-Unis au début des années 1980. Initialement conçue pour la réalisation de prototypes, elle permet, à partir d’un fichier numérique, de fabriquer un objet physique.
Longtemps réservée à l’industrie (santé, aéronautique, automobile, énergie, etc.), l’impression 3D est aujourd’hui accessible au grand public. Les particuliers peuvent désormais acquérir des imprimantes 3D pour un prix relativement modique (à partir de 300 euros).
La combinaison de la technologie de l’impression 3D et de celle du scanner 3D, qui permet de scanner toute forme dans un fichier numérique, donne aux particuliers la capacité de copier et de reproduire en grand nombre des objets tels que des jouets ou des pièces détachées.
La démocratisation de l'impression 3D accroît les risques d'atteinte aux droits de propriété intellectuelle. Permettant une réplication à l’infini d’objets protégés par des titres de propriété intellectuelle (droit d’auteur, marques, dessins et modèles, brevets), l’impression 3D est susceptible de faciliter la commission d’actes de contrefaçon par des particuliers bénéficiant de l’exception pour copie privée.
C’est la raison pour laquelle j'ai proposé, lors de la discussion au Sénat du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, d'étendre le principe de la rémunération pour copie privée aux outils de reproduction des œuvres en trois dimensions (imprimantes 3D, scanners 3D), l'objectif étant de compenser le préjudice subi par les titulaires de droit de propriété intellectuelle du fait des copies privées. Un dispositif similaire figure parmi les pistes de réflexion que le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a évoquées dans un avis adopté le 12 mars dernier.
Tout en regrettant que mon amendement n'ait pas été adopté, je me réjouis que le Gouvernement se soit engagé à faire émerger une solution adaptée d'ici à la fin de l'année.
Vous trouverez, ci-dessous, le compte rendu de la discussion de mon amendement.
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Séance du 17 avril 2015
Article additionnel après l'article 41 ter
M. le président. L'amendement n° 257, présenté par MM. Guillaume et Yung, Mme Bricq, MM. Bigot, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 41 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Le second alinéa de l’article L. 311-1 est complété par les mots : « , ou de leur reproduction par une technologie d’impression en trois dimensions » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 311-5, après le mot : « support », sont insérés les mots : « ou de technologie ».
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Cet amendement concerne l’impression en trois dimensions, ou 3D. C’est un domaine nouveau.
Désormais, on peut maintenant installer chez soi des imprimantes qui coûtent entre 500 euros et 1 500 euros et permettent, grâce à l’achat, voire au piratage d’un logiciel, de fabriquer pratiquement tout objet matériel dans sa cuisine ou son salon !
Cela pose le problème des droits de propriété industrielle : il y a reproduction d’un objet, invention, marque, dessin ou modèle, sans contrepartie pour le titulaire du droit.
Les imprimantes ont longtemps été réservées à l’industrie. Aujourd’hui, c’est dans le domaine public. La combinaison de la technologie 3D et du scanner permet de fabriquer tout objet.
J’ai le sentiment que nous sommes au début d’une grande évolution, avec la généralisation des imprimantes 3D. Ces machines, qui ne sont ni très rapides ni très commodes pour l’instant, seront efficaces dans cinq ou dix ans. Dès lors, elles se généraliseront.
Nous avons cherché une solution pour régler le problème des droits de propriété industrielle. L’une de nos propositions, celle qui fait l’objet de l’amendement n° 257, consiste à s’inspirer du principe de la protection du droit d’auteur.
Prenons le cas de la musique. Quand vous achetez un support audio, vous payez la redevance pour copie privée, qui est assez modeste, mais qui alimente un fonds destiné à dédommager les auteurs dont les œuvres sont copiées.
Par parallélisme, nous avons imaginé la création d’une redevance pour copie privée qui s’appliquerait à l’imprimante 3D. Lors de l’achat d’une machine, on paierait une redevance qui permettrait aux inventeurs ou titulaires de brevets, marques, dessins et modèles, de percevoir une rémunération.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, corapporteur. Les auteurs de cet amendement soulèvent un sujet important. Mais le dispositif envisagé n’est pas abouti.
Par nature, les œuvres d’art matérielles sont exclues de l’autorisation légale de copie privée. Certes, on peut graver chez soi, à titre privé, un CD ; c’est pour cette raison qu’une taxe sur les CD existe. Mais il ne saurait y avoir de rémunération pour copie privée pour les dessins ou les sculptures.
L’extension qui nous est proposée reviendrait à taxer la technologie de reproduction, et non le support d’enregistrement. Une telle innovation du dispositif n’est pas prévue par l’article L. 311-4 du code de la propriété intellectuelle. Il manque donc une coordination.
Du point de vue de la protection, un objet fabriqué par une imprimante 3D, au mépris des règles, est, en soi, une contrefaçon.
De plus, des questions fondamentales sur la nature des œuvres matérielles se posent. Imaginez que vous vouliez faire une copie d’un bronze ou d’une sculpture en marbre de Carrare d’un grand artiste, comme Pompon : l’imprimante 3D va vous faire une copie en résine, et non en bronze. S’agit-il là du même objet ? Cela pose un problème.
Il serait malavisé de clore une réflexion qui en est à ses débuts par une loi imparfaite.
D’ailleurs, nos collègues de l'Assemblée nationale travaillent actuellement sur un sujet connexe, celui de la répartition de la rémunération pour copie privée. Attendons donc le résultat de leurs travaux, qui interviendra assez rapidement.
Eu égard à ces observations juridiques et pratiques, je sollicite le retrait de cet amendement, qui porte, certes, sur un vrai sujet. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre. La question est en effet complexe du point de vue de la propriété intellectuelle et de l’organisation de notre chaîne de valeur productive. C’est à juste titre que M. Yung la soulève.
Nous sommes progressivement en train d’investir et de réorganiser la production des imprimantes 3D. Mais ces équipements et les éléments qui en découlent sortent du champ des œuvres culturelles protégées par la rémunération pour copie privée. Ce sont des composantes industrielles ; il faut donc trouver le bon critère de protection.
Aujourd'hui, le secteur se développe. D’ailleurs, certains acteurs français se débrouillent très bien. Ils sont de véritables concurrents des acteurs internationaux. Je pense, entre autres, au groupe Gorgé.
L’enjeu est de connaître le bon critère de protection, surtout au regard de la compétition internationale, sans pour autant contraindre de manière excessive les acteurs concernés et les gêner dans leur développement industriel. La protection des œuvres culturelles est supérieure à celle qui s’applique pour les composants industriels classiques.
L'Assemblée nationale a engagé une réflexion sur le sujet. Je suggère que la Haute Assemblée mette en place un groupe de travail, en collaboration avec mon ministère, qui est également saisi. Nous devons avancer de manière patiente, mais résolue, afin de trouver le cadre adéquat dans les prochains mois ; le bon agenda serait d’ici à la fin de l’année. Les Allemands sont aussi très actifs dans ce domaine. À mon avis, la solution ne saurait être une application classique de la copie privée.
À la lumière de cet engagement, je vous invite à bien vouloir retirer cet amendement, monsieur le sénateur.
M. le président. Monsieur Yung, l'amendement n° 257 est-il maintenu ?
M. Richard Yung. Non, je vais le retirer, monsieur le président.
Je souhaite toutefois répondre à M. le corapporteur. La redevance pour copie privée a été créée pour les droits d’auteur. Mais rien n’interdit d’en élargir le champ. Il faut avoir une certaine souplesse dans l’approche des choses. Je signale d’ailleurs qu’un excellent rapport du Conseil économique, social et environnemental traite de la question des imprimantes 3D. Une autre possibilité serait de taxer les programmes utilisés pour activer l’impression. On pourrait imaginer une redevance sur les programmes informatiques.
Quoi qu’il en soit, je prends la balle au bond, monsieur le ministre. J’accepte votre offre de travailler ensemble pour affiner les propositions, et je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 257 est retiré.
L’impression 3D est une technologie qui est née aux États-Unis au début des années 1980. Initialement conçue pour la réalisation de prototypes, elle permet, à partir d’un fichier numérique, de fabriquer un objet physique.
Longtemps réservée à l’industrie (santé, aéronautique, automobile, énergie, etc.), l’impression 3D est aujourd’hui accessible au grand public. Les particuliers peuvent désormais acquérir des imprimantes 3D pour un prix relativement modique (à partir de 300 euros).
La combinaison de la technologie de l’impression 3D et de celle du scanner 3D, qui permet de scanner toute forme dans un fichier numérique, donne aux particuliers la capacité de copier et de reproduire en grand nombre des objets tels que des jouets ou des pièces détachées.
La démocratisation de l'impression 3D accroît les risques d'atteinte aux droits de propriété intellectuelle. Permettant une réplication à l’infini d’objets protégés par des titres de propriété intellectuelle (droit d’auteur, marques, dessins et modèles, brevets), l’impression 3D est susceptible de faciliter la commission d’actes de contrefaçon par des particuliers bénéficiant de l’exception pour copie privée.
C’est la raison pour laquelle j'ai proposé, lors de la discussion au Sénat du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, d'étendre le principe de la rémunération pour copie privée aux outils de reproduction des œuvres en trois dimensions (imprimantes 3D, scanners 3D), l'objectif étant de compenser le préjudice subi par les titulaires de droit de propriété intellectuelle du fait des copies privées. Un dispositif similaire figure parmi les pistes de réflexion que le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a évoquées dans un avis adopté le 12 mars dernier.
Tout en regrettant que mon amendement n'ait pas été adopté, je me réjouis que le Gouvernement se soit engagé à faire émerger une solution adaptée d'ici à la fin de l'année.
Vous trouverez, ci-dessous, le compte rendu de la discussion de mon amendement.
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Séance du 17 avril 2015
Article additionnel après l'article 41 ter
M. le président. L'amendement n° 257, présenté par MM. Guillaume et Yung, Mme Bricq, MM. Bigot, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 41 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Le second alinéa de l’article L. 311-1 est complété par les mots : « , ou de leur reproduction par une technologie d’impression en trois dimensions » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 311-5, après le mot : « support », sont insérés les mots : « ou de technologie ».
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Cet amendement concerne l’impression en trois dimensions, ou 3D. C’est un domaine nouveau.
Désormais, on peut maintenant installer chez soi des imprimantes qui coûtent entre 500 euros et 1 500 euros et permettent, grâce à l’achat, voire au piratage d’un logiciel, de fabriquer pratiquement tout objet matériel dans sa cuisine ou son salon !
Cela pose le problème des droits de propriété industrielle : il y a reproduction d’un objet, invention, marque, dessin ou modèle, sans contrepartie pour le titulaire du droit.
Les imprimantes ont longtemps été réservées à l’industrie. Aujourd’hui, c’est dans le domaine public. La combinaison de la technologie 3D et du scanner permet de fabriquer tout objet.
J’ai le sentiment que nous sommes au début d’une grande évolution, avec la généralisation des imprimantes 3D. Ces machines, qui ne sont ni très rapides ni très commodes pour l’instant, seront efficaces dans cinq ou dix ans. Dès lors, elles se généraliseront.
Nous avons cherché une solution pour régler le problème des droits de propriété industrielle. L’une de nos propositions, celle qui fait l’objet de l’amendement n° 257, consiste à s’inspirer du principe de la protection du droit d’auteur.
Prenons le cas de la musique. Quand vous achetez un support audio, vous payez la redevance pour copie privée, qui est assez modeste, mais qui alimente un fonds destiné à dédommager les auteurs dont les œuvres sont copiées.
Par parallélisme, nous avons imaginé la création d’une redevance pour copie privée qui s’appliquerait à l’imprimante 3D. Lors de l’achat d’une machine, on paierait une redevance qui permettrait aux inventeurs ou titulaires de brevets, marques, dessins et modèles, de percevoir une rémunération.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, corapporteur. Les auteurs de cet amendement soulèvent un sujet important. Mais le dispositif envisagé n’est pas abouti.
Par nature, les œuvres d’art matérielles sont exclues de l’autorisation légale de copie privée. Certes, on peut graver chez soi, à titre privé, un CD ; c’est pour cette raison qu’une taxe sur les CD existe. Mais il ne saurait y avoir de rémunération pour copie privée pour les dessins ou les sculptures.
L’extension qui nous est proposée reviendrait à taxer la technologie de reproduction, et non le support d’enregistrement. Une telle innovation du dispositif n’est pas prévue par l’article L. 311-4 du code de la propriété intellectuelle. Il manque donc une coordination.
Du point de vue de la protection, un objet fabriqué par une imprimante 3D, au mépris des règles, est, en soi, une contrefaçon.
De plus, des questions fondamentales sur la nature des œuvres matérielles se posent. Imaginez que vous vouliez faire une copie d’un bronze ou d’une sculpture en marbre de Carrare d’un grand artiste, comme Pompon : l’imprimante 3D va vous faire une copie en résine, et non en bronze. S’agit-il là du même objet ? Cela pose un problème.
Il serait malavisé de clore une réflexion qui en est à ses débuts par une loi imparfaite.
D’ailleurs, nos collègues de l'Assemblée nationale travaillent actuellement sur un sujet connexe, celui de la répartition de la rémunération pour copie privée. Attendons donc le résultat de leurs travaux, qui interviendra assez rapidement.
Eu égard à ces observations juridiques et pratiques, je sollicite le retrait de cet amendement, qui porte, certes, sur un vrai sujet. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre. La question est en effet complexe du point de vue de la propriété intellectuelle et de l’organisation de notre chaîne de valeur productive. C’est à juste titre que M. Yung la soulève.
Nous sommes progressivement en train d’investir et de réorganiser la production des imprimantes 3D. Mais ces équipements et les éléments qui en découlent sortent du champ des œuvres culturelles protégées par la rémunération pour copie privée. Ce sont des composantes industrielles ; il faut donc trouver le bon critère de protection.
Aujourd'hui, le secteur se développe. D’ailleurs, certains acteurs français se débrouillent très bien. Ils sont de véritables concurrents des acteurs internationaux. Je pense, entre autres, au groupe Gorgé.
L’enjeu est de connaître le bon critère de protection, surtout au regard de la compétition internationale, sans pour autant contraindre de manière excessive les acteurs concernés et les gêner dans leur développement industriel. La protection des œuvres culturelles est supérieure à celle qui s’applique pour les composants industriels classiques.
L'Assemblée nationale a engagé une réflexion sur le sujet. Je suggère que la Haute Assemblée mette en place un groupe de travail, en collaboration avec mon ministère, qui est également saisi. Nous devons avancer de manière patiente, mais résolue, afin de trouver le cadre adéquat dans les prochains mois ; le bon agenda serait d’ici à la fin de l’année. Les Allemands sont aussi très actifs dans ce domaine. À mon avis, la solution ne saurait être une application classique de la copie privée.
À la lumière de cet engagement, je vous invite à bien vouloir retirer cet amendement, monsieur le sénateur.
M. le président. Monsieur Yung, l'amendement n° 257 est-il maintenu ?
M. Richard Yung. Non, je vais le retirer, monsieur le président.
Je souhaite toutefois répondre à M. le corapporteur. La redevance pour copie privée a été créée pour les droits d’auteur. Mais rien n’interdit d’en élargir le champ. Il faut avoir une certaine souplesse dans l’approche des choses. Je signale d’ailleurs qu’un excellent rapport du Conseil économique, social et environnemental traite de la question des imprimantes 3D. Une autre possibilité serait de taxer les programmes utilisés pour activer l’impression. On pourrait imaginer une redevance sur les programmes informatiques.
Quoi qu’il en soit, je prends la balle au bond, monsieur le ministre. J’accepte votre offre de travailler ensemble pour affiner les propositions, et je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 257 est retiré.