Jamais deux sans trois. Après avoir vidé de leur substance le projet de loi de finances pour 2014 et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, les sénateurs communistes, UMP et centristes ont profondément dénaturé le projet de loi de finances rectificative pour 2013 (collectif budgétaire). Refusant de cautionner une « mascarade » qui aurait conduit à une dégradation de 5 milliards d’euros du solde budgétaire, mes collègues de la majorité gouvernementale (PS, écologistes et RDSE) et moi-même n’avons pas pris part au vote final. Résultat : le texte a été rejeté à l’unanimité des suffrages exprimés (188 voix contre 0).
Encore une fois, je déplore que les sénateurs du groupe CRC aient opposé leur veto à un projet de loi qui confirme le sérieux budgétaire du Gouvernement et contribue à soutenir la reprise économique.
Suite à l’échec de la commission mixte paritaire (CMP), qui s’est réunie le 16 décembre et dont j’étais le co-rapporteur, une nouvelle lecture doit avoir lieu à l’Assemblée nationale (17 décembre) et au Sénat (18 décembre). Sauf coup de théâtre improbable, le mot de la fin reviendra aux députés.
Le principal objectif poursuivi par le collectif budgétaire est l’amélioration du financement de l’économie réelle.
Mesure phare, la réforme du régime de l’assurance-vie vise à orienter davantage cette source d’épargne financière, dont le montant total avoisine les 1.500 milliards d’euros (soit 40% de l’épargne financière des Français), vers le financement du système productif. À cette fin, deux nouveaux produits sont créés : un contrat « euro-croissance », destiné à constituer un nouveau pilier de l’assurance-vie entre les contrats en euros et les contrats en unités de compte, et un contrat « vie-génération » visant à orienter les actifs vers des secteurs économiques utiles (PME et ETI, logement intermédiaire et social, entreprises de l’économie sociale et solidaire). La création d’un contrat « vie-génération » va notamment permettre de redynamiser le secteur du capital-investissement (FCPR, FPCI, FCPI, FIP, sociétés de capital-risque), dont la mission – fondamentale – consiste à apporter des fonds propres (90%) aux PME et ETI non cotées (1.548 entreprises accompagnées en 2012).
Une autre disposition tend à favoriser le capital-investissement : l’amortissement exceptionnel des investissements des entreprises dans les PME innovantes. Concrètement, les entreprises qui investissent directement ou indirectement dans des PME innovantes reconnues par le label Bpifrance pourront bénéficier d’un mécanisme d’amortissement favorable leur permettant de déduire leur investissement de leur résultat imposable progressivement sur cinq ans.
Poursuivant la réforme des soutiens financiers à l’export, le collectif budgétaire complète le dispositif public d’assurance-crédit permettant de soutenir les exportations de court terme (exportations dont la durée de risque maximale est inférieure à deux ans). La Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur (Coface) se voit accorder une garantie de l’État de un milliard d’euros qui lui permettra de réassurer des sociétés privées habilitées à pratiquer des opérations d’assurance-crédit à l’export lorsque les conditions de leur intervention sans couverture publique ne seront plus réunies.
Autre disposition visant à renforcer la compétitivité des exportateurs français : l’extension du périmètre des bénéficiaires de la garantie de refinancement des crédits à l’exportation octroyée par la Coface. Créée en décembre 2012, cette garantie vise à faciliter le refinancement des crédits à l’exportation accordés par les établissements bancaires qui bénéficient d’une assurance-crédit de la Coface.
Le Gouvernement propose également la mise en œuvre de plusieurs mesures de simplification pour les particuliers et les entreprises : suppression de l’obligation faite aux particuliers de joindre les pièces justificatives établies par des tiers à une déclaration de revenus sous forme papier ; suppression de l’obligation faite aux notaires de déposer un même acte de donation d’immeubles dans deux ressorts différents ; dématérialisation des actes notifiés aux tiers-détenteurs ; extension du recours obligatoire au télépaiement de la taxe sur les salaires ; simplification du recouvrement de nombreuses taxes assimilées à la TVA ; etc.
Le projet de loi prévoit, par ailleurs, la reprise par l’État de la dette contractée par l’Établissement public de financement et de restructuration (4,5 milliards d’euros), auquel avait été confiée la gestion du soutien financier du Crédit Lyonnais.
À signaler également la réforme de la taxe d’apprentissage.
Quant à l’aménagement de l’exit tax, il vise à améliorer la lutte contre l’évasion fiscale. Créée en 2011, cette taxe consiste en l’imposition des plus-values latentes lors du transfert par les contribuables de leur domicile fiscal hors de France. Le seuil à partir duquel elle sera appliquée est abaissé de 1,3 million à 800.000 euros en valeur des participations détenues lors du transfert de domicile fiscal. Par ailleurs, cette taxe pourra être appliquée aux contribuables détenant une participation d'au moins 50% dans une société pour laquelle le transfert peut alléger substantiellement l'impôt. Pour ce qui concerne la durée de domiciliation à l’étranger pour bénéficier d’une diminution de la taxe, elle est allongée de huit à quinze ans. Enfin, son champ d’application est étendu à des éléments de portefeuilles financiers (organismes de placement collectifs, fonds communs de placement).
Parmi les dispositions introduites à l’Assemblée nationale figure l’aménagement du régime de cotisation « retraite » des fonctionnaires français détachés dans une organisation internationale ou une administration étrangère. Actuellement, ces personnes peuvent choisir de cotiser uniquement dans le régime de pension de l’organisme international ou de l’administration étrangère ou bien d’opter pour une double cotisation dans les systèmes français et international (ou étranger). Dans le cas d’une double cotisation, le fonctionnaire ne peut cumuler la pension acquise au titre de son détachement avec celle acquise au titre du régime français que dans la limite d’un certain seuil: le montant de la pension éventuellement acquise au titre des services accomplis en détachement ne peut être supérieur au montant de la pension que l’intéressé aurait acquise en l’absence de détachement. Si tel est le cas, la pension française est réduite à concurrence du montant de la pension acquise lors du détachement. Ce dispositif anti-cumul étant contraire au règlement européen relatif à la coordination des systèmes de sécurité sociale, le Gouvernement a prévu la possibilité pour les fonctionnaires ayant opté pour la double cotisation d’obtenir le remboursement des cotisations versées au régime français. Cette nouvelle règle sera applicable aux trois fonctions publiques (État, territoriale, hospitalière).
Cette présentation étant loin d’être exhaustive, vous pouvez obtenir de plus amples informations en consultant le rapport de mon collègue François MARC, rapporteur général de la commission des finances.
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