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Richard Yung
Octobre 2021

Le 9 octobre, la commission des finances du Sénat a adopté à l’unanimité le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière, dont je suis le rapporteur.

Ce texte revêt une dimension essentiellement technique. Il vise à adapter la loi française à treize textes européens – directives et règlements – récemment adoptés et touchant à de nombreux domaines (droit bancaire, droit des assurances, droit boursier, droit de la consommation, droit comptable). À cette fin, il prévoit notamment d’autoriser le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnances.

Il comporte tout d’abord un important volet consacré à l’adaptation de notre droit aux deuxième et troisième piliers de l’union bancaire.

Pour mémoire, la première étape de l’union bancaire a consisté en la création d’un mécanisme de surveillance unique (MSU). À partir du 4 novembre prochain, la Banque centrale européenne (BCE) sera chargée de la surveillance prudentielle des principaux établissements bancaires de la zone euro ainsi que ceux établis dans les États membres participant au MSU. Dans cette perspective, l’institut de Francfort est sur le point d’achever une revue des actifs bancaires ainsi que des tests de résistance, réalisés conjointement avec l’Autorité bancaire européenne (ABE).

Le deuxième pilier de l’union bancaire concerne la résolution des crises bancaires. Il comprend, d’une part, un cadre harmonisé en matière de résolution des crises bancaires et, d’autre part, un mécanisme de résolution unique (MRU).

Le projet de loi vise à assurer l’adéquation de la loi française au cadre européen en matière de résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement. À compter du 1er janvier 2015, de nouveaux outils destinés à mieux prévenir et gérer les crises bancaires seront opérationnels. Il en ira ainsi du renflouement interne des banques, qui garantira que les contribuables ne seront pas mis à contribution en cas de nouvelle crise bancaire. Les pertes des établissements défaillants seront épongées en priorité par (1) les actions et autres instruments de fonds propres, (2) les créanciers juniors (dette subordonnée), (3) les créanciers seniors (créances qui ne sont ni subordonnées, ni sécurisées), (4) les dépôts des PME et des personnes privées au-delà de 100.000 euros. Seront en revanche exclus du renflouement interne les dépôts inférieurs à 100.000 euros ainsi que les créances assorties d’une sûreté.

Le Gouvernement devra par ailleurs procéder à l’adaptation de notre droit au règlement instituant le mécanisme de résolution unique (MRU). À partir du 1er janvier 2016, un conseil de résolution unique sera chargé d’élaborer les plans de résolution des banques placées sous la supervision directe de la BCE et de conduire leur procédure de résolution. Par ailleurs, un fonds de résolution unique sera chargé de financer les mesures de résolution des établissements bancaires situés dans les pays participant au MRU. Alimenté par les banques, il sera doté de 55 milliards d’euros d’ici à 2024. Un accord intergouvernemental prévoit l’obligation pour les États participant au MRU de transférer à ce fonds les contributions bancaires. Il fixe également les modalités de leur affectation à différents compartiments correspondant à chaque État ainsi que le rythme de la mutualisation des compartiments nationaux. Enfin, il définit les financements complémentaires qui pourront être utilisés en cas d'insuffisance des ressources de la partie mutualisée du fonds.
Le mode de calcul des contributions des établissements bancaires fait l'objet d'un intense débat. Sa définition relève d’actes délégués de la Commission européenne. Or, cette dernière a conçu un dispositif qui prend davantage en considération le total des actifs que les risques qu’ils portent. Concrètement, si cette clé de calcul entrait en vigueur, les banques françaises paieraient 30% du total du fonds alors que les banques allemandes en paieraient entre 20 et 25% ! Refusant un tel déséquilibre, j’ai fait adopter à l’unanimité un amendement prévoyant que la participation de la France au MRU n’interviendra qu’à la condition que les actes délégués tiennent davantage compte du principe d’égalité de traitement entre les secteurs bancaires nationaux, et cela afin d’éviter de pénaliser à terme les capacités de financement de notre économie.

Le troisième pilier de l’union bancaire correspond à l’harmonisation de la législation relative à la garantie des dépôts. Le projet de loi propose ainsi d’habiliter le Gouvernement à transposer une directive en date du 16 avril 2014 qui prévoit la protection des dépôts bancaires inférieurs à 100.000 euros, le raccourcissement du délai d’indemnisation des déposants (7 jours) ainsi que la possibilité de prêts mutuels entre les fonds nationaux de garantie des dépôts. Ces dispositions vont dans le bon sens et devront être complétées par la mise en place d’un fonds de garantie unique, que j’appelle de mes vœux.

L’autre volet majeur du projet de loi concerne la transposition dans la loi française de la directive créant un nouveau cadre réglementaire du secteur de l’assurance (Solvabilité II), qui doit entrer en vigueur à partir de janvier 2016. L’objectif est de créer un régime prudentiel unique au niveau européen pour les entreprises d’assurance et de réassurance afin de renforcer la prise en considération des risques et d’obliger les assureurs à mettre en réserve suffisamment de capital pour faire face à ces risques.

À l’Assemblée nationale, le débat s’était concentré sur les dispositions tendant à accroître la transparence des entreprises pétrolières, minières et forestières. En vertu d’une directive du 26 juin 2013, ces dernières auront désormais l’obligation de publier des informations détaillées sur les sommes qu’elles versent aux autorités des pays dans lesquels elles sont actives selon une ventilation par pays et par projet. Les sommes excédant 100.000 euros par an, versées à une autorité publique locale, régionale ou nationale, devront être déclarées. Ces données seront gratuites, accessibles au public et lisibles. Et, en cas de manquement en matière de transparence, les entreprises seront sanctionnées.

Le projet de loi comprend aussi des dispositions relatives au droit de la consommation telles que la généralisation de la fiche d’information standardisée européenne pour les crédits immobiliers ou le développement de la médiation dans les litiges de consommation.

Enfin, le Gouvernement sera autorisé à transposer par voie d’ordonnances les nouvelles règles européennes encadrant les marchés d’instruments financiers (MIF II) ainsi que les directives OPCVM V et contrôle légal des comptes. J’ai fait adopter un amendement visant à réduire les délais d’habilitation de transposition de ces trois textes.

Cette présentation est loin d'être exhaustive. Pour en savoir plus, vous pouvez lire mon rapport en cliquant ici.

Le projet de loi, modifié par la commission des finances, sera examiné en séance publique le jeudi 16 octobre.