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Je vous souhaite la bienvenue sur ce site archive de mon mandat de sénateur des Français hors de France.

Mandat que j'ai eu l'honneur de faire vivre de 2004 à 2021.
Ce site est une image à la fin de mon mandat.
Vous y trouverez plus de 2 000 articles à propos des Français de l'étranger. C'est un véritable témoignage de leur situation vis-à-vis de l'éducation, de la citoyenneté, de la protection sociale, de la fiscalité, etc. pendant ces 17 années.

Je me suis retiré de la vie politique à la fin de mon mandant en septembre 2021, je partage désormais mes réactions, points de vue, réflexion sur https://www.richardyung.fr

Merci de votre visite.

Richard Yung
Octobre 2021

Dans la nuit du 12 au 13 décembre, le Sénat a adopté à une très grande majorité (309 voix contre 18) le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2014.

Plus communément appelé « collectif budgétaire », ce texte procède aux traditionnels ajustements fiscaux et budgétaires de fin d’année. L’objectif est de compenser les moindres recettes et les dépassements constatés sur certaines dépenses.

Plusieurs annulations de crédits sont ainsi proposées. Le programme « Français à l’étranger et affaires consulaires » est concerné à hauteur de 11 millions d’euros (pour un budget total de 370,2 millions d’euros en 2014). D’après le Gouvernement, ces annulations de crédits résultent notamment d’une « maîtrise des dépenses de fonctionnement (téléadministration, affaires sociales, élections principalement) ».

Parmi les nombreuses mesures fiscales prévues par le projet de loi figurent la non-déductibilité de la taxe de risque systémique et des futures contributions au Fonds de résolution unique (FRU), la suppression de la prime pour l’emploi (PPE) en vue de la création d’une « prime d’activité », la modification de la fiscalité applicable aux casinos, l’auto-liquidation de la TVA due à l’importation, l’augmentation du versement transport en Île-de-France dans la perspective de la mise en place du Pass Navigo unique, l’interdiction de tout achat de tabac à distance dans un pays étranger, la mise en place du timbre fiscal dématérialisé, la prolongation du moratoire sur l’encellulement individuel. Il est par ailleurs à noter que ce texte prévoit la remise au Parlement, avant le 1er juillet 2015, d’un rapport sur les avantages accordés par les conventions fiscales aux institutions financières publiques des pays étrangers.

Outre ces dispositions très diverses, le collectif budgétaire comporte un important volet consacré à la fiscalité des non-résidents.

  • Harmonisation des taux d'imposition des plus-values immobilières réalisées par les non-résidents

À mes yeux, l’une des dispositions les plus importantes concerne la mise en conformité avec le droit de l’Union européenne du régime d’imposition des plus-values immobilières réalisées en France par les personnes physiques résidant hors de l’Espace économique européen (UE, Islande, Liechtenstein et Norvège). Ces dernières sont actuellement imposées au taux de 33,33% – auquel s’ajoute un taux de 15,5% au titre des prélèvements sociaux – alors que les non-résidents établis dans les États membres de l’EEE se voient appliquer un taux de 19% – auquel s’ajoute également le taux de 15,5%.

Dans une décision en date du 20 octobre dernier, le Conseil d’État a considéré que cette différence de traitement constitue une restriction aux mouvements de capitaux. Contraire à l’article 63 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), elle est « de nature à dissuader les investisseurs résidents de certains pays tiers d’investir en France ». Cette décision s’inscrit dans le prolongement de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE).

Les personnes physiques, les associés personnes physiques de sociétés ou groupements dont les bénéfices sont imposés au nom des associés et les porteurs de parts de fonds de placement immobilier seront désormais imposés au titre de leurs plus-values immobilières au taux de 19%, quel que soit leur lieu de résidence, à l’exception de ceux domiciliés, établis ou constitués dans un État ou territoire non coopératif (ETNC), qui resteront imposés au taux de 75%. Cette disposition s’appliquera aux plus-values réalisées à compter du 1er janvier 2015.

  • Suppression de l’obligation, pour les contribuables fiscalement domiciliés dans un État de l’UE ou de l’EEE, de désigner un représentant fiscal en France

Le collectif budgétaire vise également à tirer les conséquences d’une autre décision de justice. Dans un arrêt en date du 5 mai 2011, la CJUE a déclaré contraire au droit européen une disposition de la législation portugaise imposant la désignation d’un représentant fiscal pour tout non-résident ressortissant d’un autre État membre de l’UE.

En France, les contribuables fiscalement domiciliés à l’étranger peuvent être amenés à recourir à un représentant fiscal lorsqu’ils doivent s’acquitter d’impôts au titre des activités qu’ils exercent en France ou des biens qu’ils y possèdent.
La représentation fiscale n’est pas obligatoire pour le paiement de l’impôt sur le revenu, de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et de l’impôt sur les sociétés. Toutefois, l’administration fiscale a la possibilité de demander aux non-résidents de désigner un représentant en France, qui joue alors un simple rôle d’intermédiaire entre le contribuable et le fisc.
La représentation fiscale est, en revanche, obligatoire en matière de plus-values immobilières et pour certaines plus-values mobilières. Dans ces deux cas, le représentant fiscal est responsable du paiement de l’imposition.

Considérant que ces dispositions constituent une restriction à la liberté de circulation garantie par le TFUE, la Commission européenne a mis en demeure la France de modifier son régime de la représentation fiscale.

Le collectif budgétaire prévoit qu’à compter du 1er janvier 2015, les dispositions sur la représentation fiscale ne s’appliqueront plus aux personnes domiciliées dans un État de l’UE ou dans un État de l’EEE. Néanmoins, les personnes résidant au Liechtenstein continueront à désigner un représentant fiscal en France car l’accord d’échange de renseignements signé avec cet État ne comporte pas de clause d’assistance au recouvrement et la convention multilatérale d’assistance mutuelle de l’OCDE n’a pas encore été ratifiée par la principauté.

Je me réjouis de cette mesure, qui va permettre de simplifier la vie de nombreux Français établis hors de France. L’obligation de désigner un représentant fiscal n’a plus lieu d’être dans la mesure où les mécanismes européens d’assistance entre les administrations fiscales nationales permettront d’assurer le recouvrement des impôts. Il est à espérer que l’instauration d’un système multilatéral d'échange automatique d’informations fiscales, actuellement en discussion, permettra, à terme, de supprimer l’obligation de désigner un représentant fiscal en France pour les non-résidents établis dans les États tiers à l’EEE.

  • Plafonnement du quotient familial pour les non-résidents

Afin de renforcer l’égalité de traitement entre les contribuables, le collectif budgétaire prévoit d’appliquer le plafonnement des effets du quotient familial aux contribuables non-résidents.

Prévue pour entrer en vigueur lors de l’imposition sur les revenus perçus en 2014, cette mesure concernera les non-résidents – environ 3.000 – qui se voient appliquer, pour le calcul de l’impôt sur leurs revenus de source française, le barème progressif et le mécanisme du quotient familial. Rappelons que le plafond du quotient familial s’élève actuellement à 1.500 euros par demi-part.

  • Possibilité pour les non-résidents d’obtenir un dégrèvement de la surtaxe d’habitation sur les résidences secondaires

Enfin, le projet de loi prévoit la possibilité pour les communes situées en zones tendues d’augmenter, dans la limite de 20%, la taxe d'habitation applicable aux résidences secondaires. Hélène Conway-Mouret, Claudine Lepage et moi-même avons obtenu que les Français établis hors de France puissent bénéficier d’une exonération au titre de leur habitation unique en France (voir mon article du 12 décembre).

La procédure de conciliation entre l’Assemblée nationale et le Sénat ayant échoué, le collectif budgétaire sera soumis, cette semaine, à une nouvelle lecture dans chaque assemblée.

Vous trouverez, ci-dessous, le compte rendu de mon intervention lors de la discussion générale du projet de loi.

 


 

M. Richard Yung. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, disposant d’un temps de parole inférieur à celui qui était imparti à Francis Delattre, je me contenterai, pour lui répondre, de faire miennes les observations formulées à l’instant par Jean Germain, et de me livrer à quelques remarques ponctuelles sur certains aspects du projet de loi de finances rectificative.

Je voudrais d’abord évoquer la question de la non-déductibilité de la taxe de risque systémique, ou TRS, et des futures contributions au Fonds de résolution unique, le FRU.

Lors de la discussion du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière, dit «DDADUE» – nous l’avons examiné en commission mixte paritaire ce matin –, André Gattolin avait présenté un amendement visant à rendre non déductibles de l’impôt sur les sociétés les contributions au FRU. J’avais alors quelque peu hésité : le texte en question n’était pas de nature fiscale. De plus, au mois d’octobre, nous ne savions pas que la TRS allait être progressivement supprimée d’ici à 2019, parallèlement à la montée en charge, elle aussi progressive, des contributions au FRU. Compte tenu du nouveau contexte, il paraît logique de prévoir la non-déductibilité de la TRS et des contributions au FRU. Je ne partage donc pas le point de vue du rapporteur général en la matière.

M. Francis Delattre. On appelle cela de la flexibilité !

M. Richard Yung. Il s’agit en effet d’un point important de l’accord avec l’Allemagne.

M. Francis Delattre. Ce n’est pas ce que disait le rapporteur du texte voilà quelques semaines !

M. Richard Yung. Quel rapporteur ? Sur quel texte ? Je ne vois pas de quoi vous parlez, mon cher collègue. Je n’étais pas partie à la négociation et, en tout cas, je n’ai certainement pas tenu les propos que vous prétendez avoir entendus.

Il est tout à fait clair que l’Allemagne a considéré que la déductibilité des contributions des banques françaises au FRU était un problème, ses propres banques ne l’appliquant pas. Cela a donc fait partie du deal avec elle.

Cette mesure, bien sûr, ne rencontre pas l’assentiment du secteur bancaire, mais elle est à mon sens cohérente avec les objectifs fixés pour l’union bancaire : prévenir les crises bancaires et éviter que l’argent des contribuables et des épargnants ne soit utilisé pour renflouer les banques en difficulté, ce qui ne manquerait pas d’arriver dans le cas contraire.

M. André Gattolin. Très bien !

M. Richard Yung. Ensuite, en ma qualité de représentant des Français établis hors de France, je profite de l’occasion qui m’est donnée pour saluer votre écoute, monsieur le secrétaire d’État, et vous remercier d’avoir non seulement mis en place, mais également fait fonctionner le groupe de travail sur la fiscalité des Français établis hors de France.

Plusieurs réunions ont déjà eu lieu ; elles nous ont permis d’aboutir sur deux points.

Je veux parler, premièrement, de l’harmonisation des taux d’imposition des plus-values immobilières réalisées par les non-résidents. Les résidents établis dans des États situés hors de l’Espace économique européen étaient imposés au taux de 33,33 %, sans compter les 15 % dus au titre de la CSG, quand les résidents en France ou dans un État membre de cet espace se voyaient appliquer un taux de 19 %, en plus de la CSG. La fiscalité des non-résidents sera désormais harmonisée, ce qui est un grand succès pour nous tous.

Je veux parler, deuxièmement, du plafonnement du quotient familial pour les non-résidents qui contribue à renforcer l’égalité de traitement entre les contribuables.

Mais nous avons encore quelques dossiers importants devant nous, monsieur le secrétaire d’État. L’assujettissement aux prélèvements sociaux – CSG et CRDS – des revenus du patrimoine et de placement de source française perçus par les non-résidents pose problème, par exemple ; il sera examiné prochainement par la Cour de justice de l’Union européenne, la CJUE. On aurait pu anticiper ; vous avez fait un autre choix. Je vous pose dès lors une seule question : savez-vous quand la CJUE rendra sa décision ?

Je souhaiterais signaler, par ailleurs, qu’il faut améliorer l’information des contribuables établis à l’étranger. Rares sont ceux qui savent qu’ils peuvent jouir d’un taux d’imposition inférieur au taux minimum de 20 % s’ils apportent la preuve que le taux de l’impôt français appliqué à l’ensemble de leurs revenus mondiaux serait inférieur à 20 %. Il existe bien d’autres règles encore, qui sont à leur avantage, mais qu’ils ne connaissent pas du tout.

J’en viens maintenant à l’autoliquidation de la TVA due à l’importation, dont je me félicite. Il s’agit d’une mesure de simplification importante, qui permettra de limiter de façon significative la fraude à la TVA. On sait très bien que l’entrée des biens sur notre territoire, hors TVA, peut entraîner l’apparition de carrousels, qui se perdent bien souvent dans des sables inconnus, et représentent ainsi des pertes de TVA pour notre pays. Cette disposition sera également un facteur important d’attractivité des ports français, lesquels subissent, vous le savez, mes chers collègues, la rude compétition des ports de l’Europe du Nord. Elle devrait donc renforcer notre compétitivité en la matière.

En ma qualité de président du Comité national anti-contrefaçon, j’accueille avec beaucoup de plaisir la disposition prévoyant l’interdiction de la vente de tabac à distance dans un pays étranger. Cette mesure permettra non seulement de freiner le développement du marché parallèle, qui représente tout de même 25 % de la consommation française, mais aussi de lutter plus efficacement contre le commerce des cigarettes de contrefaçon, lesquelles comportent des risques supplémentaires, par rapport aux cigarettes, déjà nocives, pour la santé publique.

Avant de conclure, monsieur le secrétaire d’État, je me permets de vous faire une suggestion sur un point non abordé dans le projet de loi de finances rectificative, à savoir la fiscalité des brevets. En effet, tous nos partenaires européens mettent en place des politiques d’attractivité en matière de brevets, passant par la création de « patent boxes », des « boîtes à brevets », en réalité des taux réduits de fiscalité sur les revenus de propriété industrielle. Ces pays – la Grande-Bretagne, les Pays-Bas, l’Irlande, notamment – pratiquent donc, disons-le, une concurrence déloyale ; nous devons par conséquent nous défendre nous-mêmes et entamer une réflexion sur ce sujet.

En conclusion, je dirai que, dans le contexte macroéconomique actuel, qui a évidemment contribué à la dégradation de nos finances publiques, nous avons opté pour le sérieux budgétaire. À la brutalité des coupes dans les dépenses publiques, la France préfère l’adaptation du rythme de l’assainissement budgétaire.

Les bonnes nouvelles sur le front du déficit, rendues publiques aujourd’hui, ainsi que la hausse de 0,3 % du PIB enregistrée au troisième trimestre montrent que cette politique a des résultats encourageants. Nous espérons qu’elle ira plus loin, car nous avons besoin d’une croissance beaucoup plus forte.

Pour toutes ces raisons, avec mes collègues du groupe socialiste, je voterai le présent projet de loi de finances rectificative. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)