Le 27 avril, je suis intervenu dans le débat sur le programme national de stabilité (PNS).
Ce document, destiné à être transmis à la Commission européenne, trace les grandes lignes de la stratégie des finances publiques pour les années 2016 à 2019. Cette dernière poursuit deux objectifs principaux, à savoir l’accompagnement de la reprise économique et la poursuite du redressement des comptes publics.
Le Gouvernement a décidé de maintenir la trajectoire de réduction du déficit nominal qu’il avait définie dans le précédent PNS (3,3% du PIB en 2016 ; 2,7% en 2017 ; 1,9% en 2018). Elle est certes légèrement plus ambitieuse que celle recommandée par le Conseil de l’UE (3,4% en 2016 ; 2,8% en 2017). Cependant, elle est confortée par la diminution plus rapide que prévu du déficit en 2015 (3,5% au lieu de 3,8%). Il est à noter que l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) est plus optimiste que le Gouvernement s’agissant de l’amélioration du déficit en 2016 (3,1%). Depuis 2012, le déficit public a reculé de 1,6 point de PIB (5,1% en 2011). À la fin de cette année, il devrait retrouver son niveau d’avant-crise (3,2% du PIB en 2008) avant de repasser sous la barre des 3% en 2017.
Pour la première fois depuis 2009, le taux de prélèvements obligatoires a diminué en 2015 (44,5% du PIB contre 44,8% en 2014). Cette tendance se poursuivra au cours des prochaines années (44,2% en 2016 ; 44% en 2017 ; 43,8% en 2018).
En 2016, les entreprises bénéficieront de plus de 9 milliards d’euros d’allégements supplémentaires (pacte de responsabilité ; suramortissement exceptionnel ; mesures de soutien aux TPE et PME), auxquels viendront s’ajouter 7 milliards d’euros en 2017 (suppression complète de la contribution sociale de solidarité des sociétés ; réduction du taux de l’impôt sur les sociétés de 33,33% à 28% ; montée en charge du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi ; exonération en année pleine de cotisations patronales d’allocations familiales pour les salaires compris entre 1,6 et 3,5 SMIC). Ainsi, le montant total des allégements de prélèvements au titre du pacte de responsabilité s’élèvera à 40 milliards d’euros en 2017, conformément aux engagements pris par le Président de la République.
De plus, cette année, 8 millions de foyers fiscaux bénéficieront d’une nouvelle baisse de l’impôt sur le revenu (2 milliards d’euros). Au total, 12 millions de foyers fiscaux auront bénéficié des baisses d’impôts depuis 2014 pour un montant global de 5 milliards d’euros par an.
Par ailleurs, grâce au renforcement des dispositifs de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales, les recettes publiques devraient augmenter. D’après le Gouvernement, les demandes de régularisation fiscale sont en hausse depuis l’éclatement de l’affaire dite des « Panama papers ».
La réduction du taux de prélèvements obligatoires a été réalisée parallèlement à la baisse du déficit. Cela prouve que le redressement des comptes publics repose désormais exclusivement sur la maîtrise des dépenses. En 2015, le ratio de dépenses publiques a diminué (56,8% du PIB). Cette tendance se prolongera d’ici à 2018 (56% en 2016 ; 55,3% en 2017 ; 54,4% en 2018). Cette année et l’an prochain, la mise en œuvre du programme d’économies de 50 milliards d’euros se poursuivra parallèlement au financement des priorités budgétaires (éducation, sécurité, justice). Afin de compenser les effets de la faible inflation (0,1% en 2016), le Gouvernement prévoit 2 milliards d’euros d’économies complémentaires en 2016 et 5 milliards d’euros en 2017. Quant aux dépenses nouvelles annoncées depuis janvier 2016 (mesures en faveur des agriculteurs et des jeunes, etc.), elles nécessiteront la réalisation de 4,2 milliards d’euros d’économies supplémentaires.
La trajectoire d’endettement public définie par le Gouvernement (96,2% du PIB en 2016 ; 96,5% en 2017 ; 95,4% en 2018) est certes plus optimiste que celle recommandée par le Conseil de l’UE (98,8% en 2016 ; 99,3% en 2017). Cependant, elle est confortée par le fait que le Gouvernement ne s’est pas trompé dans sa prévision pour 2015 (95,7%), contrairement au Conseil. Il importe de noter que le ratio d’endettement public n’a progressé que de 6,1 points de PIB depuis 2012, contre 10,6 points de PIB entre 2009 et 2012. La stabilisation du ratio d’endettement public en 2017 et sa décrue à compter de 2018 sont de nature à rassurer la Commission européenne, qui estime que l’importance de notre dette publique constitue un déséquilibre macroéconomique.
La stratégie des finances publiques repose sur un scénario macroéconomique crédible. Les prévisions de croissance du Gouvernement (1,5% du PIB en 2016 et 2017 ; 1,75% en 2018 ; 1,9% en 2019) sont réalistes au regard du taux de croissance de l’année 2015, qui s’est élevé à 1,2% au lieu de 1% prévu en loi de finances. La croissance est désormais à son niveau le plus élevé depuis 2012 !
Par ailleurs, les prévisions du Gouvernement sont confortées par l’avis du Haut conseil des finances publiques. Ce dernier considère, en effet, que la prévision de croissance pour 2016 est « encore atteignable ». Quant au scénario de croissance pour les années 2017 à 2019, il est jugé « plausible ».
Le regain de croissance s’explique non seulement par des facteurs exogènes (prix du pétrole bas, euro compétitif, taux d’intérêt historiquement faibles), mais aussi par la politique économique menée par le Gouvernement. Grâce aux réductions d’impôt sur le revenu, le pouvoir d’achat des ménages s’est accru (+1,8% en 2015, soit la plus forte hausse depuis 2007). Cela s’est traduit par une hausse de la consommation (+1,4 % en 2015, contre +0,6 % en 2014). Compte tenu de la forte remontée du taux d’épargne en 2015, l’OFCE prévoit un rebond marqué de la consommation en 2016. Quant aux investissements, ils ont enfin repris (+2% en 2015), stimulés notamment par les nombreuses initiatives prises par le Gouvernement (stabilisation du crédit d’impôt recherche ; réforme des pôles de compétitivité ; prorogation du dispositif de suramortissement de l’investissement productif ; dynamisation de l’épargne salariale ; programmes d’investissements d’avenir ; etc.). La montée en puissance du CICE et la réduction des cotisations sociales patronales, dans le cadre du pacte de responsabilité, ont également favorisé la reprise des investissements. En effet, les entreprises ont commencé à reconstituer leurs marges. En 2015, le taux de marge des sociétés non financières a atteint 31,4 %, soit son plus haut niveau depuis 2011 ! Peu à peu, nos entreprises gagnent en compétitivité et les créations d’emplois reprennent. L’an dernier, pas moins de 102.000 emplois nets ont été créés dans le secteur privé, dont 82.000 dans le seul secteur marchand. Cette reprise progressive s’est traduite par une stabilisation du taux de chômage en 2015. Enfin, il importe de noter que les parts de marché de la France dans les exportations mondiales se sont stabilisées depuis 2012 et ont augmenté en volume en 2015 (les exportations ont cru de 6,1% en 2015).
L’objectif consiste désormais à soutenir la reprise de l’investissement et de l’emploi via la poursuite de la réduction de la fiscalité et du coût du travail pour les entreprises.
Vous pouvez prendre connaissance du programme de stabilité en cliquant ici.
Vous trouverez, ci-dessous, le compte rendu de mon intervention.
M. le président. La parole est à M. Richard Yung, pour le groupe socialiste et républicain.
M. Richard Yung. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce débat porte sur le dialogue entre la Commission européenne et la France – et chaque État membre de l’Union, bien sûr – dans le cadre de ce qu’on appelle le semestre budgétaire. C’est véritablement le début de la coordination et, espérons-nous, de l’harmonisation de nos politiques budgétaires et fiscales. C’est au fond l’embryon de ce qu’on voudrait faire plus tard pour la zone euro.
Ce débat est donc important, même s’il est parfois rude. La Commission européenne n’étant pas tendre, Michèle André l’a rappelé, elle a attiré l’attention de la France sur le fait qu’elle était en situation de déficit excessif, pour reprendre sa phraséologie. Le projet de programme de stabilité pour les années 2016 à 2019 dont nous débattons est la réponse du Gouvernement à la fois pour les années 2015 et 2016. Il présente en outre les perspectives pour l’an prochain.
Je vous ai bien écouté, monsieur le rapporteur général, mais je n’ai pas eu l’impression que vous parliez de la France. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) J’ai pensé que vous parliez du pays des Hurons de Voltaire. Vous n’avez parlé que de déficit. Mais, pas de chance, la réduction du déficit s’améliore justement ! L’exemple n’est donc pas très bon ! (Vives exclamations sur les mêmes travées.)
Est-ce à dire que vous vous réjouissez des malheurs de la France ? Non, ce n’est pas cela !
M. François Patriat. Si, si, ils s’en réjouissent !
M. Richard Yung. La réduction du déficit s’est améliorée : cela ne vous écorcherait pas la bouche de le dire !
Au fond, la politique économique et la politique générale se résument-elles à cela ? Le fait que la croissance s’améliore, même si elle est encore un peu faible, de même que les exportations et la compétitivité des entreprises, est-ce une mauvaise chose ? Cela vous ennuie, mais c’est la vérité !
Je ne parle pas de l’emploi, car il faut être modeste en la matière…
M. Philippe Dallier. Soyez prudent !
M. Richard Yung. … et que l’on ne sait pas. (Rires sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.)
J’ai également remarqué que vous n’aviez pas dit un mot de l’avis du Haut Conseil des finances publiques.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Si !
M. Richard Yung. Alors, cela m’a échappé ! Je souligne que le Haut Conseil, dont le rôle est de donner un avis neutre et objectif, a qualifié les prévisions du Gouvernement de « réalistes », « plausibles », « atteignables ».
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Atteignables… (Mêmes mouvements.)
M. Richard Yung. Il ne fait certes pas preuve d’un enthousiasme délirant, mais son avis est positif. Il fallait donc le dire.
En 2016, les entreprises bénéficieront de 9 milliards d’euros d’allégements fiscaux, auxquels viendront s’ajouter 7 milliards d’euros en 2017, avec la suppression complète de la C3S, la réduction du taux de l’impôt sur les sociétés de 33 % à 28 % – mesure importante qui était réclamée par tous –, la montée en charge du CICE et des exonérations de cotisations patronales d’allocations familiales.
Il en va de même concernant les dépenses. Mme la présidente de la commission des finances étant intervenue sur ce sujet, je n’y reviens pas.
Ce qui est important, c’est que le taux de croissance pour 2016 soit réévalué à 1,5 %. Certes, un tel taux n’est pas extraordinaire, mais il est meilleur que par le passé. Nous sommes sur la bonne voie.
Je reconnais que des nuages subsistent. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Alain Gournac. Dites plutôt un mur !
M. Richard Yung. Ainsi le fait que la Banque centrale européenne ne parvienne pas à atteindre l’objectif affiché de faire remonter l’inflation à 2 % est-il un problème majeur. La Réserve fédérale des États-Unis, la FED, atteint, elle, cet objectif. Pour notre part, nous sommes à 0,01 %. La Banque centrale menant une politique monétaire extrêmement active – c’est le moins qu’on puisse dire, avec ses rachats mensuels de près de 70 milliards d’euros –, on s’inquiète de savoir où vont ces liquidités.
Je ne m’attarderai pas sur ce sujet, mais je pense que nous avons là un problème majeur dont il nous faudra parler, car, s’il n’est pas uniquement français, il n’en aura pas moins des effets durables sur notre pays.
Enfin, je dirai un mot sur l’investissement et sur les réformes structurelles.
Pour améliorer sa compétitivité, la France doit soutenir l’investissement. C’est l’une des demandes de la Commission européenne. À cet égard, de nombreuses mesures ont été prises pour encourager l’investissement des entreprises : la loi Macron, la stabilité du crédit d’impôt recherche – il atteint près de 6 milliards d’euros par an –, le programme d’investissements d’avenir, dont nous avons discuté ce matin en commission, le suramortissement de l’investissement productif, etc.
M. Francis Delattre. Etc…
M. Richard Yung. Ces dispositifs assez forts portent leurs fruits puisque les entreprises ont reconstitué leurs marges, à hauteur de 34 milliards d’euros à ce stade, ce qui est tout de même assez significatif. Quant aux investissements, ne vous en déplaise, chers collègues de la majorité sénatoriale, ils ont repris et augmenté de plus de 3 % en glissement annuel. Nous allons donc dans le bon sens.
Enfin, je conclurai en évoquant l’amélioration de la compétitivité des entreprises françaises et la diminution du coût salarial horaire de la main-d’œuvre. Alors que la hausse des salaires bruts en Allemagne a été de 2,6 % entre 2009 et 2015, contre 1,2 % au cours de la décennie précédente, elle a été de 1,5 % en France au cours de la même période, contre 2,8 % au cours de la décennie précédente.
M. le président. Il faut conclure !
M. Richard Yung. Nous venons donc d’inverser la tendance. Nous tenons là, nous l’espérons, les éléments d’une reprise forte, dont nous espérons qu’ils porteront leurs fruits en matière d’emploi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. - M. Alain Bertrand applaudit également.)