Le 25 octobre, j’ai participé, dans le cadre de la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises, à l’audition du président du groupe Michelin, Jean-Dominique Sénard, sur l’objet social de l’entreprise.
Le 9 mars dernier, M. Sénard et Nicole Notat, ancienne secrétaire générale de la CFDT et présidente de Vigeo-Eiris, ont remis au Gouvernement un rapport intitulé « L’entreprise, objet d’intérêt collectif ».
Convaincus que « l’entreprise a une raison d’être et contribue à un intérêt collectif », ils ont proposé de « consacrer dans notre droit la dynamique de la responsabilité sociale des entreprises ».
Leurs propositions ont alimenté le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises (consécration de la notion d’intérêt social ; possibilité, pour les entrepreneurs qui le souhaitent, de consacrer la raison d’être de leur entreprise dans leurs statuts ; extension aux organismes mutualistes de la participation de représentants des salariés au conseil d’administration ; etc.).
Vous trouverez, ci-dessous, la vidéo de l’audition ainsi que le compte rendu de mon intervention.
M. Richard Yung. - Je suis très heureux que le Sénat débatte de ces questions, qui sont des questions éthiques et de civilisation. Nous avons très souvent des débats sur la croissance, mais très rarement sur le sens de notre société. Vos propos sur la raison d’être de l’entreprise et sur la responsabilité sont des points importants.
Comment le traduisez-vous dans l’entreprise Michelin, où vous le faites depuis de nombreuses années ? Vous indiquez un effectif de 110.000 employés. J’ai du mal à concevoir comment cela peut être organisé. Comment menez-vous de front la responsabilité sociale - les salaires, les conventions collectives, le temps de travail - l’épanouissement dans le travail, la formation, ainsi que l’innovation ? Est-ce applicable dans une grande entreprise seulement ? Cela n’est-il pas plus difficile à mettre en œuvre par des petites et moyennes entreprises de dix ou quinze employés ?
Enfin, la France a de très nombreuses formes juridiques d’entreprises. Au fond, on se dit que cette diversité devrait permettre à chacun de trouver son bonheur. Ainsi, pourquoi une SCOP ne serait-elle pas une formule adaptée ? Vous estimez qu’il y avait encore un manque, d’où la création des entreprises à mission. Je me suis demandé au fond si on ne retrouvait pas dans ce cas les fondations d’entreprises présentes dans les pays nordiques : ce sont des entreprises commerciales, mais qui gèrent des chaînes de télévision, des chaînes culturelles et mettent l’actionnariat à l’abri.