Le 5 mars, le Sénat a adopté, en première lecture, le projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique.
Ce projet de loi marque une nouvelle étape de la transformation de l’action publique. Soucieux de répondre à plusieurs attentes exprimées lors du grand débat national, le Gouvernement a pris un triple engagement : « encourager une administration plus simple » (suppression ou regroupement de commissions administratives consultatives) [1], « développer une administration plus proche des citoyens » (près de 99% des décisions administratives seront désormais prises au niveau déconcentré) [2] et « rendre certaines démarches administratives plus efficaces et plus rapide ».
La simplification des démarches administratives bénéficiera tout d’abord aux particuliers :
- Dispense de production des justificatifs de domicile pour la délivrance de documents officiels (généralisation de l’expérimentation de l’application informatique Justif’Adresse, qui permet un recoupement automatique des données déclarées par les usagers auprès de fournisseurs de biens ou services ou d’autres services publics) ;
- Simplification des certificats médicaux de non contre-indication au sport exigés des mineurs (exemption de l’obligation de produire un certificat lorsque le résultat d’une autoévaluation de l’état de santé, conduite avec les parents, rend dispensable une visite médicale) [3] ;
- Simplification des modalités de délivrance des documents provisoires aux étrangers sollicitant un titre de séjour (disposition ouvrant la voie à la mise en place d’un service de dépôt en ligne des demandes de titres de séjour d’ici à 2022) [4] ;
- Généralisation, à compter du 1er février 2021, de la procédure d’inscription en ligne au permis de conduire (une expérimentation de la plateforme permisdeconduire.gouv.fr a été lancée le 2 mars dernier dans cinq départements de la région Occitanie) ;
- Simplification des modalités de contrôle de l’éligibilité d’un épargnant au livret d’épargne populaire (les établissements bancaires transmettront à l’administration fiscale l’identité des clients pour lesquels ils souhaitent obtenir l’information sur leur éligibilité fiscale au LEP ; ces échanges d’informations se feront à l’ouverture du LEP puis chaque année).
Cette liste est loin d’être exhaustive.
Parmi les dispositions nouvelles introduites par le Sénat figure la clarification des modalités d’application du droit de résiliation annuelle de l’assurance emprunteur. Les assurés pourront exercer leur droit de résiliation à la date de leur choix (date anniversaire de l’offre de prêt ou autre date prévue par le contrat). Ils bénéficieront d’une information en ce sens (dans le cadre de la notice accompagnant le contrat d’assurance). Quant aux professionnels, ils devront justifier, de manière explicite et motivée, les décisions de refus de changement d’assurance emprunteur. En cas de manquement à leurs obligations, ils seront passibles d’une amende administrative dont le montant maximal sera de 3.000 euros pour une personne physique et 15.000 euros pour une personne morale.
Plusieurs mesures de simplification sont par ailleurs destinées aux entreprises :
- Simplification des procédures applicables aux installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) ;
- Assouplissement du régime applicable à la vente en ligne de médicaments non soumis à prescription obligatoire (passage d’un régime d’autorisation à un régime de déclaration des sites internet ; possibilité d’exercer la vente en ligne depuis un local distinct rattaché à l’officine ; possibilité de créer des plateformes en ligne de mise en relation communes à plusieurs officines) [5] ;
- Simplification de la mise en place d’accords d’intéressement dans les très petites entreprises (possibilité, pour les employeurs de moins de onze salariés, de mettre en place des dispositifs d’intéressement par décision unilatérale) [6].
Lors de la discussion du projet de loi en séance publique, j’ai proposé, en vain, de simplifier les démarches administratives que doivent accomplir les Français désirant se marier à l’étranger devant l’autorité locale compétente. Ces personnes, contrairement aux Français désirant se marier en France, ont l’obligation d’obtenir un certificat de capacité à mariage (CCAM) auprès de l’autorité diplomatique ou consulaire compétente. Préalablement à la délivrance du certificat, les postes diplomatiques et consulaires doivent auditionner les futurs époux, ce qui représente une lourde charge de travail pour les personnels. Résultat : les délais de délivrance des certificats sont particulièrement longs. Le consulat général de France à Dakar conseille ainsi de « ne pas envisager un mariage moins de 5 ou 6 mois après le dépôt de la demande ». Au consulat général de France à Athènes, « le délai d’attente est de 12 semaines environ ». Quant au consulat général de France à Los Angeles, il recommande de constituer le dossier de demande « 2 à 3 mois avant la date prévue pour la célébration » du mariage.
Au regard de ce constat, j’ai proposé de supprimer l’obligation d’obtention du CCAM tout en maintenant le contrôle a posteriori qui est effectué au moment de la transcription de l’acte de mariage sur les registres de l’état civil français. Ce contrôle est, en effet, nécessaire pour rendre inopposables aux tiers les actes faux ou frauduleux (mariages forcés, polygamie, etc.).
Selon le Gouvernement, les dispositifs en vigueur « ont un sens et une utilité, puisque le parquet de Nantes a prononcé, en 2018, 365 oppositions à mariage ainsi que 93 oppositions à la transcription d’un mariage célébré à l’étranger ». Selon moi, le fait que le tribunal de Nantes, qui est compétent en la matière, ait prononcé 365 annulations de mariages célébrés à l'étranger montre précisément que cette procédure n'est pas efficace, puisque ces mariages n'ont pu être empêchés.
Il est à noter que le groupe socialiste et républicain a voté contre mon amendement, alors même qu’il avait bataillé contre la loi ayant créé l’obligation d’obtention du CCAM (loi du 14 novembre 2006 relative au contrôle de la validité des mariages).
Au regard de la « volonté de dialogue approfondi » exprimée par la majorité sénatoriale, le groupe La République En Marche a voté pour le projet de loi, qui sera prochainement examiné par l’Assemblée nationale.
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[1] La majorité sénatoriale a maintenu plusieurs commissions, dont la commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires.
[2] Le projet de loi prévoit notamment le transfert au directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) des décisions relatives à l’interdiction de la divulgation et de la libre exploitation des brevets ainsi qu’à leur prorogation et levée.
[3] Considérant qu’il est « risqué de priver les mineurs de l’occasion d’être examiné par un médecin avant d’entamer la pratique d’un sport ou de s’inscrire dans une compétition sportive », la majorité sénatoriale propose que la visite médicale réalisée pour l’obtention d’un certificat de non contre-indication à la pratique sportive déclenche la consultation de prévention obligatoire prévue par le code de la santé publique.
[4] Afin de garantir aux titulaires des documents provisoires le droit à l’exercice d’une activité professionnelle pendant la durée d’instruction de leur demande, j’ai proposé que ce droit soit la norme, et non plus l’exception. Mon amendement a été rejeté après que la secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances, Agnès Pannier-Runacher, a indiqué que la « question de l’accès à la capacité d’exercer une profession est d’ores et déjà prise en compte de manière réglementaire ».
[5] La majorité sénatoriale a supprimé, d’une part, la possibilité de recourir à une plateforme en ligne et, d’autre part, la possibilité de réaliser le commerce électronique depuis un local rattaché.
[6] Cette disposition s’inscrit dans le prolongement des mesures prévues par la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises. Un accord collectif est aujourd’hui nécessaire à la mise en œuvre d’un dispositif d’intéressement.