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Je vous souhaite la bienvenue sur ce site archive de mon mandat de sénateur des Français hors de France.

Mandat que j'ai eu l'honneur de faire vivre de 2004 à 2021.
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Richard Yung
Octobre 2021

Ratés . «Libération» s’est procuré l’enquête parlementaire très attendue sur l’Audiovisuel extérieur de la France.
Libération, 02/03/2012 Par RAPHAËL GARRIGOS, ISABELLE ROBERTS

Voilà qu’un gros caillou vient se loger dans le conduit de la vuvuzela d’Alain de Pouzilhac. Oui, le PDG de l’Audiovisuel extérieur de la France (AEF), qui regroupe RFI, France 24 et une partie de TV5, possède une vuvuzela. Dont il a récemment joué devant ses troupes pour saluer l’aboutissement de la fusion entre RFI et France 24. Enfin, aboutissement, faut voir… Car le gros caillou obstruant l’instrument de Pouzilhac, c’est un rapport parlementaire confidentiel que s’est procuré Libération. Et le caillou suivant pourrait être plus maousse en cas de victoire de la gauche à la présidentielle, car François Hollande s’est clairement affiché contre la fusion.

Remise à plat

Qu’il était attendu, ce rapport… Issu d’une mission parlementaire lancée en février 2011 par la députée UMP Michèle Tabarot pour «faire un point d’étape sur la réforme de l’AEF» et en ausculter «les dysfonctionnements». Il était vu comme la remise à plat indispensable du développement foutraque de l’Audiovisuel extérieur de la France. L’incroyable guerre des chefs entre Alain de Pouzilhac et sa numéro 2 Christine Ockrent ? Elle serait réglée sitôt le rapport publié, assurait alors l’Elysée. La fusion qui inquiétait tant RFI ? Le rapport donnerait le «la». Et d’ailleurs Michèle Tabarot demande alors à Pouzilhac qu’aucune décision «irréversible» ne soit prise tant que le rapport n’est pas rendu. Comprendre : calmos sur la fusion.

Depuis, Christine Ockrent a fini par quitter l’AEF (fâchée, un procès est en cours) ; la fusion, quoiqu’encore à l’état de merdier velu, est quasiment actée et le rapport, espéré pour juillet dernier, n’est toujours pas publié. Ce sera fait mardi, du moins si les commissions des Affaires étrangères et des Affaires culturelles de l’Assemblée en décident ainsi.

Il faut dire qu’il est croquignolet, ce rapport où ses deux auteurs, les députés Christian Kert (UMP) et Didier Mathus (PS), écrivent noir sur blanc leurs désaccords. Le texte, alimenté par les auditions de 28 personnalités (politiques, audiovisuel, hauts fonctionnaires), a d’ailleurs fait l’objet de nombreux allers-retours entre les deux élus pour, dans le cas de Kert, assouplir telle formule trop dure de Mathus et, dans le cas de Mathus, durcir telle formule trop molle de Kert…

«Affligeante gouvernance»

Là, Kert et Mathus sont d’accord, évoquant d’abord pudiquement les «défaillances du pilotage» puis carrément une «dyarchie assassine». A savoir, la guerre à mort que se sont livré Pouzilhac et Ockrent de l’été 2010 à mai 2011 quand la reine Christine s’autodéchoit : le premier accuse la seconde d’avoir plombé les comptes de France 24 puis d’avoir mis sur pied un système d’espionnage interne, le tout sur fond d’évictions des favoris de l’une par l’autre et vice-versa. Une guerre piteuse dénoncée par les personnalités entendues dans le cadre du rapport : Roch-Olivier Maistre, administrateur de l’AEF, déplore une situation qui «engageait l’image de la France et mettait en jeu la situation des salariés» ; Pierre Sellal, secrétaire général du Quai d’Orsay juge qu’elle a «terni l’image de la France». Enfin, Louis de Broissia, ambassadeur pour l’audiovisuel extérieur, parle de l’«affligeante affaire de la gouvernance». Et les deux rapporteurs de «regretter la réaction trop tardive de l’actionnaire pour mettre fin à cette crise qui a affecté l’image de l’AEF et la perception de la réforme qui y est conduite». C’est que, près de dix mois durant, tout le monde, du conseil d’administration de l’AEF à l’Elysée en passant par les divers ministres de tutelle, s’est renvoyé la patate chaude : du jamais vu dans une entreprise, rappelons-le, publique.

«Manque de fiabilité»

Une des conséquences de cette guerre intestine, le grand n’importe quoi financier. «C’est une première de voir une entreprise publique incapable de respecter l’arbitrage de l’Etat», fustige dans le rapport Françoise Miquel, chargée de contrôler les comptes des sociétés de l’audiovisuel public. En cause, les rallonges demandées par Alain de Pouzilhac (au total, «100 millions d’euros de versement exceptionnel»), un «manque de fiabilité et de finesse» dans les informations financières transmises à l’Etat, ainsi que «des irrégularités de gestion». Un constat qui, lors d’une précédente demande de rab formulée par Pouzilhac à Matignon, lui a valu une descente de l’Inspection générale des finances (IGF) et un rapport pas exactement aux petits oignons (Libération du 9 novembre 2011). Le rapport de Kert et Mathus pointe également «l’incapacité à formaliser un contrat d’objectifs et de moyens» (COM) pour l’AEF, alors que toutes les entreprises publiques en sont dotées, qui fixent des buts à atteindre en échange de ressources.

«Fusion autoritaire»

«Un couteau suisse, un objet qui sert à beaucoup de choses mais dont on ne sait pas quelles sont sa fonction première et sa finalité.» La phrase, un rien cruelle, est signée Rachid Arhab, du CSA. C’est un des éléments centraux du rapport parlementaire : la fusion de la radio RFI et de la chaîne France 24. Si Christian Kert et Didier Mathus s’accordent sur «un rapprochement globalement pertinent», ils divergent totalement sur la fusion. Kert, partisan d’une «fusion à feu doux», estime que «l’intégration entre les rédactions internet, radio et télévision et le modèle de la "news factory" […], c’est l’avenir».

Mathus, lui, y est opposé : «Il n’existe pas de véritables exemples de fusions de rédactions de télévision et de radio parce que les deux métiers restent fondamentalement différents.» Il souligne que «RFI [est] une radio généraliste populaire, France 24 une chaîne de télévision à destination des "leaders d’opinion"». Surtout, le député PS redoute que la fusion aboutisse à un démantèlement de RFI et regrette que Pouzilhac «ait autoritairement accéléré le processus de fusion». Enfin, il pointe une différence entre les deux rédactions : «Si on entrevoit clairement ce que RFI peut apporter à France 24, notamment en matière d’expertise, de compétences et de qualité de ses programmes, on perçoit plus difficilement ce que RFI peut retirer de France 24.»

Les propositions

Au fil de l’élaboration de leur rapport, Kert et Mathus ont exploré différentes pistes : l’adossement de l’AEF à France Télévisions, à Radio France… Dans la version définitive, ils s’en tiennent à préconiser de «renforcer les liens entre l’AEF et les groupes France Télévisions et Radio France». Mais ils suggèrent que TV5, qui n’a pas grand-chose à voir avec la choucroute AEF, s’en détache, via France Télévisions qui doit y retrouver «son rôle d’actionnaire principal à 49%». Histoire de régler le problème des multiples guichets gouvernementaux, «la tutelle de l’AEF doit être sans plus tarder transférée au ministère des Affaires étrangères», avancent Kert et Mathus. Une ultime version du rapport qui peut sembler un rien édulcorée par rapport à l’ampleur du problème. Mais pour Didier Mathus, interrogé par Libération, c’est toute la politique de Nicolas Sarkozy en matière d’audiovisuel extérieur qui est là mise en accusation : «Le constat est le même pour tout le monde : c’est un échec. Simplement, l’UMP le dit avec les formes.»