Les Échos, 26/03 à 06:00, mis à jour à 09:45
L’arrêt obligeant Paris à restituer la CSG perçue sur les non-résidents va coûter « beaucoup », selon Bercy. Une réflexion va s’engager sur la « nature » de la CSG.
« De combien d’argent s’agit-il ? De beaucoup ! », a résumé mardi le secrétaire d’Etat au Budget, Christian Eckert, devant les membres de la commission des Affaires sociales du Sénat. Le ministre était interrogé sur les conséquences de la décision de la Cour de justice européenne, qui a condamné il y a un mois la France à restituer la CSG et la CRDS qu’elle prélève sur certains revenus de non-résidents.Dans cette décision, qui doit être reprise par le Conseil d’Etat, la Cour a en effet réaffirmé un principe : les non-résidents qui sont affiliés à un régime de Sécurité sociale dans un autre Etat de l’Union européenne ne doivent pas verser de contributions sociales en France puisqu’ils ne bénéficient pas de la protection sociale. La question se posait en particulier pour les Français non-résidents, propriétaires de biens immobiliers dans l’Hexagone, qui versent 15,5 % de CSG et de CRDS sur leurs revenus fonciers. Des prélèvements que la décision de la Cour de justice va, de fait, annuler.
Le hic : la décision va plus loin, et concerne tous les revenus du patrimoine des non-résidents, pas seulement les revenus fonciers. Outre qu’elle va priver l’Etat de recettes importantes, elle va obliger le fisc à rembourser les contribuables ayant versé indûment ces contributions sociales.
Les services de Bercy et du ministère des Affaires sociales travaillent actuellement à chiffrer plus finement le coût de l’arrêt. « Certains parlent de 1 milliard, 2 milliards… Oui, c’est plusieurs centaines de millions, notamment parce qu’il faudra rembourser », a indiqué mardi Christian Eckert, qui s’attend à une facture élevée… « Sauf si nous nous interrogions et que nous travaillions sur la question de la nature de la CSG et peut-être prendre des dispositions législatives […]. Mais, à ce moment-là, ce n’est pas sur cette seule masse qu’il faudrait travailler mais sur l’ensemble de la CSG. Ce qui pose la question du financement du régime de protection sociale. On n’en est pas là, mais il serait malsain de nier ce débat qui, nécessairement, sera devant nous. »
Un sujet complexe
En clair, la décision de la Cour de justice pourrait bien être l’occasion pour Bercy de reposer, voire de trancher, la question très ancienne de la nature hybride de la CSG, impôt affecté au financement de la protection sociale. Mais le sujet est complexe : clarifier la « nature » de la CSG implique de se pencher sur son affectation à la sphère sociale, ce qui, compte tenu des masses en jeu, promet d’être difficile. Le poids de la CSG est en effet allé croissant depuis sa création, en 1991, et dépasse aujourd’hui 90 milliards d’euros par an. « En différenciant la CSG dès lors qu’un lien est fait avec l’affiliation à la Sécurité sociale, l’arrêt de la Cour de justice vient reposer le débat de la qualification de la CSG comme imposition de toute nature », explique-t-on à Bercy, où l’on refuse de s’avancer tant que le Conseil d’Etat ne s’est pas prononcé.