La Cour de justice de l’Union européenne vient de condamner la France à reverser à ses citoyens expatriés la CSG-CRDS qu’ils ont payée sur les loyers et les plus-values de leurs propriétés situées dans l’Hexagone. Lesdits prélèvements sociaux -au taux de - 15,5 % - financent en effet la Sécurité sociale. C’est là que le bât blesse : pourquoi ceux qui paient leur assurance-maladie dans le pays où ils habitent devraient-ils alimenter la Sécu française, alors qu’ils ne bénéficient pas dé ses prestations ?
« Interdit par les règlements européens », a tranché la Cour, le 26 février. Le fisc risque fort de devoir rembourser à quelque 350 000 travailleurs frontaliers et à 60 000 propriétaires immobiliers non résidents ce qu’ils ont indûment versé depuis 2012. Soit environ 1 milliard. Et il faudra, en plus, trouver un impôt nouveau pour remplacer chaque année les 350 millions qui ne rentreront plus. Ainsi, après la tuile européenne exigeant de la France 4 milliards d’économies supplémentaires et le trou de 2 milliards dans le budget militaire (« Le Canard », 25/2), la série noire continue, Et ce n’est pas fini,
Le gouvernement de Jean-Marc Ayrault avait instauré, à l’été 2012, une taxe de 3 % sur les dividendes versés par les sociétés à leurs actionnaires, L’objectif était de remplacer une taxe d’un montant équivalent, instaurée, celle-là, sous Sarkozy, qui frappait les actionnaires européens non français. Cet impôt avait été, en juin 2012, déclaré illégal par la Cour européenne. La France avait dû rembourser 5 milliards, sous les lazzis d’une gauche dénonçant l’amateurisme de la droite,
Patatras ! la Commission de Bruxelles va encore poursuivre la France pour la nouvelle taxe. Motif : Bruxelles interdit que les dividendes versés par une société mère à une filiale soient imposés à plus de 5 %. Or ce maximum est d’ores et déjà atteint en France. Avec les 3 % de mieux, on est, depuis trois ans, hors des clous. Les montants déjà perçus sont énormes : plus de 5 milliards depuis 2012. Exactement la somme pour laquelle la France avait été condamnée en 2012. Avec, bien sûr, la nécessité de trouver à l’avenir une recette de substitution de 1,8 milliard par an pour équilibrer le budget.
Les lenteurs de la procédure font que l’arrêt de Bruxelles entrera en vigueur en 2017. Voilà qui tombe bien pour le gouvernement, qui joue la montre pour limiter la casse, Les victimes qui n’auront pas déposé leur demande de remboursement avant le 31 décembre 2015 se verront opposer la prescription.
On comprend que Bercy se montre d’une discrétion de violette...
Hervé Martin, Le Canard Enchaîné (25/03/15)