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Richard Yung
Octobre 2021

LE MONDE | 28.08.2015 à 06h44 • Mis à jour le 28.08.2015 à 11h10 | Par Christophe Ayad

En 2017, la Chine deviendra le pays comptant le plus grand nombre de diplomates et de fonctionnaires du Quai d’Orsay. En 2025, vingt-cinq ambassades françaises à l’étranger partageront leurs locaux avec un ou des partenaires européens. Toujours en 2025, un quart des diplomates français seront en poste dans les pays du G20, contre 16 % aujourd’hui. A partir de 2017, l’ensemble des demandes de visas pourra être effectué en ligne et dans cinq ans, ils seront délivrés également en ligne sous la forme d’e-vignettes. Un dernier chiffre : le ministère des affaires étrangères ambitionne un bilan carbone neutre à l’horizon 2020.

Ces quelques chiffres montrent la mutation engagée par le ministère des affaires étrangères et du développement international (Maedi), sous la houlette de Laurent Fabius, qui en a détaillé les grandes lignes devant les diplomates, jeudi 27 août à Paris, à l’occasion de la semaine des ambassadeurs. Fruit d’une vaste consultation auprès des agents et des partenaires du ministère, le plan « Maedi 21 » – « un programme d’action, pas un énième livre », souligne l’entourage du ministre – vise à « adapter notre diplomatie globale aux enjeux de ce siècle », selon les mots du ministre des affaires étrangères, et à un monde en pleine mutation.

La réforme du Quai d’Orsay, synonyme généralement d’économies d’échelle et de fermetures de postes, n’est pas une nouveauté : tous les ministres, ou presque, s’y sont essayés depuis un peu plus d’une décennie. Mais les changements engagés par Laurent Fabius depuis son arrivée au ministère, en 2012, vont, cette fois-ci, plus loin. Meilleur symbole de sa volonté de tourner la page : la disparition, en 2014, du sacro-saint télégramme diplomatique (notes envoyées par les ambassades au Quai d’Orsay, des « TD » dans le jargon des diplomates) au profit d’un portail interne, type Facebook, avec des niveaux différenciés d’accès à l’information, selon son degré de confidentialité.

Un réseau surdimensionné

Mais la réforme engagée va nettement au-delà d’une simple numérisation. En obtenant la tutelle sur le commerce extérieur et sur le tourisme, M. Fabius veut faire de son administration l’acteur principal de la balance commerciale française, quitte à transformer les ambassadeurs en experts conseil aux entreprises ou en agents de voyages.

Ainsi, les diplomates venus assister à la traditionnelle conférence des ambassadeurs se sont retrouvés, mardi 25 août, embarqués pour un « speed dating » inédit avec des chefs de PME françaises désireux de s’implanter à l’étranger. Il faut dire qu’avec le troisième réseau diplomatique au monde, la France dispose d’un outil largement surdimensionné au vu de son poids réel (0,7 % de la population mondiale, la sixième économie du monde), même si elle continue d’être présente dans les plus importantes crises du moment, sans forcément peser autant qu’elle le souhaiterait.

Pour justifier le maintien d’un tel réseau, il faut adapter, selon l’entourage du ministre, le Quai d’Orsay aux exigences d’une « diplomatie globale », vaste concept qui englobe la diplomatie bien sûr, mais aussi l’universalisme propre à la France, son outil militaire, la politique de développement, la promotion de la culture, de l’éducation et de la recherche, et enfin le développement de son économie et du tourisme. « Très peu de pays disposent de toute la palette, souligne un conseiller. Et aucun pays ne va dominer dans tous les domaines. Il va donc y avoir des opportunités et des places à prendre. » La France veut donc continuer à jouer un rôle d’acteur de référence, ou de « puissance repère », comme le résume Laurent Fabius.

Vers des consulats européens

Ancien ministre du budget, ancien ministre de l’économie et des finances et bourreau de travail, Laurent Fabius, en bon grand commis de l’Etat à la française, a remis de l’ordre dans le dispositif de soutien aux entreprises françaises à l’étranger, réuni dans Business France et regroupé toutes les fonctions d’expertise et de conseil dans un seul organisme, Expertise France. Il entend désormais arrimer l’Agence française de développement (AFD) à la Caisse des dépôts et consignations (CDC) afin de démultiplier sa puissance financière, de diversifier les aides qu’elle propose, et d’ouvrir la CDC à l’international.

Enfin, ce rapprochement vise à mieux coordonner l’action internationale des régions, la Caisse des dépôts étant ancrée dans les territoires. Chaque préfet des futures grandes régions appelées à voir le jour disposera ainsi d’un conseiller diplomatique. Reste à savoir ce que va devenir le Quai d’Orsay ainsi remodelé sous la direction d’un(e) autre ministre moins colbertiste et moins hégémonique que M. Fabius.

L’accent est également mis sur une meilleure intégration avec l’appareil diplomatique de l’Union européenne : un certain nombre de services vont être mutualisés dans un souci d’économies d’échelle. Mais surtout, Paris milite pour la mise en place de consulats européens : un objectif encore lointain, mais que la crise engendrée par les mouvements massifs de migrations vers l’UE rend de plus en plus nécessaire.

Enfin, le ministère des affaires étrangères, qui est représenté au conseil d’administration de France Médias Monde, ambitionne une diffusion en espagnol de la chaîne d’information continue France 24, déjà présente en français, en anglais et en arabe.