Le Parisien || 18 avril 2019, 14h01 | MAJ : 18 avril 2019, 22h02
Selon une étude de l’OFCE, le pouvoir d’achat des Français devrait enregistrer sa plus forte hausse depuis 2017, en partie grâce aux mesures annoncées pour gérer la crise des Gilets jaunes.
On a rarement vu un tel alignement des planètes en faveur du pouvoir d’achat. Inflation basse, prime défiscalisée, augmentation de la prime d’activité, baisse des cotisations sociales, suppression partielle de la taxe d’habitation et de la hausse de la CSG sur les petites retraites…
En 2019, le pouvoir d’achat des ménages devrait augmenter de 850 € en moyenne, selon l’étude de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) parue cette semaine. Cela représente une hausse de 2,5 % du niveau de vie des ménages, du jamais-vu depuis 2007, année où Nicolas Sarkozy, tout juste élu président, avait lancé une salve de mesures fiscales en faveur du «travailler plus pour gagner plus ».
«Tous les ménages n’en profiteront pas de la même manière»
À elles seules, les mesures d’urgence annoncées le 10 décembre par Emmanuel Macron en réponse aux Gilets jaunes devraient peser pour la moitié, soit 440 € dans ce gain de niveau de vie. Un ballon d’oxygène que l’OFCE chiffre à 12 milliards d’€. Et c’est sans compter bien sûr les arbitrages du Grand débat en faveur des ménages modestes et des classes moyennes attendus dans les prochains jours.
Ces chiffres doivent néanmoins être bien sûr pris avec des pincettes. « Ils montrent une évolution moyenne globale, explique Mathieu Plane, coauteur de l’étude. Tous les ménages n’en profiteront pas de la même manière : un actif qui perçoit la prime d’activité et réalise des heures supplémentaires en profitera davantage qu’un retraité », nuance-t-il.
Mais la tendance est bien là. Dans son rapport bisannuel publié au début du mois, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) est, elle aussi, positive : « La progression de l’emploi, la hausse des salaires réels, les baisses d’impôts et la diminution des prix du pétrole soutiendront la consommation des ménages » en France, prédit l’organisation. La consommation, justement, devrait en profiter à plein et « connaître un choc positif » (+ 1,6 %) cette année, assure Mathieu Plane même si les Français continuent toujours autant d’épargner.
Une déconnexion historique
Ces chiffres ont de quoi surprendre en pleine crise des Gilets jaunes, motivée justement par la baisse du pouvoir d’achat… Comment expliquer un tel décalage entre les statistiques et le ressenti négatif des Français ? Pour l’économiste de l’OFCE, « le climat de défiance actuel » explique « cette déconnexion historique ». « La crise des Gilets jaunes a éclipsé la hausse du pouvoir d’achat qui a débuté fin 2018 et que les mesures d’urgences prises en soutien mi-décembre ont accentué », justifie-t-il.
Pour l’économiste Philippe Waechter, les classes populaires et moyennes ont surtout intégré que leur « situation reste précaire ». « La prime d’activité comme la prime défiscalisée ne peuvent pas donner le sentiment d’une amélioration durable », tranche-t-il. Ce que confirme Pascale Hébel, directrice du pôle consommation et entreprise au Crédoc : « Même si la confiance des ménages s’améliore un peu, remarque-t-elle, leurs inquiétudes sur leur pouvoir d’achat restent fortes et bien souvent juste titre ».
De ce point de vue, la loi Egalim’ relevant le seuil de revente à perte et encadrant les promotions a des effets pervers. « Elle a entraîné une augmentation des prix alimentaires de 3 % en moyenne selon l’Insee entre février et janvier, c’est énorme quand on sait que les Français y sont très sensibles, surtout les plus pauvres, et que cela concerne des produits de base du quotidien », pointe Pascale Hébel.