Le représentant de Pékin en France, Lu Shaye, a adressé une lettre acerbe au sénateur Alain Richard, en lui demandant de renoncer à l'organisation d'un voyage parlementaire sur l'île. Les membres du groupe d'études France-Taïwan au Sénat préparent leur réponse.
La Lettre A, 15 mars 2021
Si sa réputation de "faucon" de Pékin a précédé sa nomination à Paris, l'ambassadeur chinois Lu Shaye est toujours aussi offensif dans ses échanges diplomatiques. A la fin du mois de février, il a adressé un courrier très critique au sénateur La République en marche Alain Richard au sujet de Taïwan. L'ambassadeur n'a guère apprécié d'apprendre sur le site internet du Sénat que le groupe d'études dédié à Taïwan, présidé par le macroniste, préparait cet été un voyage sur l'île dont la Chine revendique la souveraineté. Ce déplacement était notamment motivé par la gestion exemplaire de la pandémie de Covid-19.Lu Shaye s'est fendu d'un courrier en date du 18 février pour faire savoir à Alain Richard qu'il condamnait cette initiative qui, selon lui, "remettrait en cause le statu quo" entre Pékin et Taipei. Dans cette longue lettre, l'ambassadeur chinois rappelle à Alain Richard "qu'il n'y a qu'une seule Chine dans le monde et que Taïwan fait partie inaliénable de la Chine". Une visite du groupe d'étude "violerait" à ses yeux ce principe, en plus d'envoyer un "signal erroné aux forces indépendantistes de Taïwan". Sans prendre de gants, l'ambassadeur presse l'ancien ministre de la défense (1997-2002) de Lionel Jospin d'éviter à l'avenir "toute forme de contacts officiels avec les autorités taïwanaises".
Réponse en cours des sénateurs
D'après nos informations, Alain Richard - également membre du bureau exécutif de LREM et proche de l'Elysée - aurait d'autant moins apprécié le ton du courrier de l'ambassadeur que les voyages parlementaires sur l'île, comme en Chine, ne sont pas une première. Le Groupe d'études sénatorial envisage d'adresser une réponse claire à l'ambassadeur, qui s'est déjà fait remarquer par ses prises de position acerbes contre tous ceux qui expriment des divergences avec Pékin, même sur les réseaux sociaux.
En avril 2020, Jean-Yves Le Drian avait d'ailleurs convoqué l'ambassadeur pour lui faire savoir sa "désapprobation de certains propos" exprimés dans une série de tribunes anonymes publiés sur le site de l'ambassade de Chine.