Le 19 décembre, j’ai posé une question d’actualité au Gouvernement relative à la reconnaissance, par les États-Unis, de Jérusalem comme capitale d’Israël.
Cette décision unilatérale a été annoncée par le président TRUMP le 6 décembre dernier. Le locataire de la Maison Blanche a également donné l’ordre au Département d’État de commencer à préparer le transfert de l’ambassade américaine de Tel Aviv à Jérusalem.
Le Président de la République a désapprouvé cette décision, qui « contrevient au droit international et aux résolutions du Conseil sécurité des Nations Unies ».
Adoptées en 1980, les résolutions 476 et 478 disposent, d’une part, que toute mesure visant à altérer le statut de Jérusalem, ainsi que les caractéristiques géographiques, démographiques et historiques de la ville, est considérée comme nulle et sans effet, et doit être abandonnée et, d’autre part, que tous les États membres des Nations Unies qui ont établi des missions diplomatiques à Jérusalem doivent les retirer de la ville.
Quant à la résolution 2334, adoptée en 2016, elle rappelle qu’aucune modification des frontières de 1967 autre que celles agréées par les parties ne serait reconnue par la communauté internationale, y compris à Jérusalem.
À l’instar de ses partenaires de l’Union européenne, la France considère que Jérusalem a vocation à devenir la capitale des deux États, Israël et la Palestine, selon des modalités qu’il appartiendra aux Palestiniens et aux Israéliens de définir par la négociation.
Lundi dernier, à l’occasion du vote sur un projet de résolution présenté par l’Égypte, le représentant permanent de la France auprès de l’Organisation des Nations Unies, François DELATTRE, a déclaré qu’« il n’y a pas d’alternative à la solution des deux États, pas de solution des deux États sans accord entre les parties sur Jérusalem, et pas d’accord possible sur Jérusalem hors des paramètres internationalement reconnus ».
Vous trouverez, ci-dessous, la vidéo et le compte rendu de mon intervention et de la réponse du secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, Jean-Baptiste LEMOYNE.
Le président. La parole est à M. Richard Yung, pour le groupe La République En Marche. (M. André Gattolin applaudit.)
Richard Yung. Ma question porte sur la reconnaissance, par les États-Unis, de Jérusalem comme capitale de l’État d’Israël.
Le 6 décembre dernier, le président Trump a annoncé sa décision de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël et d’y transférer l’ambassade américaine, qui se trouve actuellement à Tel-Aviv et compte plus de 1 000 agents. Pour ce faire, il s’est fondé sur une loi de 1995, dont l’application avait jusqu’alors été suspendue de six mois en six mois par tous les différents présidents américains.
Par cette décision unilatérale, le président américain déstabilise une nouvelle fois le Proche-Orient, en rompant un statu quo fragile et en instituant un rapport de force inégal en défaveur des Palestiniens. Il montre aussi le peu de cas qu’il fait de ses alliés – si l’on peut dire ! – de l’OTAN. Les États-Unis perdent en même temps leur statut de médiateur au Proche-Orient.
Le Président de la République, Emmanuel Macron, a exprimé la désapprobation de la France, en qualifiant cette initiative de contraire au droit international et dangereuse pour la paix au Proche-Orient.
Le Conseil de sécurité des Nations unies, réuni hier, a condamné la décision de Donald Trump par quatorze voix, dont celle de la France, et les États-Unis, isolés, ont dû user de leur droit de veto.
La France est l’amie des Palestiniens comme des Israéliens. C’est pourquoi elle ne peut accepter ce coup de force. Comme l’a dit le Président de la République, elle cherchera à rétablir le consensus sur la ville de Jérusalem, la paix et la reconnaissance des deux États.
Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous indiquer quelles voies la France envisage d’emprunter pour atteindre ces objectifs ? (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)
Le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur Richard Yung, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser Jean-Yves Le Drian, qui se trouve précisément avec le Président de la République et le roi Abdallah de Jordanie. Le sujet que vous évoquez est naturellement au cœur de leurs entretiens.
La marque de fabrique de la diplomatie française, c’est qu’elle maintient le dialogue avec l’ensemble des acteurs de la région. Elle continue naturellement à parler à l’Autorité palestinienne, ainsi qu’à l’État d’Israël, puisque le Premier ministre Netanyahou était, voilà quelques jours, en France.
La France est constante dans son souhait de voir advenir véritablement deux États pouvant coexister en paix dans des conditions de sécurité effective. Sa doctrine, très largement partagée au niveau international, se fonde aussi sur l’idée que Jérusalem doit être la capitale des deux États.
La décision du président américain a été qualifiée de regrettable par le Président de la République depuis Alger puis Doha. Le Conseil européen a réaffirmé son attachement à la mise en place de deux États, avec Jérusalem pour capitale commune. Soyons clairs : sans accord sur Jérusalem, il n’y aura pas d’accord de paix.
Dans ces conditions, la France reste active et engagée. Jean-Yves Le Drian était hier aux États-Unis et le Président de la République consulte aujourd’hui. Nous avons bon espoir que la raison finisse par triompher. Il y va de l’avenir de populations qui vivent depuis des décennies dans la peur, voire dans la terreur, ce à quoi on ne peut se résigner. L’année 2018 verra la France poursuivre avec ardeur ses efforts. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)