En 2020, l’aide publique au développement (APD) poursuivra sa trajectoire ascendante dans la perspective d’atteindre 0,55% du revenu national brut (RNB) en 2022. Le montant des autorisations d’engagement s’élèvera à 7,3 milliards d’euros, soit une hausse de 62,2% par rapport à 2019. Quant au montant des crédits de paiement, il s’élèvera à 3,3 milliards d’euros, soit une hausse de 6,5% par rapport à 2019.
Les priorités resteront celles fixées par le dernier Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (8 février 2018) : hausse des dons en faveur des pays les plus défavorisés, à commencer par les 19 pays prioritaires ; renforcement de la part de l’aide transitant par le canal bilatéral ; doublement du volume d’aide transitant par les organisations non gouvernementales d’ici à 2022; hausse des contributions volontaires aux Nations unies (défense du multilatéralisme) ; concentration de l’effort d’APD sur cinq priorités thématiques (zones fragiles ou en crise, éducation, climat, égalité femmes/hommes, santé) ; etc.
Ces orientations figureront dans le projet de loi de programmation relative au développement solidaire, à la lutte contre les inégalités mondiales et à l’accueil des organisations internationales en France, qui sera présenté l’an prochain. Ce projet de loi fixera également le nouveau cadre de l’évaluation de l’APD (création d’une commission indépendante d’évaluation sur le modèle de la commission britannique, l’Independent Commission on Aid Impact).
Outre les crédits budgétaires, les moyens financiers consacrés à l’APD comprennent les ressources extrabudgétaires issues de la taxe sur les transactions financières (528 millions d’euros) et de la taxe de solidarité sur les billets d’avion (210 millions d’euros). Le produit de ces taxes est affecté au Fonds de solidarité pour le développement (FSD), qui finance essentiellement de l’APD multilatérale (Fonds mondial, UNITAID, Partenariat mondial pour l’éducation, Fonds vert, etc.).
Vous trouverez, ci-dessous, le compte rendu de mon intervention dans le débat sur les crédits de la mission « Aide publique au développement » (29 novembre).
M. RichardYung. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2020 marque une nouvelle étape dans la remontée en puissance de notre politique d’aideau développement. Contrairement à ce que d’aucuns laissent entendre, il respecte la trajectoire budgétaire fixée par le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement en février 2018, qui doit conduire la France à consacrer 0,55 % de son revenu national brut à l’APD en 2022.
L’an prochain, le montant de notre aide devrait représenter 0,46 % de ce revenu, alors que la cible est de 0,47 % – entre les deux, l’épaisseur d’un trait.
Les ressources extrabudgétaires, issues de la taxe sur les transactions financières et de la taxe de solidarité sur les billets d’avion, sont, depuis 2018, en décroissance relative dans le total des moyens consacrés à l’APD ; la première rapporte tout de même 1,6 milliard d’euros, ce qui est beaucoup, le rendement de la seconde étant plus faible, à 218 millions d’euros. Leur part du total, de 28 % en 2017, baissera très nettement, à 18 %, l’année prochaine.
Cette inversion de tendance a été rendue possible par la rebudgétisation des crédits d’APD, qui contribue au renforcement de la transparence de notre aide.
Je me réjouis également que le Fonds de solidarité pour le développement ait été recentré sur sa mission initiale : le financement de quelques fonds multilatéraux, dont le Fonds vert pour le climat.
Sur le plan qualitatif, le projet de loi de finances est en phase avec les orientations du dernier Cicid. Plusieurs mesures budgétaires confirment le rééquilibrage de notre aide au profit de l’aide bilatérale sous forme de dons. Plusieurs orateurs ont insisté sur ce point ; le débat entre le bilatéral et le multilatéral, celui entre les dons et les prêts, sont permanents – j’entends cela depuis vingt ans, et la majeure et la mineure varient selon les années.
Un autre signe encourageant est l’augmentation importante des crédits destinés à la conduite de projets par les ambassades via le fonds de solidarité pour les projets innovants. Cette excellente initiative soutient des projets de petite ampleur, mais mis en œuvre très rapidement et, j’espère, de façon efficace, à côté de la grosse machinerie que nous connaissons.
Il convient de saluer aussi l’effort budgétaire en faveur de l’aide humanitaire et de la coopération décentralisée. Ces deux outils contribuent au renforcement du canal bilatéral sous forme de dons de notre aide.
Il en va de même pour les contrats de désendettement et de développement, auxquels le projet de loi de finances consacre 42 millions d’euros.
En ce qui concerne l’aide multilatérale, il faut souligner le doublement de la contribution française au Fonds vert pour le climat qui prendra essentiellement la forme de dons. Voilà qui confirme, monsieur Requier, que la France est en train de réduire la part de son aide consacrée aux prêts – il y a d’ailleurs beaucoup à dire sur ce débat et la politique de dons, mais ce n’est pas l’objet de la discussion de cet après-midi.
Des inquiétudes se sont exprimées sur la baisse des autorisations d’engagement allouées aux dons-projets mis en œuvre par l’AFD. Personnellement, je ne les partage pas. Je pense que le projet de loi de finances ne remet aucunement en cause les priorités thématiques et géographiques. L’effort budgétaire demeure très important.
La discussion du très attendu projet de loi d’orientation et de programmation, dont nous regrettons tous qu’il ait pris du retard, sera l’occasion de fixer un nouveau cadre à l’évaluation de notre aide. Je me réjouis que le Gouvernement envisage – peut-être nous le confirmerez-vous, monsieur le ministre – de s’inspirer du dispositif britannique, qui constitue, en effet, une référence, les Britanniques ayant fait de la politique de développement une dimension majeure de leur politique extérieure.
La commission indépendante d’évaluation qui devrait être mise en place sera chargée, notamment, de mesurer l’effet de l’APD sur les flux migratoires, le Gouvernement ayant récemment exprimé sa volonté de faire de cette aide « un levier au service de la politique migratoire ». Lors de son audition par la commission des affaires étrangères, le directeur général de l’AFD a déclaré, certainement à juste titre, qu’« une partie très significative de la réponse à la crise migratoire se trouve dans les pays d’origine, dans les pays de première destination et dans les pays de transit des migrants ».
Tout cela est vrai, et nous le disons depuis de nombreuses années ; mais nous savons tous que la mise en œuvre de ces politiques prend un temps considérable. Bien sûr, la solution réside dans le développement de ces pays ! Mais voilà plus de cinquante ans qu’ils sont indépendants…
Enfin, monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur les négociations relatives au cadre financier pluriannuel de l’Union européenne pour la période 2021-2027. Le projet élaboré prévoit la mise en place d’une nouvelle architecture financière pour le développement. Pouvez-vous nous en dire davantage, s’agissant en particulier des nouvelles formes de coopération – gestion des flux migratoires et climat ?
Le projet de loi de finances permet à la France d’être au rendez-vous du défi du développement. Le groupe La République En Marche votera les crédits de cette mission ! (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM. – MM. les rapporteurs spéciaux applaudissent également.)