Le 19 mai, René AICARDI et moi-même avons été accueillis à l’aéroport de Narita par le consul de France à Tokyo, M. Philippe MARTIN, et mon assistant parlementaire, M. Vincent TOINEL.
Lors d’un déjeuner de travail avec M. MARTIN et M. Emmanuel BESNIER, premier secrétaire, nous avons fait le point sur la situation politique et économique du Japon. Près d’un an après la victoire du Parti démocrate du Japon (PDJ) sur le Parti libéral-démocrate (PLD), au pouvoir depuis plus de 50 ans, force est de constater que l’état de grâce est passé. La cote de popularité du Premier ministre japonais, M. Yukio HATOYAMA, est au plus bas (20%). La nouvelle majorité a renoncé à plusieurs réformes (droit de vote pour les étrangers aux élections locales, abolition de la peine de mort, etc.). L’agenda politique japonais est actuellement dominé par la question de la base américaine de Futenma. Pendant la campagne des législatives, M. Hatoyama s'était engagé à demander le déménagement de cette base située sur l’île d’Okinawa. Après plusieurs mois de tergiversations, M. Hatoyama a été forcé d'admettre qu'il n'avait pas d'alternative, à la grande satisfaction des Etats-Unis, mais au grand dam de la population et des élus locaux, las du bruit et de la criminalité engendrés par la présence américaine. Sur le plan économique, le Japon se remet doucement de la crise après une forte baisse de son PIB en 2009 (-5%). Cependant, la seconde puissance économique mondiale continue d’être confrontée à un niveau élevé de déflation qui s’explique par la chute de la demande, elle-même engendrée par le déclin démographique. Le Japon est également le pays le plus endetté du monde industrialisé (environ 200% du PIB !). Dans ces conditions, les élections sénatoriales qui doivent se tenir au mois de juillet s’annoncent particulièrement difficiles pour le PDJ.
L’après-midi, M. MARTIN nous a présenté le service des visas, dont le fonctionnement est assuré par une équipe de trois agents consulaires (+ un agent contractuel pendant l’été). Il délivre environ 6.200 titres par an (visas de court séjour et visas Schengen pour les ressortissants d’Etats tiers ; visas de long séjour pour les ressortissants japonais) et recense moins d’une dizaine de refus de titre par an.
Nous avons ensuite visité le nouveau bâtiment de l’ambassade, qui a été inauguré le 18 mars dernier par le ministre des affaires étrangères, M. Bernard KOUCHNER, et notre ambassadeur, M. Philippe FAURE. Ce splendide édifice très lumineux a été conçu par les architectes français Pierre-Michel DELPEUCH et Dominique CHAVANNE et construit selon des normes haute qualité environnementale (HQE). Il a pour réputation d’être le bâtiment diplomatique le plus résistant en cas de séisme. La sécurité de l’ambassade est assurée par trois gendarmes.
La section consulaire de l’ambassade comprend un bureau où nos concitoyens peuvent se faire inscrire sur le registre des Français établis hors de France ou solliciter la délivrance d’un document d’identité (carte nationale d’identité et passeport). Environ 8.000 Français sont actuellement enregistrés dans la circonscription consulaire de Tokyo, dont 20% de binationaux nés au Japon de couples franco-japonais. Cette tendance devrait s’accentuer car la section consulaire enregistre environ 300 mariages binationaux par an (sur 320 mariages). Dans ces conditions, il sera sans doute nécessaire, à l’avenir, de négocier un accord bilatéral afin de permettre la double nationalité (accord Japon/France ou Japon/UE).
La section consulaire comprend également un bureau des bourses et de l’aide sociale. Pour la session 2010-2011, le poste a reçu 98 demandes de bourse scolaire et 29 demandes de prise en charge des frais de scolarité (PEC). S’agissant de l’aide sociale, les besoins sont faibles (deux allocations enfant handicapé). Le budget du comité consulaire pour la protection et l’action sociale est en baisse (9.400€ de budget pour 15.000€ demandés au Département).
Deux agents sont chargés d’établir les actes d’état civil (521) et les actes notariés (70). M. MARTIN est assisté par Mme Sandra COHEN, vice-consule, qui notamment est chargée de traiter les cas difficiles (non versement de pensions alimentaires, etc.). Enfin, un bureau de traduction est notamment chargé de délivrer les bordereaux de détaxe aux Japonais ayant effectué des achats en France et souhaitant bénéficier du remboursement de la TVA française.
Lors de la crise provoquée par le nuage de cendres volcaniques venu d’Islande, près de 1.500 Français bloqués à l’aéroport de Narita ont sollicité l’aide de la section consulaire. Certains ont été hébergés par des Français résidant à Tokyo pendant une ou deux nuits.
M. MARTIN m’a également indiqué qu’il était en train d’élaborer un scénario en cas de crise sismique. Il est notamment à la recherche d’un parc dans lequel les ressortissants français ou européens pourraient être accueillis en cas de séisme. Il réfléchit aussi à la possibilité de mettre en place une cellule de crise (accès à l’eau, salle de consultation médicale).
Lors d’une réunion de travail à la chancellerie politique de l’ambassade, nous avons abordé la question brûlante des enfants franco-japonais privés de liens avec leur parent français avec M. Christophe PENOT, ministre-conseiller et numéro deux de l’ambassade, M. Rémi LAMBERT, conseiller politique, M. BESNIER, M. MARTIN et M. Thierry CONSIGNY, conseiller à l’Assemblée des Français de l’étranger (AFE). Cette réunion m’a permis de préparer l’entretien que j’ai eu le lendemain avec le secrétaire d’Etat à la justice du Japon, M. NAKAMURA.
Depuis trois ans, notre ambassade, en liaison avec d’autres représentations diplomatiques, est très impliquée dans ce dossier difficile (on estime à environ 10.000 le nombre d’enfants binationaux au Japon). Grâce aux efforts de nos diplomates, un comité de consultation franco-japonais sur l’enfant au centre d’un conflit parental a été mis en place le 1er décembre dernier. Ce comité a pour but de faciliter les échanges et le partage d’informations et de permettre la transmission des documents (lettres, photos, etc.). Les autorités françaises auraient préféré que ce comité soit plus ambitieux et que les deux ministères de la justice et les associations de parents soient associés à ses travaux.
D’après M. PENOT, d’autres initiatives sont aujourd’hui nécessaires afin de trouver une solution à la trentaine de cas concernant des citoyens français. Au mois de mars, M. HATOYAMA avait indiqué à M. KOUCHNER qu’il souhaitait mettre en place une « structure de médiation ».
Se pose aussi la question de la ratification de la convention de La Haye sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfant. Le Premier ministre HATOYAMA a indiqué vouloir procéder à cette ratification en 2011. La Cour suprême et le ministère de la justice japonais sont très réservés quant à cette ratification. Outre les obstacles d’ordre culturel (le divorce est considéré comme une chose honteuse au Japon ; il est synonyme d’échec et les pères japonais préfèrent souvent renoncer à leurs droits), la procédure achoppe sur la question des mesures exécutoires (l’entrée en vigueur de la convention supposerait, en dernier recours, l’utilisation des forces de l’ordre). La question des violences domestiques pose également problème.
Dans ces conditions, il apparaît nécessaire d’entreprendre un travail de pédagogie car les autorités japonaises ont du mal à accepter que des réformes puissent venir du bas (les grandes réformes juridiques depuis l’occupation américaine ont été mises en place du haut vers le bas). Elles n’apprécient pas non plus d’être soumises à une pression étrangère. Il faut, par exemple, leur expliquer que la convention de La Haye s’appliquerait aussi aux parents japonais qui résident en France (M. PENOT a déjà recensé un cas concret). Il convient également de mobiliser l’opinion publique japonaise. Pour ce faire, cinq associations japonaises ont été approchées. Les associations européennes, américaines et japonaises ont rassemblé leurs forces afin de prendre des initiatives avec des parlementaires japonais (distribution de newsletters au Sénat ; nombreux articles de presse afin d’influencer l’opinion publique et les acteurs publics, etc.). M. CONSIGNY m’a indiqué qu’une initiative législative bipartisane a malheureusement échoué en 2009.
Pour ma part, j’ai évoqué l’idée de présenter au Parlement français une proposition de résolution comparable à celle qui a récemment été déposée à la Chambre des représentants américaine. Il conviendrait également de continuer de faire pression sur l’ambassade du Japon à Paris. En outre, j’ai proposé d’organiser un colloque européen à Paris avec des représentants d’associations, des juristes, des pédopsychiatres, etc.
Lors du sommet Union européenne/Japon qui s’est tenu le 28 avril dernier, la Haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Mme Catherine ASHTON, a refusé d’aborder la question des enfants au centre d’un conflit parental afin de ne pas embarrasser les autorités japonaises alors que la présidence espagnole du Conseil européen souhaitait l’inscrire dans l’agenda des discussions. D’après M. PENOT, « l’Europe a manqué une occasion ». J’ai insisté sur la nécessité de mobiliser mes collègues du Parlement européen.
Dans la perspective du rendez-vous avec M. NAKAMURA, M. PENOT m’a transmis la liste des difficultés concrètes auxquelles nos ressortissants font face dans le cadre des procédures de justice qu’ils ont engagées au Japon. L’ambassadeur devrait prochainement transmettre ce document à la ministre de la justice du Japon, Mme Keiko CHIBA.
En fin de journée, j’ai rencontré des représentants d’associations françaises au Japon : Mme Florence COSTA-KAGEYAMA (Association des familles franco-japonaises du Japon) M. Etienne BARRAL (ADFE), M. Frédéric MADELAINE (UFE) et M. Jean-Bernard DUMERC (Association des Français du Japon). Ils ont tout d’abord attiré mon attention sur l’impact de la crise économique et financière sur les Français établis au Japon, et plus particulièrement en matière de scolarisation de leurs enfants (une centaine de bourses sont accordées chaque année). Nous avons également abordé la question du déménagement du lycée franco-japonais, qui est synonyme d’une hausse des écolages. Autre sujet de préoccupation pour les familles binationales dont les enfants sont scolarisés au lycée franco-japonais : les problèmes de garde pendant les vacances (certaines écoles de quartier refusent de scolariser les élèves du lycée franco-japonais pendant les vacances). Enfin, nous avons évoqué la question des enfants franco-japonais privés de liens avec leur parent français.
La journée du 20 mai a débuté par un petit-déjeuner organisé par les conseillers du commerce extérieur (CCE). La section du Japon regroupe 45 représentants de sociétés françaises implantées dans l’archipel nippon. Après une brève présentation de la relation France-Japon par l’ambassadeur, M. Gaël AUSTIN, président de la section, a présenté cinq nouveaux conseillers.
M. Christophe GRIGNON, directeur du bureau local de l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII), nous a ensuite présenté le partenariat CCE/AFII avant de nous dresser un état des lieux de l’investissement japonais en France en 2009. Le Japon est le 9ième pays investisseur en France et notre pays est la 1ière destination des investissements japonais dans la zone euro (400 filiales ; 62.000 emplois). Les investisseurs japonais se distinguent principalement par leur souci de préserver l’emploi en France. Ils ont également pour qualité appréciable de tenir leurs engagements (quand un accord est signé, il est respecté). Ils vouent aussi un très grand intérêt pour la recherche et l’innovation. L’automobile et l’électronique représentent près des deux tiers des implantations japonaises en France. En 2009, les implantations commerciales ont pris le pas sur les sites de production. Les régions Île-de-France, Nord-Pas-de-Calais et Rhône-Alpes accueillent les deux tiers des investissements japonais en France. En 2009, 24 projets d’implantation ont abouti et 1.824 emplois ont été créés (les activités de services représentent 80% des emplois créés ; en 2009, le secteur de la santé est passé devant celui de l’automobile en termes de création d’emplois). Après un gel en 2009 des projets de développement dans les secteurs de l’automobile, des NTIC, de la chimie et des matériaux, un début de reprise devrait s’opérer en 2010. En outre, des secteurs moins ou pas affectés par la crise (agro-alimentaire, cosmétiques, pharmacie, bureautique, contenus numériques et Internet, énergies renouvelables, distribution/hôtellerie moyen de gamme, etc.) qui avaient pris le relais en 2008-2009 continuent d’être actifs. A noter également : le développement croissant des implantations en Europe sous la forme de partenariats avec des entreprises locales (joint-venture, licences, etc.).
Après une présentation des travaux du dernier séminaire des conseillers du commerce extérieur de la région Asie du Nord (23 et 24 avril), M. AUSTIN a procédé à un tour de table conjoncturel. D’après les représentants du secteur bancaire, le Japon ne devrait pas vivre le même scénario que la Grèce car les ménages japonais financent 95% de la dette japonaise et le service de la dette est relativement faible (72%) en raison des taux d’intérêt très bas. S’agissant de la régulation financière et bancaire, les autorités japonaises éprouvent de la « sympathie », mais pas de « connivence » pour les projets européens et américains. Il a été rappelé que la Financial Services Agency (FSA) a été mise en place à la fin des années 1980, à la suite des difficultés rencontrées par le système bancaire japonais et la révélation de liens étroits entre fonctionnaires du ministère des finances et monde bancaire. Le Japon demeure à l’écart de la volatilité des marchés. Les ratios de fonds propres sont relativement bas, mais le Japon s’en accommode. Dans le secteur du luxe, la crise a quelque peu bouleversé les modes de consommation (développement de la « fast fashion »). Pour autant, ce secteur est en train de remonter, notamment en raison de l’arrivée de riches touristes chinois qui ont « peur » des produits contrefaits et préfèrent réaliser leurs achats au Japon. Cependant, le rythme de la reprise varie selon les secteurs et les régions.
Le déjeuner offert par SEM. Philippe FAURE a été l’occasion d’échanger avec trois sénateurs japonais membres du parti démocratique du Japon (PDJ) : Mme Hiroe MAKIYAMA, M. Naoki KAZAMA et M. Yukihisa FUJITA. Mme Catherine COLONNA, ancienne ministre déléguée aux affaires européennes et actuelle ambassadrice de France à l’UNESCO, qui était de passage à Tokyo, faisait également partie des convives. Nous avons abordé de nombreux sujets, dont la politique familiale, la base américaine de Futenma et les enfants franco-japonais privés de liens avec leur parent français.
L’après-midi, je me suis rendu au ministère de la justice afin de m’entretenir avec M. Tetsuji NAKAMURA, secrétaire d’Etat à la justice, de la question des enfants franco-japonais placés au centre d’un conflit parental. Je lui ai indiqué que ce sujet suscite un intérêt croissant dans l’opinion publique française et que j’ai été saisi par plusieurs pères français qui n’ont pas vu leurs enfants depuis de nombreuses années. Après lui avoir rappelé l’importance que revêt la mise en place du « comité de consultation franco-japonais sur l’enfant au centre d’un conflit parental », je lui ai exprimé mon souhait de voir ce comité élargi à d’autres ministères tels que celui de la justice et aux représentants de la police japonaise. Je lui ai également demandé que ce comité puisse auditionner les associations de parents et mener des actions de médiation entre les parents français et japonais. En outre, je lui ai rappelé l’importance qui s’attache à la ratification par le Japon de la convention de La Haye sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfant.
Après m’avoir indiqué que ce dernier sujet relève du ministère japonais des affaires étrangères (le Gaimusho), le secrétaire d’Etat m’a affirmé qu’il n’est pas nécessaire de modifier le code civil japonais préalablement à la ratification de la convention de La Haye. Il m’a également dit ne pas être au courant des déclarations du Premier ministre HATOYAMA concernant la mise en place d’une « structure de médiation ». D’après lui, de nombreux Français qui divorcent d’avec un ressortissant japonais ne connaîtraient pas la législation nippone en matière de droit de la famille. Ils ignoreraient notamment qu’ils peuvent solliciter un droit de visite auprès de la justice japonaise. Le secrétaire d’Etat m’a indiqué la procédure légale à suivre (deux commissaires sont d’abord chargés de la médiation. En cas d’échec de la médiation, on entre dans le cadre d’une procédure judiciaire. Si le père n’a pas pu voir son enfant, il peut saisir le tribunal des affaires familiales, qui peut éventuellement fixer une astreinte). D’après M. NAKAMURA, ce système ne serait pas compris par les étrangers. En réponse, je lui ai mentionné les difficultés concrètes auxquelles les ressortissants français font face dans le cadre des procédures de justice qu’ils ont engagées au Japon.
A l’issue de cet entretien décevant, j’ai rencontré Me Yukiko YAMADA, qui est l’une des rares avocates japonaises à s’impliquer dans le dossier des enfants binationaux privés de liens avec l’un de leurs parents. Elle m’a indiqué que l’opinion publique japonaise est de plus en plus sensibilisée sur les questions liées au divorce. Des parents japonais se sont unis pour demander la fin de la garde monoparentale et la mise en place d’un système de garde partagée. Grâce à la pression diplomatique, le gouvernement japonais doit prendre une décision. Plusieurs groupes de travail, dont un au sein du barreau japonais, étudient très sérieusement les conséquences qu’induirait la ratification de la convention de La Haye. Me YAMADA m’a fait part de sa préoccupation quant aux conséquences de la ratification de la convention. De son point de vue, il serait sans doute préférable de ne pas être trop brutal et de ne pas bouleverser du jour au lendemain des règles familiales qui sont le produit d’un long processus historique. Concrètement, la ratification de la convention de La Haye ne devrait pas automatiquement conduire à la mise en place un système de garde alternée. Il vaudrait mieux laisser le choix aux parents : la garde alternée ou un droit de visite pendant un certain nombre d’heures par mois. Me YAMADA m’a également indiqué que l’intérêt supérieur de l’enfant, du point de vue japonais, ne consiste pas à ce que l’enfant voie ses deux parents. Au Japon, la mère occupe une place centrale dans l’éducation de l’enfant alors que le père s’implique généralement peu, même si cela change un peu aujourd’hui.
Enfin, Me YAMADA m’a indiqué que le groupe de travail du barreau du Japon organisera un colloque les 20 et 21 juillet prochains sur cette question. Il devrait réunir des avocats, des diplomates, des représentants du ministère de la justice, des représentants d’associations, etc.
Le soir, j’ai participé à une conférence-débat organisée par l’ADFE à l’institut culturel franco-japonais sur la représentation politique des Français de l’étranger. D’autres sujets ont également été abordés tels que la politique culturelle extérieure ou les enfants franco-japonais privés de liens avec leur parent français.
La journée du 21 mai a été consacrée à la visite du lycée franco-japonais de Tokyo. Cet établissement conventionné fondé en 1975 et transformé en fondation scolaire de droit japonais en 2005 accueille 1.020 élèves (-87 élèves depuis le début de la crise économique ; une trentaine de places sont réservées aux enfants de salariés de huit entreprises françaises ; la part des élèves binationaux est de plus en plus importante). Le déménagement du lycée dans le quartier populaire de Takinogawa, en 2012, devrait permettre l’accueil de 2.500 enfants dans 20 ans.
Le matin, j’ai visité le futur site du lycée en compagnie de M. PENOT, Mme Lydie BOUREAU-COIGNAC, proviseure, et M. Philippe DUMAS, comptable. Nous étions accompagnés de représentants de la municipalité de Tokyo, qui a réservé le terrain en 2006. Le dossier devrait être validé par le conseil d’administration du 16 juin avant la signature des promesses de vente et le passage devant le conseil municipal de Tokyo (l’ambassade a reçu l’appui du gouverneur de Tokyo, qui, par cette opération, souhaite relancer la vie du quartier de Takinogawa). Le produit de la vente du site de Fujimi couvrira à hauteur de 58% l’achat du nouveau terrain. Les 42% restants – qui correspondent au terrain de sport – seront loués par la fondation à un prix inférieur au prix du marché. Les travaux d’aménagement du site devraient débuter à l’automne prochain. 32 millions d’euros de travaux devraient être nécessaires afin de réaménager les 21.000m² de terrain et les 14.000m² de bâtiment. Ils seront financés grâce à un emprunt à un taux intéressant sur 22 ans (19M€) et à un apport de la fondation (13M€). Les familles binationales sont globalement satisfaites car elles pourront s’installer à proximité du lycée, les loyers étant moins élevés dans le quartier de Takinogawa que dans celui de Fujimi. En revanche, les familles expatriées sont plus partagées car le futur lycée sera éloigné des quartiers dans lesquels résident la plupart d’entre elles.
Nous nous sommes ensuite rendus sur le site de Fujimi, où nous avons été rejoints par M. Alexis LAMEK, conseiller culturel. L’équipe pédagogique du lycée est composée de 60 professeurs, dont 5 expatriés (le reste du corps professoral est composé de deux tiers de résidents et d’un tiers de recrutés locaux). En 2007, les personnels vacataires ont vu leur rémunération baisser de 30%. L’établissement comprend quatre classes bilingues (français/anglais) de trente élèves chacune de la moyenne section au CE1 (CE2 à la prochaine rentrée). Les élèves peuvent également intégrer une section européenne à partir de la première. La direction du lycée étudie actuellement la possibilité de mettre en place une classe bilingue français/japonais.
Avant la crise, les effectifs augmentaient de 5% par an malgré un contexte très concurrentiel avec les autres écoles internationales. Depuis le début de la crise, certaines familles expatriées sont parties s’installer à Hong Kong et Singapour. L’établissement est financé à hauteur de 40% par l’AEFE et 60% par les parents.
Mme BOUREAU-COIGNAC m’a indiqué que cinq élèves ont été placés en garde à vue pendant une trentaine de jours en 2009 pour vol, recel et revente de matériel électronique et falsification de papiers d’identité. Ces élèves ont comparu devant un conseil de discipline et ont été soumis à des mesures éducatives. La proviseure m’a expliqué qu’elle avait dû présenter les excuses officielles du lycée car, au Japon, le chef d’établissement est responsable des enfants jour et nuit.
S’agissant des débouchés, 80% des élèves vont étudier en France (le reste va en Amérique du Nord). Le lycée est en train de mettre en place un fichier des anciens élèves. M. LAMEK m’a expliqué que les lycéens ne sont pas formés pour intégrer le système universitaire japonais (la sélection se fait par QCM). Cependant, depuis le début de la crise, l’entrée dans les universités japonaises se fait de plus en plus par dossier.
Mme BOUREAU-COIGNAC m’a indiqué que le lycée accueille quelques élèves franco-japonais qui sont privés des liens avec leur parent français.
Après avoir rencontré quelques professeurs, je me suis entretenu avec trois représentantes des associations de parents d’élèves : Mme Gaëlle LEGROS (AF-FCPE), Mme Sophie BLIN-AYUSAWA (AF-FCPE) et Mme Zina SOULAS (APE). Elles ont notamment attiré mon attention sur le fait que le projet d’ouverture du nouveau site se traduit par une hausse de 15% des écolages sur trois ans. Cette hausse des frais de scolarité est difficilement supportable dans le contexte de crise économique et de désengagement de l’Etat. S’agissant du projet d’ouverture d’une section franco-japonaise, l’AF-FCPE m’a indiqué être plutôt favorable à une répartition 70% français/30% japonais.