La loi de finances rectificative pour 2009 a pris en compte l’arrêt Persche avec l’ajout d’un 4 bis à l’article 200 du code général des impôts.
Dans l’arrêt C-318/07 Persche contre Finanzamt Lüdenscheid du 27 janvier 2009, la Cour de justice des Communautés européennes pose le principe et précise les conditions de déductibilité des dons versés à des organismes d’intérêt général établis dans un autre État membre.
M. Persche, résident allemand et assujetti dans ce pays à l’impôt sur le revenu, a demandé une déduction fiscale au titre d’un don en nature réalisé au profit du Centro Popular de Lagoa, situé au Portugal (une maison de retraite à laquelle est rattaché un foyer d’enfants). En application de la loi allemande, qui permet la déduction fiscale des seuls dons versés à des organismes d’intérêt général situés en Allemagne, le Finanzamt (office des impôts) a refusé la déduction sollicitée au motif que le bénéficiaire du don n’était pas établi en Allemagne et que M. Persche n’avait pas présenté un reçu du don en bonne et due forme.
Le Bundesfinanzhof (juridiction suprême allemande dans le domaine des impôts), saisi en dernier ressort du litige, a demandé à la Cour de justice si un État membre peut subordonner la déductibilité fiscale d’un don à la condition que le bénéficiaire soit établi sur le territoire national.
La Cour établit en premier lieu que la déductibilité fiscale de dons transfrontaliers relève de la libre circulation de capitaux garantie par le droit communautaire. Elle note en particulier que les dons et donations apparaissent dans l’annexe de la directive 88/361, relative à la mise en œuvre de cette liberté, à laquelle la Cour reconnaît une valeur indicative pour la qualification d’une opération comme relevant de ce domaine. Le fait qu’il s’agisse d’une opération en nature ne remet pas en question cette qualification.
La non-déductibilité en Allemagne des dons versés à des organismes reconnus d’intérêt général établis dans d’autres États membres constitue une restriction à la liberté de circulation des capitaux, car elle est susceptible d’affecter de façon significative l’attitude du donateur.
La Cour écarte ensuite toute justification avancée pour cette restriction.
En particulier la Cour réfute l’argument selon lequel cette mesure serait justifiée par le fait que seuls les organismes d’intérêt général établis dans l’État membre du donateur déchargent cet État de ses missions traditionnelles et partant lui permettent de réaliser des économies budgétaires. En effet, la nécessité de prévenir la réduction des recettes budgétaires ne peut pas constituer une raison impérieuse d’intérêt général pouvant justifier une entrave à la libre circulation des capitaux. Certes, la Cour reconnaît qu’un État membre peut limiter l’application de la déduction fiscale aux dons versés au profit des seuls organismes d’intérêt général poursuivant certains objectifs spécifiques visés par sa propre législation. En effet, le droit communautaire n’impose pas aux États membres de faire en sorte que les organismes étrangers reconnus d’intérêt général dans leur État membre d’origine bénéficient automatiquement de la même reconnaissance sur leur territoire. Cependant, lorsqu’un organisme reconnu d’intérêt général remplit les conditions imposées par la législation de l’État du donateur, il ne saurait faire l’objet de discrimination au seul motif qu’il n’est pas établi sur le territoire de cet État.
En outre, la législation contestée ne peut pas être justifiée par la nécessité de préserver l’efficacité des contrôles fiscaux. En effet, les autorités fiscales concernées peuvent exiger du contribuable les preuves qu’elles jugent nécessaires pour apprécier si les conditions de déductibilité de dépenses sont réunies. La Cour estime également qu’il n’est pas contraire au principe de proportionnalité de contraindre l’État membre du donateur de vérifier ou de faire vérifier le respect des conditions imposées aux organismes d’intérêt général concernés, le cas échant, en ayant recours au mécanisme de coopération entre les autorités fiscales des États membres mis en place par la directive 77/799 portant sur l’assistance mutuelle des autorités compétentes des États membres dans le domaine des impôts directs. Dans cette perspective, la Cour précise que les États membres ne sont pas obligés d’accorder le même traitement aux organismes d’intérêt général établis dans des pays tiers, lorsqu’il n’existe pas de mécanismes analogues à celui prévu par ladite directive, permettant de recueillir les informations nécessaires sur ces organismes.
(Merci à Nicole Vaucheret-Fondeneige qui m’a signalé cet arrêt)
Article 200 du code général des impôts (disposition introduite par la loi n° 2009-1674 du 30 décembre 2009 de finances rectificative pour 2009 [article 35])
4 bis. Ouvrent également droit à la réduction d'impôt les dons et versements effectués au profit d'organismes agréés dans les conditions prévues à l'article 1649 nonies dont le siège est situé dans un Etat membre de l'Union européenne ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales. L'agrément est accordé lorsque l'organisme poursuit des objectifs et présente des caractéristiques similaires aux organismes dont le siège est situé en France répondant aux conditions fixées par le présent article.
Lorsque les dons et versements ont été effectués au profit d'un organisme non agréé dont le siège est situé dans un Etat membre de l'Union européenne ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales, la réduction d'impôt obtenue fait l'objet d'une reprise, sauf si le contribuable produit, à la demande de l'administration fiscale, les pièces justificatives attestant que cet organisme poursuit des objectifs et présente des caractéristiques similaires aux organismes dont le siège est situé en France répondant aux conditions fixées par le présent article.
Un décret fixe les conditions d'application du présent 4 bis et notamment la durée de validité ainsi que les modalités de délivrance, de publicité et de retrait de l'agrément.