Le 13 octobre, à l’occasion de la discussion du projet de loi de finances pour 2021, l’Assemblée nationale a adopté un amendement apportant plusieurs aménagements à la réforme de la fiscalité des non-résidents.
Adopté à l’initiative de la députée de la 11ème circonscription des Français établis hors de France, Anne Genetet, et du rapporteur général de la commission des finances, Laurent Saint-Martin, cet amendement prévoit le maintien du caractère partiellement libératoire de la retenue à la source spécifique (RAS) applicable aux revenus d’activité et de remplacement de source française perçus par les non-résidents. Prévue par la loi de finances pour 2019, la suppression du caractère partiellement libératoire de la RAS était censée entrer en vigueur le 1er janvier 2021.
L’amendement prévoit également la suppression de la disposition – adoptée en 2018 et modifiée en 2019 – prévoyant le remplacement, à compter du 1er janvier 2023, de la RAS par le prélèvement à la source (PAS) de droit commun.
En 2021, les traitements publics, les salaires, les pensions et les rentes viagères ne seront pas imposés dès le premier euro. Ils demeureront soumis à la RAS aux taux de 0% (fraction du salaire net annuel inférieure à 15.018 euros) [1], 12% (de 15.018 euros à 43.563 euros) [2] et 20% (au-delà de 43.563 euros) [3]. La retenue à la source aux taux de 0% et 12% continuera d’être libératoire de l’impôt sur le revenu. Seule la fraction soumise au taux de 20% continuera d’être imposée – avec les autres revenus de source française imposables en France – au barème progressif de l’impôt sur le revenu, mais avec application du taux minimum (20% pour la fraction du revenu net imposable inférieure ou égale à 27.519 euros et 30% pour la fraction supérieure à 27.519 euros).
Les contribuables auront toujours la possibilité de bénéficier de l’application du taux moyen (ce taux n’est appliqué que s’il est favorable au contribuable).
Dans tous les cas, la retenue prélevée au taux de 20% continuera d’être imputable sur le montant de l’impôt sur le revenu.
Par ailleurs, si le montant de la RAS excède l’impôt dû après application du taux moyen, les contribuables auront toujours la possibilité de demander le remboursement de l’excédent de RAS en produisant un justificatif du paiement de cette retenue par le débiteur (employeur, caisse de retraite, etc.). Selon la direction des impôts des non-résidents (DINR), « une expertise est en cours sur les moyens […] de simplifier les restitutions des excédents de retenues à la source ».
La réforme de la fiscalité des non-résidents se résume désormais à:
1) l’application d’un taux minimum de 30% (le Gouvernement n’est pas favorable à la suppression de ce taux, qui « serait favorable à certains des contribuables non-résidents les plus aisés » [4]) ;
2) la prise en considération des pensions alimentaires pour le calcul du taux moyen d’imposition (le bénéfice de ce dispositif est conditionné au fait que les pensions versées sont imposables en France et qu’elles n’ont pas déjà donné lieu, pour le contribuable, à un avantage fiscal dans son État de résidence) [5] ;
3) l’extension du bénéfice du dispositif dit « Pinel » aux non-résidents (possibilité, pour les contribuables ayant réalisé un investissement locatif alors qu’ils étaient fiscalement domiciliés en France, de conserver le bénéfice de l’avantage fiscal pour les années restant à courir après leur départ à l’étranger) [6].
Le rétablissement du statu quo ante n’est pas pleinement satisfaisant, tant du point de vue des usagers que de celui des collecteurs. Les modalités d’imposition des revenus de source française des non-résidents vont demeurer extrêmement complexes et difficilement compréhensibles. Une solution pourrait consister à mettre en place un barème spécifique - qui se substituerait aux modalités d’imposition actuelles - tout en veillant à ce qu’une telle réforme ne fasse pas de perdants et ne crée pas de nouvelles complexités.
Il conviendrait également de concrétiser deux propositions formulées par le Gouvernement, à savoir l’amélioration des outils de simulation actuels (« la possibilité d’exploiter le simulateur actuel destiné aux résidents pour permettre aux non-résidents d’estimer leur niveau d’imposition, avec l’établissement d’un pas à pas pour les guider dans leur démarche, est actuellement à l’étude ») et la facilitation du recours au régime dit « Schumacker » (possibilité, pour les non-résidents, de solliciter l’application du régime en annexant à leur déclaration de revenus « une déclaration sur l’honneur indiquant le montant des revenus mondiaux perçus et attestant du respect des conditions » d’accès au régime [les justificatifs seraient produits a posteriori, sur demande de l’administration fiscale] ; reconduction tacite du régime [elle serait possible « lorsque le contribuable en a bénéficié deux ou trois années consécutives ou lorsque le contribuable a bénéficié de ce régime une année et dispose d’un contrat de travail à durée indéterminée ou d’une pension de retraite »]).
__________
[1] La fraction taxée à 0% est actuellement celle inférieure à 14.988 euros.
[2] La fraction taxée à 12% est actuellement celle comprise entre 14.988 euros et 43.477 euros.
[3] La fraction taxée à 20% est actuellement celle supérieure à 43.477 euros.
[4] Rapport du Gouvernement relatif à la fiscalité appliquée aux revenus de source française des contribuables fiscalement domiciliés hors de France.
[5] Les pensions alimentaires s’imputent sur l’ensemble des revenus mondiaux servant de base de calcul au taux moyen et doivent être mentionnées sur le formulaire 2041 TM lors de la déclaration des revenus souscrite par le non-résident qui les verse.
[6] Sont concernés les investissements réalisés à compter du 1er janvier 2019.