Le 15 mars, j'ai interpellé le garde des sceaux, M. Michel MERCIER, au sujet des enfants franco-japonais privés des liens avec leur parent français.
Vous trouverez, ci-dessous, le texte de la lettre que je lui ai adressée. (Des précédents articles sur le sujet en bas de page)
Monsieur le Ministre,
Je me permets d’attirer votre attention sur les difficultés rencontrées par certains ressortissants français pour exercer au Japon leurs droits parentaux après un divorce d'avec un ressortissant japonais.
Une trentaine de nos concitoyens sont actuellement privés de tout contact avec leur(s) enfant(s) en raison de l'application de la législation nippone en matière de droit de la famille, qui ne reconnaît pas le partage de l'autorité parentale après un divorce et limite le droit de visite à l'appréciation du juge aux affaires familiales.
Cette situation est compliquée par le fait que le Japon ne sanctionne pas les déplacements illicites d’enfants et qu’il n’a pas encore signé la convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfant.
Grâce aux efforts de nos diplomates, un comité de consultation franco-japonais sur l'enfant au centre d'un conflit parental a été mis en place le 1er décembre 2009 afin de faciliter les échanges et le partage d’informations et de permettre la transmission des documents (lettres, photos, etc.). La cinquième réunion de ce comité s’est tenue le 9 décembre dernier.
Pour ma part, j’ai fait adopter par le Sénat, le 25 janvier 2011, une proposition de résolution destinée à attirer l’attention des autorités nippones sur la nécessité de reconnaître aux enfants franco-japonais le droit de conserver des liens avec chacun de leurs parents.
Faisant écho à la résolution que la Chambre des représentants américaine a adoptée le 29 septembre 2010, cette initiative parlementaire a eu pour effet d’inciter le Japon à annoncer, le 20 mai dernier, son intention d’adhérer à la convention de La Haye. Je m’étais alors félicité de cette avancée.
Aujourd’hui, je crains fort que les autorités japonaises ne vident la convention de son sens en donnant une interprétation extensive à la notion d’exception au retour immédiat de l’enfant dans l’État dans lequel il avait sa résidence habituelle avant son déplacement illicite (article 13).
Le 13 décembre dernier, Mme Nathalie ANCEL, sous-directrice de la protection des droits des personnes au ministère des affaires étrangères et européennes, m’avait indiqué que la Conférence de La Haye de droit international privé (CODIP), qui a notamment pour mission d’aider à la bonne mise en œuvre des conventions de La Haye, devra se prononcer sur ce point afin de déterminer si le Japon peut adhérer à la convention du 25 octobre 1980.
Compte tenu de la volonté affichée par le gouvernement japonais de faire voter, au mois de juin, une loi d’adaptation du droit de la famille, je pense qu’il conviendrait d’adopter une démarche proactive, au nom de l’intérêt supérieur des enfants franco-japonais.
À cet effet, je vous serais très reconnaissant de bien vouloir demander à l’Autorité centrale française – le bureau de l’entraide civile et commerciale internationale – de saisir le Bureau permanent de la Conférence de La Haye de droit international privé afin que celui-ci transmette aux autorités nippones le guide des bonnes pratiques et leur rappelle que le recours aux exceptions définies de manière exhaustive par la convention du 25 octobre 1980 doit être aussi limité que possible.
Vous remerciant d’avance pour l’attention que vous voudrez bien porter à ma demande, je vous prie de croire, monsieur le Ministre, à l’expression de ma haute considération.
Richard YUNG
Certains des précédents articles sur le sujet
Enfants binationaux au centre d’un conflit parental: entretien avec Mme ANCEL (DFAE)
Rencontre avec M. Ikuo Yamahana, vice-ministre parlementaire des affaires étrangères du Japon
Réunion de crise sur la situation des enfants franco-japonais
Adhésion du Japon à la convention de La Haye
Intervention en séance sur les enfants franco-japonais