Le 1er octobre, à l’occasion de la discussion du projet de loi de modernisation de notre système de santé, le Sénat a examiné trois amendements relatifs à la Caisse des Français de l’étranger (CFE) que Jean-Yves Leconte, Hélène Conway-Mouret, Claudine Lepage et moi-même avions déposés.
Le premier amendement concernait le remboursement des soins dispensés à l’étranger aux expatriés affiliés à la CFE.
Actuellement, ce remboursement est calculé sur la base des dépenses réellement exposées, dans la limite des tarifs appliqués en France. Or, dans certains pays, les frais engagés sont beaucoup plus élevés qu’en France. Il s’ensuit que de nombreux assurés volontaires doivent supporter un reste à charge important.
De plus, pour ce qui concerne les frais d’hospitalisation, le remboursement s’effectue sur la base des frais réels dans la limite des tarifs fixés par un arrêté du 9 février 1978. Or, ces tarifs plafonds sont égaux aux prix de journée applicables dans les établissements de l’Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP), minorés de 30%. Ce dispositif est obsolète. Il a été abandonné en France à partir de 1984. Par ailleurs, il produit des effets fortement inflationnistes. En effet, en retenant les patients au-delà de la durée de séjour nécessaire, les établissements de santé peuvent percevoir une rémunération supérieure au coût réel du séjour.
Afin d’améliorer la prise en charge des soins dispensés aux adhérents à la CFE, nous proposions de créer un dispositif additionnel consistant en un remboursement sur la base des frais réels, dans la limite de tarifs négociés par la CFE. À défaut d’accord tarifaire, le dispositif des prix de journée continuerait de s’appliquer.
Le deuxième amendement concernait les entreprises qui assurent leurs salariés expatriés à la CFE.
Ces entreprises bénéficient de nombreux avantages au titre des assurances maladie et accidents du travail. Leur taux de cotisation est modulé selon le nombre de salariés expatriés. Plus ce nombre est important, moins les cotisations sont élevées. De plus, elles se voient accorder des ristournes et abattements (ristourne sur la cotisation d’assurance maladie pour les jeunes expatriés; abattement du taux de la cotisation d’assurance accidents du travail pour les entreprises qui adhèrent à la fois à l’assurance accidents du travail et à l’assurance maladie; etc.).
Force est de constater que les entreprises de plus de 400 salariés sont celles qui bénéficient le plus de ces avantages. Les petites et moyennes entreprises sont, quant à elles, moins bien traitées, en particulier celles de moins de 10 salariés.
Cette situation apparaît en décalage avec le profil des Français établis hors de France. En effet, la crise économique s’est traduite par une baisse du nombre d’expatriés de grandes entreprises et une augmentation du nombre de Français de l’étranger travaillant sous contrat local. On assiste également à un accroissement du nombre de créateurs de PME établis à l’étranger. En d’autres termes, l’expatriation s’inscrit de plus en plus souvent dans le cadre d’un projet individuel.
Il importe que la CFE adapte sa politique tarifaire à cette nouvelle réalité de l’expatriation. Elle doit notamment réorienter ses avantages tarifaires vers les PME. C’est la raison pour laquelle nous proposions d’encadrer les ristournes accordées aux entreprises mandataires de leurs salariés. Nous souhaitions ainsi concrétiser une recommandation que l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) et l’inspection générale des finances (IGF) ont formulée dans un récent rapport.
Enfin, le troisième amendement concernait les pensionnés affiliés à la CFE.
De plus en plus de Français s’expatrient au moment de leur retraite. Ce phénomène, qui ne concerne pas uniquement la France, se reflète dans le fichier des adhérents à la CFE. En 2013, le nombre d’assurés retraités a ainsi augmenté de 4%. Par ailleurs, ce phénomène s’inscrit dans la problématique plus large des adhésions tardives. En effet, parmi les pensionnés qui adhèrent tardivement à la CFE figurent aussi des personnes qui vivaient déjà à l’étranger avant de prendre leur retraite, mais étaient couvertes par une autre assurance volontaire.
Cette situation est préoccupante car elle fait peser un risque sur l’équilibre financier de la CFE. La catégorie des pensionnés est en effet structurellement déficitaire pour ce qui concerne le risque maladie (-4,2 millions d’euros en 2013). Cette situation est d’autant plus préoccupante que la réglementation européenne permet à tout ressortissant d’un autre État membre de l’Union d’adhérer à la CFE.
Afin de préserver l’équilibre financier de la caisse, il convient de permettre à la CFE de moduler les taux de cotisation en fonction du profil des retraités. Dans cette perspective, nous proposions de créer deux catégories d’assurés: les pensionnés qui ont été adhérents à la CFE avant leur retraite et les pensionnés qui n’ont jamais cotisé au préalable à la CFE.
Je regrette que ces amendements n’aient pas été adoptés. Comme lors de la discussion de notre proposition de loi visant à réformer la gouvernance de la CFE, nous nous sommes heurtés au refus de la droite sénatoriale de faire évoluer le fonctionnement de la CFE. J’espère que le Gouvernement donnera suite à un certain nombre des 11 recommandations du rapport IGAS-IGF.