Le 26 mai, j’ai adressé au ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, une lettre relative aux entreprises françaises à l’étranger.
Monsieur le Ministre,
Je souhaite attirer votre attention sur les écosystèmes entrepreneuriaux français à l’étranger.
À l’instar des entreprises immatriculées en France, les entreprises de droit étranger créées et détenues par des Français établis hors de France sont frappées de plein fouet par la crise liée à la pandémie de COVID-19. Or, comme vous le savez, ces entreprises constituent un véritable atout pour le rayonnement et l’attractivité de la France. Certaines d’entre elles sont rattachées aux communautés « French Tech », qui sont une formidable vitrine des talents français.
Depuis le début de la crise sanitaire mondiale, les remontées du terrain font état de situations alarmantes. Faute d’un soutien suffisant au niveau local, de nombreuses entreprises françaises à l’étranger sont actuellement sur une ligne de crête.
À Bangalore, un propriétaire de cafés « à la française » a épuisé sa trésorerie et cherche à vendre une partie de ses actions en vue de sauver son entreprise et payer ses salariés.
À Manille, le fondateur d’une société de conseil n’a plus aucune rentrée d’argent. Contraint d’utiliser ses économies pour rémunérer ses collaborateurs, il craint de devoir mettre la clé sous la porte dans deux ou trois mois.
La même crainte taraude cet entrepreneur français qui, il y a tout juste deux ans, a créé une société de maintenance et dépannage à Luang Prabang.
À Colombo, la propriétaire d’un restaurant-épicerie a dû réduire drastiquement les salaires de ses employés. La survie de son entreprise n’est pas pour autant assurée. Or, elle n’a malheureusement pas la possibilité d’obtenir un crédit de trésorerie à un coût abordable auprès d’une banque srilankaise.
Ces quelques exemples soulignent l’impérieuse nécessité d’apporter un soutien aux TPE et PME de droit local qui ne sont pas filiales ou succursales de groupes français. Les montants en jeu sont relativement faibles.
Lors de son audition devant la commission des affaires étrangères du Sénat, le directeur général de l’Agence française de développement, Rémy Rioux, a indiqué avoir proposé au Gouvernement de renforcer le dispositif ARIZ, qui permet à Proparco de proposer à des institutions financières privées une garantie pour couvrir un prêt individuel ou un portefeuille de prêts aux PME. Le relèvement de 50% à 80% du niveau de la garantie serait bienvenu. Il devrait, à mon sens, être complété par d’autres mesures d’urgence.
À l’occasion de la discussion du deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2020, j’avais déposé un amendement visant à créer un fonds de soutien doté de 50 millions d’euros, dont les critères d’éligibilité serait calqués sur ceux prévus par l’ancienne assurance prospection des Français de l’étranger, qui avait été expérimentée entre 2005 et 2010 (entreprises détenues majoritairement et gérées par des Français inscrits au registre des Français établis hors de France ; entreprises à vocation industrielle, commerciale ou de service ; chiffre d’affaires inférieur à 150 millions d’euros ; activité et capacité permettant le développement des exportations d’origine française).
D’autres solutions sont envisageables, dont celles émanant des chambres de commerce et d’industrie françaises à l’étranger :
- extension du dispositif de prêt garanti par l’État aux entreprises françaises à l’étranger ;
- ouverture aux entreprises françaises à l’étranger des prêts de soutien à la trésorerie gérés par Bpifrance (prêt rebond et prêt atout) ;
- prise en charge financière, par l’État, de volontaires internationaux en entreprise;
- mise en place de dispositifs de mentorat, en lien avec les acteurs locaux du développement économique ;
- mise à disposition des entreprises françaises à l’étranger des outils de promotion de l’attractivité de la France développés par Atout France ;
- facilitation du déploiement du label « French Tech ».
Toutes ces propositions ont pour objet de permettre à celles et ceux de nos compatriotes qui sont partis à la conquête de l’international de traverser la tempête sans trop de dommages. Aussi, je vous serais très reconnaissant de bien vouloir les étudier avec attention.
Vous remerciant d’avance pour votre réponse, je vous prie de croire, monsieur le Ministre, à l’expression de ma haute considération.
Richard YUNG