Nous avons reçu récemment Laurent Fabius au groupe socialiste au Sénat pour parler de la réforme des collectivités territoriales. Cette réforme consiste en plusieurs textes souvent complexes qui couvrent la modification du calendrier électoral pour les conseillers régionaux et généraux, l’élection de conseillers territoriaux qui seront tout à la fois conseillers généraux et régionaux, le redécoupage des cantons. A cela il faut ajouter la réforme de la taxe professionnelle qui devra être compensée par les taxes locales.
L’objectif avoué serait de réduire le nombre et donc le coût des élus, trop nombreux et de simplifier la structure administrative. Mais au-delà de ces arguments populistes, l’objectif réel est de reprendre le plus grand nombre de collectivités à la gauche et de réduire au silence ceux et celles qui revendiquent leur indépendance.
Avec beaucoup de clarté dans un dossier difficile, Laurent Fabius a souligné les aspects suivants :
- Il s’agit d’une recentralisation puisque les collectivités vont perdre en liberté et en indépendance financière. Les préfets vont reprendre le pouvoir. Par exemple, à l’avenir, ils décideront des regroupements de communes et territoires. La clause de compétence générale disparait.
- C’est une tentative de reporter la charge financière sur les collectivités locales et donc finalement sur les ménages. La suppression de la taxe professionnelle est compensée pour moitié : cela veut dire qu’il manquera 12 milliards d’euros à financer – ou pas – par les collectivités locales. Les services publics locaux seront remis en cause : aide à l’enfance, écoles, sport, culture sans compter les grands transferts comme le RMI, l’APA, le RSA, …
- L’expérience du redécoupage pour les législatives nous laisse sceptiques sur la finalité de celui des cantons : il s’agit de reprendre du terrain sur la gauche qui a toujours eu des positions locales et régionales fortes. Pour cela un mode de scrutin original en France est mis en avant : le scrutin uninominal à un tour. C’est le système britannique qui favorise ceux qui se présentent unis alors que la tradition française est celui du scrutin à deux tours, le deuxième tour permettant le rassemblement (en particulier pour la gauche). 80% des conseillers seraient élus à ce scrutin, 20% étant élus à la proportionnelle. Avec ce scrutin appliqué aux résultats du vote cantonal de 2008, 10% des élections auraient donné un résultat inverse dont 9O% en faveur de l’UMP.
Le Conseil d’État a du reste émis un avis défavorable sur ce mode de scrutin et sur le calendrier.
Le PS lui met en avant une autre réforme qui serait le troisième étage de la décentralisation après les lois Defferre et Raffarin et qui comporterait le développement de l’intercommunalité, la mise en place d’une structure de métropole, le rééquilibrage de la fiscalité avec une partie de ressources propres pour les collectivités locales et une taxe professionnelle assisse sur la valeur ajoutée des entreprises et une taxe d’habitation basée sur les revenus.