C’est un gros pavé de plus de 600 pages publié au Seuil sur les deux dernières années du Reich. L’auteur est un spécialiste bien connu d’Hitler (il a écrit une biographie monumentale) et de l’Allemagne national-socialiste.
Dans ce dernier ouvrage, il s’interroge sur les raisons qui permis au Reich de tenir aussi longtemps et, pour les derniers mois, dans des conditions militaires, politiques, matérielles absolument épouvantables. Le débarquement de Normandie a eu lieu, l’Afrique du Nord a été reprise, le front russe est en pleine débandade. N’importe qui pouvait comprendre que l’Allemagne avait perdu toute chance de gagner la guerre ou même de négocier quoique ce soit. L’auteur détaille les mesures de répression permanentes, sans cesse durcies, embrigadement idéologique des citoyens et des militaires, la collusion de la haute hiérarchie militaire avec le nazisme. Il montre aussi les luttes d’influence entre Goebbels, Bormann, Speer (ministre de l’armement), Himmler pour gagner la confiance d’Hitler. Le rôle et la position de quasi démiurge de celui-ci explique aussi l’impossibilité qu’avait le peuple allemand de s’opposer à lui. D’autant qu’il faisait miroiter l’arrivée « d’armes nouvelles » qui allaient changer le cours de la guerre.
Mais les deux raisons les plus importantes que donne Kershaw sont l’attentat de Von Stauffenberg en juillet 1944 qui fut considéré par la totalité des militaires (et sans doute les civils) comme un coup de poignard dans le dos de la nation en guerre et suscita, au contraire de l’objectif, un mouvement de solidarité vers le Führer. L’autre raison est l’annonce faire tôt dans la guerre par les Alliés (et Churchill en premier) que la seule issue pour eux était « la capitulation générale sans conditions » du Reich. Du même coup, toute possibilité d’armistice ou d’accord de quelque sorte étaient fermés et laissaient les chefs nazis sans aucune autre perspective que de soutenir et disparaître avec Hitler.