Nous sommes nombreux à être désemparés devant la situation en Palestine occupée.
Depuis tant d’années, près de 50 pour ce qui me concerne, les cessez le feu ont succédé aux guerres ou aux actions violentes. Il y a eu des actions terroristes puis les deux Intifada.
Des négociations de paix ont débuté un nombre incalculable de fois, certaines comme celle de Camp David (Sadate - Begin) ont abouti. D’autres, celle d’Oslo, ont été à deux doigts de réussir.
Chaque fois que l’on se rapproche d’un accord, il y a un extrémiste pour massacrer des innocents, comme à Hébron, ou pour assassiner Sadate ou Rabin.
C’est pourquoi nous demeurons silencieux, conscients de la faible portée de nos paroles et craignant une nouvelle fois la déception. Non ce n’est pas de l’indifférence : ceux qui connaissent la région ne peuvent être insensibles aux camps de réfugiés palestiniens le long de la mer au nord Liban, où plusieurs générations ont vécu et vivent sous les tentes de l’UNWRA sans possibilité de travailler ni de partir. Pas d’indifférence non plus devant le mur construit par les Israéliens pour séparer les terres qu’ils se sont appropriées et celles laissées aux Palestiniens. Pas d’indifférence devant les colonisations qui se développent chaque jour, grignotant les terres palestiniennes et transformant ces territoires en patchwork absolument ingérables. Pas d’indifférence non plus devant les refus ou les violations sans fin des accords et des résolutions de Nations unies par Israël.
Sans rentrer dans le parallélisme tentant, nous devons aussi dénoncer le comportement des différents groupes palestiniens qui refusent tout accord même provisoire, les liens et l’implication militaire des Iraniens aux côtés du Hamas, la prise en otage des populations civiles à Gaza, la construction de tunnels sous les frontières pour alimenter l’enclave, y compris en armement, mais aussi pour servir à des attaques terrestres contre Israël, l’immaturité politique qui conduit à l’autonomisation de la branche armée du Hamas (les brigades El Kassem) qui ne rendent plus compte à la direction politique. Une pensée aussi à nos amis français ou francophones qui vivent sous la menace d’attaques de roquettes ou d’actions terroristes.
Tout ceci bien sûr renforce le sentiment que le droit d’Israël à vivre sur une terre dotée de frontières sûres, en paix avec ses voisins passe par la force car les bonnes paroles de grandes puissances ne garantissent rien.
Les attaques de Tsahal contre la population de Gaza ces dernières semaines sont particulièrement révoltantes : la disproportion de force est telle qu’elle blesse l’équité, le bombardement de civils en grande quantité, alors qu’il ne s’agit pas d’une guerre, d’écoles de l’ONU ou autres parfaitement identifiées sur les cartes, la mort répétée d’enfants et d’élèves, le blocage complet des frontières côté Israël et égyptien (Rafah) font de Gaza une prison mortelle sans espoir.
Sur le plan politique, il n’y a guère d’espoir de négociations entre un Likoud fier et dominateur et un Hamas qui prospère sur les violences israéliennes. L’Autorité palestinienne avec le Fatah de Mahmoud Abbas, qui a pourtant fait tout le travail de reconnaissance d’Israël et de recours à la paix, n’a plus rien à offrir et, à vrai dire, le Hamas guère plus.
Sur le plan diplomatique la seule puissance régionale, l’Egypte, est maintenant complètement sous contrôle politique américain et sous transfusion financière saoudienne. Le Congrès américain continue d’être dominé (républicains et démocrates) par une ligne de soutien primaire à Israël et par la méfiance vis-à-vis du monde arabe. Il y a quelques jours ce même Congrès a voté une extension de l’aide militaire à Israël avec seulement 3 voix contre. C’est pourquoi la seule puissance qui pourrait contraindre Israël à rechercher la paix ne fera rien : le président Obama est impuissant sur ce dossier.
Les choses sont plus subtiles en Europe et en France où il existe un mouvement de soutien au peuple palestinien et un désir de restreindre la toute puissance d’Israël tout en réitérant le droit et la garantie de celui-ci d’exister. C’est la ligne du PS depuis François Mitterrand et son discours à la Knesset en mars 1982. Mais cette ligne n’émerge pas politiquement et reste impuissante. Les récentes prises de position françaises sans être critiquables sont très en retrait, donnent l’impression de donner un blanc seing à Israël et de ne condamner les tueries de civils que du bout des lèvres. Il faut un engagement beaucoup plus ferme du côté français et européen.
Je ne suis pas diplomate ni expert en relations internationales : je suis bien en peine de proposer un chemin, une voie pour aller vers sinon la paix du moins la non belligérance.
Le plus probable, après cette boucherie, reste le statu quo. Aucun problème ne sera résolu, le blocus sera maintenu, les négociations du Caire échoueront, Israël demandant la démilitarisation de Gaza, ce qui est inacceptable pour le Hamas. Et une nouvelle crise, une nouvelle tuerie viendra.
Une solution existe pour faire avancer la négociation. Ce serait la mise en place d’une force d’interposition des Nations unies, entre les deux belligérants, le long des frontières de Gaza et d’Israël y compris côté mer. Ces casques bleus seraient la garantie qu’il n’y ait pas d’opération militaire ni roquettes ni bombardements des deux côtés et créeraient les conditions de négociations sérieuses. C’est un modèle qui fonctionne entre le Liban, la Syrie et la frontière nord d’Israël, du moins pour le volet militaire et sécurité. Pour cela il faudrait une résolution du Conseil de sécurité qui soit soutenue par les États-Unis, les membres permanents et l’Europe : est-ce possible ?
À plus long terme et malgré les difficultés inouïes que cela soulève (reconnaissance des deux entités, définition des frontières, statut des réfugiés, statut d’Al Qods et Jérusalem, partage des eaux, ...), je ne vois pas d’autres solutions que la création de deux États regroupant ceux qui le souhaiteront.
Ce que je sens par contre c’est que la situation en Palestine est le foyer de toutes les guerres, de tous les fanatismes qui empoisonnent les relations dans le monde et servent de substrat à tous les terrorismes et si comme maintenant aucune solution n’est proposée, alors Israël ira de difficultés en difficultés et de drames en drames, et nous avec.
Je ne sais si quelque part existe un Sadate capable de faire le voyage à Jérusalem, un Begin capable de signer un traité de paix ave l’Egypte, un Rabin capable d’arriver à un accord de paix avec Arafat, mais je souhaite que l’un d’eux émerge d’un des pays ou mieux encore des deux. La paix ne viendra pas des États-Unis impuissants ni de l’Europe qui ne sait plus peser dans les affaires du monde, mais de ceux qui vivent sur cette terre d’Orient d’où vient notre civilisation.