Le 23 janvier 2019, Juan Guaido, président du Parlement du Venezuela, s’est autoproclamé président du pays. Pour lutter contre le régime dictatorial en cours, il appelle à l’organisation de nouvelles élections libres et transparentes. Le président actuel Nicolas Maduro rejette l’ultimatum. Conséquence immédiate ; une crise politique d’envergure mondiale.
Ainsi se crée une bataille diplomatique et stratégique internationale, et si pour certains États il s’agit véritablement de soutenir la démocratie, pour d’autres, leurs déclarations ne sont qu’un calcul géopolitique. Immédiatement soutenue par les Etats-Unis, cette présidence en intérimaire ne fait pas l’unanimité, sans surprise, en Chine et en Russie – principaux créanciers du Venezuela. Vassily Nebenzia (ambassadeur russe à l’ONU) a même accusé les États-Unis d’être l’auteur de ce « coup d’État ».
Loin d’être une simple guérilla entre Maduro et l’opposition, la suite des événements déterminera la voie de la transition démocratique. Les soutiens internationaux sont ainsi primordiaux pour organiser des nouvelles élections. Le Parlement Européen a reconnu la présidence de Guaido le 31 janvier et a invité les autres pays européens à en faire de même.
Pourtant, l’Union ne parle pas d’une seule voix. Si la France, l’Espagne, le Portugal, le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Autriche, et les Pays-Bas ont déclaré sans équivoque leur soutien. L’Italie refuse en affirmant que Guaido n’a pas été élu par le peuple. Pire encore, la Grèce soutient fermement Maduro. Des pays comme la Belgique et l’Irlande sont plus mesurés : ils souhaitent la mise en place d’élections libres et équitables mais ne reconnaissent pas la présidence de Guaido. Une Union Européenne fondée sur les valeurs de l’État de droit, et qui n’arrive pas à faire s’entendre ses États membres sur une évidence démocratique n’est pas opportune. Les prudentes déclarations de Federica Mogherini (Haute représentante de l’UE pour les affaires étrangères) illustrent le manque de pouvoir de contrainte de l’Union, et la fragilité des disparités.
Les divergences consistent aussi en la question du respect du droit international public. Le Kremlin parle « d’ingérence directe et indirecte dans les affaires intérieures du Venezuela ». Les pays soutenant Guaido condamnent la violation de l’État de droit, de la démocratie et des droits de l’Homme. Ils utilisent des contraintes économiques pour justement faire respecter le droit. Y a-t-il ingérence ? L’interdiction de l’ingérence s’entend par l’emploi de la force armée et la Cour Internationale de Justice l’a rappelé dans sa jurisprudence. La reconnaissance ici d’un gouvernement (contrairement à celle d’un État) n’est pas réglementée par le droit international public et constitue un choix purement politique qui ne peut être qualifié d’illégal – preuve du refus de reconnaissance en 2018 de la réélection de Maduro. Enfin se pose la question de l’aide humanitaire proposée à Guaido par ses soutiens et de la manière dont elle pourrait être distribuée. Si un État fournit une aide par l’emploi de la force armée, cela constitue une ingérence. La seule possibilité serait une résolution de l’ONU qui se heurterait évidemment à un veto russe et chinois.
Les jours à venir constituent un tournant clef pour l’histoire du Venezuela et sa population face à leur avenir politique, économique et social.