Avec le Coronavirus, la demande mondiale de pétrole a fait une véritable chute vertigineuse. La Chine à elle seule, représente 13,7% de la consommation mondiale de pétrole mais depuis le début de la pandémie avec la restriction de l’export et le ralentissement de la production, l’industrie pétrolière encaisse un coup brutal. La décroissance de la demande mondiale est due à plusieurs facteurs, principalement la saturation du marché et le Covid-19.
L’effondrement du cours du pétrole remonte à début mars quand le Covid-19 est devenu officiellement un problème planétaire. Le 9 mars 2020, le cours du pétrole précipite le prix du baril à 33,87 dollars, un niveau inédit depuis 2016. En Asie, on enregistrait une chute jusqu’à 30% des prix du brut. Les marchés financiers en alerte, l’Arabie saoudite mène alors une véritable guerre des prix. La Russie refusant de concéder son marché et de réduire sa production, on voit alors les 3 puissances pétrolières (États-Unis, Russie, Arabie saoudite) dans l’impasse d’un accord.
Le marché de l’or noir a connu une précédente crise de 2014 à 2016. Effectivement au cours de l’été 2014, le prix du pétrole baisse significativement jusqu’en 2016. Cette réduction des prix était due à un déséquilibre sur le marché pétrolier ; en effet la production pétrolière mondiale était en surproduction au cours de ces deux années, l’offre étant supérieure à la demande.
Évidemment, les phénomènes de mondialisation, un contexte géopolitique et économique tendu avec en plus la pandémie entrainent aujourd’hui une crise beaucoup plus profonde que la précédente.
C’est vers la fin du mois de mars que le coup de grâce est donné : le baril de pétrole passe sous la barre des 20 dollars à New York ! En France, les consommateurs ont pu réaliser une baisse au niveau des prix à la pompe en affichant une réduction de 20 centimes le litre de diesel, un record depuis 2017. Peut-être pour le plus grand bonheur des gilets jaunes ?
Finalement, ce n’est que mi-avril qu’on voit la situation s’améliorer doucement avec notamment l’accord historique de l’Opep et ses partenaires. L’objectif : faire remonter les prix du pétrole en pleine pandémie de Covid-19, en dépit des tensions entre la Russie et l’Arabie saoudite. Le consensus entre les puissances pétrolières comprend une baisse de production de 9,7 millions barils de pétrole à partir de mai.
Toutefois, la crise de l’industrie pétrolière est loin d’être finie. On pense notamment aux pays en développement qui sont des véritables victimes économiques de la pandémie. En effet le continent africain avec l’Algérie, le Nigéria ou encore l’Angola dépendent du marché de l’or noir et sont impactés fortement par le conflit entre Riyad et Moscou. L’Irak, l’Iran, la Libye ou encore le Venezuela sont également concernés. L’Algérie dépend presqu’entièrement de ce marché avec 95% de ses exportations issues du pétrole et du gaz. La situation déjà fragilisée avec le nouveau régime et le Hirak, rendrait la prochaine crise sociale et économique beaucoup plus violente post-Corona. Si les cours de pétrole ne remontent pas dans le bon sens, et ceci malgré une légère remontée ces dernières semaines (environ 30 dollars le baril de Brent), ces prix restent très loin des prix retenus pour le calcul du budget et auront pour conséquence des mesures d’austérité terribles pour les populations de ces pays.
L’Irak en est l’illustration. En plus de la crise politique, des menaces terroristes quotidiennes et de la crise sanitaire et économique, l’effondrement du cours de pétrole a entrainé un taux record de pauvreté dans le pays. Tout comme les autorités kurdes, l’Irak s’est déclaré incapable de payer ses fonctionnaires. En effet, la fonction publique irakienne dépend à 95 % des recettes du pétrole. C’est la fonction même de l’État qui est aujourd’hui sous la menace. Sans service public, il n’y a pas d’État.
Par ailleurs, le Nigeria, l’Angola, la République du Congo, le Gabon et la Guinée équatoriale, tous membres de l’Opep, se sont également engagés à baisser leur production pour redresser les cours. Au Congo, troisième producteur subsaharien de pétrole, le Président Denis Sassou Nguesso a demandé une aide d’urgence de 300 à 500 millions de dollars au Fonds monétaire international. Au Nigéria, le pétrole brut représente plus de 90% des revenus d’exportations de l’État. La difficulté des pays africains réside dans leur incapacité de diversifier leur économie avec des finances publiques qui dépendent exclusivement de leur petit marché pétrolier.
L’Iran demeure le pays le plus impacté par la crise pétrolière liée par le Coronavirus. En plus de subir les sanctions américaines, la fermeture des frontières pour limiter la propagation du virus a rendu plus infernale encore la situation économique du pays. L’Iran dépend fortement de la rente pétrolière de laquelle il est privé aujourd’hui, non seulement à cause des sanctions américaines, mais aussi du fait du repli de la demande asiatique.
L’ampleur de la crise de l’industrie pétrolière, surtout vis-à-vis de l’Afrique, dépendra de la durée de la pandémie. Il est impératif aujourd’hui de repenser le marché de l’or noir et du gaz afin que le système économique des pays en développement ne soit pas entièrement sous la menace. Une transition vers une économie plus diversifiée et moins dépendante de ce marché est une nécessité.