Ségolène Royal a tiré la première. C’est de bonne guerre et cela confirme qu’elle est une tacticienne redoutable car elle allie un sentiment très fort des situations avec une audace indomptée.
Elle a senti que les enjeux devant lesquels se trouve le pays, la déception consécutive au « non » remaniement ministériel, la répression, le tout sécuritaire, les résultats économiques désastreux, l’aggravation exponentielle des inégalités (j’arrête) créaient un appel d’air important en direction de la gauche et du PS. Elle a perçu que la stratégie du silence que suivent pour des raisons différentes Dominique Strauss-Kahn et Martine Aubry ne tiendra pas longtemps, en tous cas, pas jusqu’au mois de juin 2011, date officielle de déclaration des candidatures à la primaire (DSK parce qu’il veut rester directeur général du FMI le plus longtemps possible et Martine Aubry parce qu’elle hésite encore). Dans les deux cas, c’est ennuyeux car la première qualité d’un candidat, c’est de vouloir passionnément réussir sa conquête du pouvoir. Cela ne se satisfait de demi-mesures et de valses-hésitations. Le parti et l’élection doivent se conquérir; ils ne sont pas donnés dans une pochette de Noël.
On peut penser ce qu’on veut de Nicolas Sarkozy, on ne peut lui enlever cette farouche volonté de conquérir et de garder le pouvoir. C’est ce qui en fait un adversaire si redoutable. La même volonté anime Ségolène Royal. Alors, sommes-nous condamnés à un remake de 2007 : Royal-Sarkozy ? J’espère bien que non car l’issue ne fait guère de doute.
La candidature de Ségolène Royal devrait cristalliser les forces du PS et, par effet boomerang, amener DSK à se déclarer, même si pour cela il doit sacrifier son FMI chéri. Ministre de Ségolène, c’est presque insultant mais sans doute était-ce l’intention. Il doit se jeter dans la bagarre dès maintenant ; demain il sera trop tard, d’autant que nous savons que les sondages mirobolants n’ont guère de signification et que, dès sa candidature annoncée, il chutera brutalement.
Il est de bon ton de railler la primaire aujourd’hui en l’accusant de tous les maux. L’idée même du pacte à deux ou à trois que Martine Aubry a évoquée est, de ce point de vue, une faute politique puisqu’elle vide la primaire de tout contenu. Ou bien on se met d’accord sur un leader et il n’y a pas besoin de primaire ou bien on mène une vraie primaire ouverte. Notre seule option, puisque nous n’avons pas de leader « naturel », c’est la réussir dans son organisation et dans la mobilisation large dont elle doit être porteuse. Elle doit permettre aux différents candidats de se révéler et, même si j’ai une préférence marquée, François Hollande, pour le sérieux des propositions, Martine Aubry pour avoir remis de l’ordre dans cette pétaudière qu’est le PS, Arnaud Montebourg, pour la fougue et la jeunesse, me semblent dignes d’être retenus. Il est temps d’arrêter le tango et de passer au foxtrot.