Nous assistons en ce moment à une offensive de la droite de la droite sur la double nationalité. Une lettre de Marine Le Pen, des soutiens exprimés par le groupe de la Droite Populaire (essentiellement des députés UMP des Alpes maritimes très marqués à droite). Il faut dire, pour être juste, que la question divise l’UMP puisque Nathalie Kosciusko-Morizet publie un opuscule hostile à cette idée et que les grands chefs demeurent silencieux.
Il s’agit probablement d’une opération qui vise à occuper un terrain qu’il ne faut pas laisser au seul FN. De quoi s’agit-il ? Il est d’abord arguer qu’on ne peut être fidèle qu’à une nationalité, que celle-ci ne peut se diviser ni se partager. Sous entendu, si vous avez une deuxième nationalité, vous ne pourrez être un bon Français.
Deuxième point : ces étrangers qui épousent des Français pour obtenir la nationalité doivent être tenus à l’écart. C’est la Haut Conseil à l’intégration (on savait que c’était une instance inutile mais on ne la croyait pas aussi bête et méchante) qui écrit cela très sérieusement dans son rapport remis au Premier ministre le 13 avril dernier. Il faut donc que le conjoint français montre qu’il gagne bien sa vie, qu’il a un logement convenable : sinon pas de conjoint ! Le mariage, dit-il, est devenu la principale source d’immigration, il faut donc les limiter. Car cela mènerait à « la désintégration sociale par la constitution de communautés ethniques, plus favorables au communautarisme ».
Derrière, il y a une tentative idéologique à remettre en cause notre législation sur la nationalité qui est un mélange complexe de droit du sol et de droit du sang pour ne retenir que ce dernier. « Bon sang ne saurait mentir » et les mélanges, c’est pas bon pour l’avenir de la race. Un débat en ces termes avait eu lieu à l’Assemblée nationale lors de la discussion de la loi dite Besson sur l’immigration. Le prétexte en était la déchéance de nationalité (abandonnée depuis). Dans un tel cas, il fallait savoir de quelles autres nationalités disposait l’assassin (d’un policier, d’un concierge, d’un douanier, ...) et qu’il indique celle qu’il entendait conserver (en cas de déchéance de la française) !
Habitués aux mariages qui transcendent les nationalités, nous qui représentons environ 1 million de citoyens binationaux, nous savons que c’est une richesse pour la France et que, pour quelques cas de tromperie, la grande majorité de ces citoyens sont à la fois de bons Français et fidèles à leur seconde patrie, culturellement ou autrement. Je pense que c’est à nous de dénoncer l’utilisation honteuse de ce thème et dire que la double nationalité est une fierté pour notre pays qui n’en a rien à craindre. Le repli frileux, peureux sur soi et sur sa soupe aux choux, laissons-la au FN et à ceux qui tentent de le suivre !
Sur un autre sujet : je redis mon malaise et ma honte devant la manière dont nous laissons tomber (moi y compris) la résistance héroïque du peuple syrien contre le dictateur Assad. Voilà un peuple qui se bat à mains nues contre une armée professionnelle, qui compte 50 à 100 morts chaque jour depuis plus de 3 mois et nous ne faisons rien, à part quelques communiqués alambiqués. Décidément au Proche-Orient, rien n’est comme ailleurs.
Sur le même sujet, vous pouvez lire mes diverses prises de paroles et communiqués lors des discussions du projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité, notamment :
Projet de loi immigration, intervention en discussion générale (1ère lecture)
Poursuite de l’examen du projet de loi immigration (1ère lecture)
Projet de loi immigration : la résistance a payé…pendant cinq jours
Interventions en séance sur le projet de loi immigration (2e lecture)
La frustration de la commission mixte paritaire