Alors que le 50ème congrès de la CGT s’ouvre aujourd’hui à Toulouse et officialisera l’intronisation de Thierry Lepaon au poste de nouveau secrétaire général, je m’inquiète des dernières orientations du premier syndicat de France.
Un temps paralysée par une guerre ouverte de succession qui a conduit à un choix par défaut de son futur leader, la centrale cherche à ressouder ses troupes en radicalisant ses revendications et ses modes d’action, quitte à faire table rase des évolutions intelligemment impulsées par Bernard Thibault. Quelle erreur ! Le tournant réformiste engagé par le charismatique ex-patron du mouvement était de bon augure pour l’ensemble des salariés français. La négociation a toujours été plus efficace que les contestations à tous vents qui n’ont jamais permis de sauver des emplois.
La CGT a récemment tiré un trait sur cette stratégie d’ouverture à la négociation pour renouer avec une vision passéiste du syndicalisme. Les évènements à Amiens – ville de la funeste Charte qui a séparé durablement le mouvement syndical français du socialisme – sur le site de Goodyear ou à Aulnay sur celui de PSA ont été un désastre pour l’image du syndicalisme français. Qui peut cautionner de tels débordements ? Les méthodes illégales et l’emploi de la menace comme stratégie de revendication nuisent à l’immense majorité des salariés qui sont pris en otage par un petit groupe de contestataires.
Au niveau national, on ne peut que regretter l’obstination à refuser de signer l’accord sur l’emploi. On comprend mal pourquoi la CGT s’entête à refuser le dialogue social que François Hollande tente de mettre en place. Dans le même temps, plusieurs sections locales du syndicat, se souciant davantage de l’emploi des salariés que de postures doctrinaires à tenir absolument, signent des accords d’entreprise – trop peu encore, la CGT étant bon dernier des syndicats en termes de signature de tels accords. Ce manque de pragmatisme au niveau national joue contre l’intérêt même des salariés. Ces derniers semblent d’ailleurs ne pas approuver un tel durcissement de la ligne si l’on en juge par les très faibles mobilisations fin février contre l’accord national interprofessionnel.
Avec cette stratégie d’opposition frontale, la CGT risque de perdre de nombreux adhérents et sympathisants pour satisfaire quelques jusqu’auboutistes. Les tensions avec les autres syndicats, notamment la CFDT dont un drapeau a été brûlé le 5 mars dernier à Lille par un militant CGT, ne peuvent conduire qu’à l’isolement de la CGT. Dans le contexte actuel de crise économique et social, j’espère que le nouveau premier secrétaire deviendra une force de proposition bénéfique aux salariés plutôt qu’une force d’opposition stérile. Monsieur Lepaon, défendez les salariés et acceptez les règles du dialogue social !