Depuis plus d’un mois, les allocations familiales sont au cœur d’une incessante polémique médiatique. Le sujet divise par-delà les clivages partisans habituels – certains à droite étant favorables à une refonte de notre système d’attribution des allocations familiales alors que des élus de gauche dont je fais partie s’y refusent.
Chaque jour, de nouvelles propositions voient le jour sans véritable cohérence. Fiscalisation, réduction de moitié des allocations versées aux familles aisées, mise sous conditions de ressources,… tous ces bricolages auront en définitive pour conséquence malheureuse d’altérer l’universalité qui est le fondement même de notre politique familiale depuis la Libération. Cette politique familiale ambitieuse participe de notre vitalité démographique que tant de pays européens nous envient. Avec un taux de fécondité de 2 enfants par femme, la France se classe au deuxième rang des pays européen pour sa natalité. Cette réussite est un gage essentiel pour la pérennité de notre économie : comment envisager la survie de notre système de retraites par répartition si l’on décourage le renouvellement des générations ? Qui remboursera notre dette si l’activité économique décroit du fait de la baisse de la population active ? Il me semble inopportun de remettre en cause une politique qui a jusqu’ici porté ses fruits et qui est très largement appréciée des Français car elle les rassure face à la peur de ne pas être en mesure d’assumer le cout de la prise en charge des enfants. C’est pourquoi je souhaite le maintien de notre système universel d’allocations familiales.
Je sais que ma position est partagée par de nombreux élus de gauche comme de droite et j’invite les responsables politiques à ne pas faire de cette question un débat partisan. Les propos caricaturaux tenus par Jean-François Copé cet après-midi, accusant la gauche de vouloir démanteler la politique familiale qu’elle aurait toujours détestée – le président de l’UMP se souvient-il de la revalorisation de 25% des allocations familiales décidée par François Mitterrand dès son arrivée au pouvoir ? – ne font pas honneur à sa formation politique. Je condamne fermement toute tentative d’instrumentalisation. À cet égard, les déclarations du FN accusant la gauche de vouloir saigner les classes moyennes pour favoriser les familles nombreuses étrangères en situation précaire sont proprement scandaleuses. Il n’est pas question de soumettre l’attribution de ces prestations familiales à une condition de nationalité. L’universalité n’est pas un principe à double utilisation. S’il n’est pas discutable quant à la situation sociale des familles, il l’est encore moins quant à leur appartenance nationale.
Prenons donc le temps réfléchir à la politique familiale que nous voulons avant de céder à la pression d’impératifs budgétaires : 2 milliards de déficit pour la branche famille, ce n’est finalement que très peu face au gain économique certain résultant de notre politique familiale. Il serait regrettable de sacrifier une politique familiale unanimement jugée efficace, allant in fine à l’encontre même de nos intérêts. La sagesse doit nous inviter à ne pas considérer notre politique familiale sous un angle purement budgétaire mais plutôt à développer une vision stratégique d’investissement à long-terme au cœur de laquelle la famille doit jouer un rôle essentiel.