Impossible d’y échapper cette semaine : la « loi Macron » est le sujet de conversation du moment. Que ce soit pour louer le courage du nouveau ministre de l’Économie ou s’offusquer d’une « régression sociale », décidément, cela fait chic d’en parler !
J’ai toutefois le sentiment que beaucoup de commentateurs n’ont pas véritablement pris le temps de lire ce texte touffu (une centaine d’articles). Je m’étonne en particulier des réactions très hostiles de certains de nos amis de gauche contre cette loi. Le procès en libéralisme du ministre de l’Économie, Emmanuel Macron, cible facile de par son expérience professionnelle, est injuste et irrespectueux. Je rappelle que cette loi pour la croissance et l’activité a été en grande partie préparée par Arnaud Montebourg dont on peut difficilement suspecter les penchants libéraux.
La question du travail du dimanche concentre la plupart des critiques. J’avoue ne pas comprendre un tel acharnement. De nombreuses dérogations à la règle du repos dominical existent déjà, fort heureusement d’ailleurs car la vie sociale et économique ne s’arrête pas le samedi soir pour reprendre le lundi au matin. Commerces alimentaires, restaurants, cinémas, musées, transports ou hôpitaux restent bien ouverts le dimanche. Certaines industries également : la production d’électricité doit être continue. S’agissant des commerces non-alimentaires, la législation leur permet d’ouvrir cinq dimanches par an, généralement en période de fêtes, sur décision du maire. Ceux situés dans l’une des 640 zones touristiques en France ou l’un des 31 périmètres d’usage de consommation exceptionnel (PUCE) peuvent en outre ouvrir le dimanche pendant les périodes d’activité touristique pour les premiers et toute l’année pour les seconds. Seuls les salariés de commerces situés dans les PUCE bénéficient de compensations salariales et du respect du volontariat alors que les autres peuvent se voir imposer de travailler le dimanche pour le même salaire. Que prévoit le projet de loi ? D’une part, il fait passer le nombre d’ouvertures possibles décidées par le maire à douze, ce qui me parait raisonnable et adapté à l’évolution des modes de consommation et de certaines situations locales particulières. La règle générale reste donc le repos et les douze dimanches ne sont qu’une possibilité offerte au maire qu’il est libre de ne pas utiliser. D’autre part, le texte étend l’obligation du volontariat et de la compensation salariale à toutes les zones et tous les commerces. Aucun commerce ne sera autorisé à ouvrir, même ceux qui le peuvent aujourd’hui, en l’absence de signature d’un accord de branche, de territoire ou d’entreprise. Voilà une mesure de gauche favorable aux salariés !
Mais la polémique sur le travail du dimanche nous a surtout fait passer à côté de l’essentiel du texte qui contient de nombreuses avancées. La réforme des professions réglementées permettra la baisse des tarifs de plusieurs actes immobiliers et de la vie courante (succession, donation, contrat de mariage…) et redonnera ainsi du pouvoir d’achat aux ménages. L’ouverture de l’offre de transport par autocar va dans le même sens. Je doute fortement qu’elle fasse concurrence au transport ferroviaire dans la mesure où elle profitera en premier lieu aux personnes modestes qui aujourd’hui ne prennent pas le train mais leur voiture ou bien ne voyagent tout simplement pas. La régulation des tarifs des péages autoroutiers sera par ailleurs renforcée pour mettre fin aux rentes injustifiées des entreprises concessionnaires. La réforme du permis de conduire réduira tant le coût que la durée d’attente du passage de cet examen qui est souvent essentiel pour pouvoir travailler. La création d’une carte professionnelle reconnue par les professionnels du BTP et l’inspection du travail qui sera obligatoire pour tous les ouvriers sur un chantier facilitera la lutte contre le travail illégal qui touche trop fortement ce secteur. L’actionnariat salarié sera rendu plus attractif pour permettre aux entreprises d’attirer des talents et de les associer au développement de l’entreprise. L’épargne salariale, qui sera simplifiée et élargie aux petites entreprises, sera davantage orientée vers le financement de l’économie réelle.
La liste des mesures positives est encore longue mais le but n’est pas ici d’être exhaustif. Il est vrai que ce projet de loi ressemble un peu à un inventaire à la Prévert mais il possède une cohérence d’ensemble : le soutien à l’activité, à l’investissement et au pouvoir d’achat. Je ne sais s’il permettra à la France de retrouver le chemin de la croissance car il reste, somme toute, relativement modeste mais il contient des avancées concrètes pour les entreprises, les salariés et les consommateurs. Ce n’est déjà pas si mal !