Après une longue semaine de négociations entre le gouvernement et les syndicats, le Premier Ministre a proposé lundi une nouvelle version de l’avant-projet de la loi travail. Alors que le dialogue s’annonce compliqué face au refus de plusieurs syndicats de voir le texte aboutir et la mobilisation de la jeunesse, la nouvelle version du projet de loi, qui sera présentée en Conseil des Ministres mercredi prochain, apparait pourtant comme un bon compromis.
Les mesures qui apparaissaient les plus inacceptables pour les syndicats ont été rectifiées. Ainsi, il n’y aura pas de plafonnement des indemnités prud’homales. Un simple barème indicatif sera publié par décret. Il n’y aura pas non plus d’allongement du temps de travail hebdomadaire des apprentis, ou de négociations au sein de l’entreprise sur le temps de congés pour motifs familiaux. De plus, les 61 « principes fondamentaux » du rapport Badinter ne formeront pas le préambule du code du travail, comme cela était prévu dans la première version du texte. Si le patronat regrette ces concessions perçues comme des reculs, elles sont pourtant bien la preuve de la volonté de dialogue de l’exécutif.
Si cette réforme intervient très tard dans le quinquennat, elle n’en sera pas moins une pierre angulaire. En effet, elle modernise réellement le code du travail, non pas en précarisant les travailleurs, mais en créant en leur faveur de nouvelles opportunités. Je voudrais notamment souligner les dispositifs en faveur de la jeunesse qu’introduit ce projet. La généralisation de la garantie jeune, dont le nombre de bénéficiaires ne sera pas plafonné, devrait bondir et pourrait s’appliquer à plus de 100 000 jeunes dès janvier 2017, ce qui constitue une réelle avancée. Ce dispositif, mis en œuvre depuis 2013 et qui concerne aujourd’hui 50 000 personnes, permet l’établissement d’un contrat de un an entre un jeune en difficulté d’insertion et une mission locale pour l’emploi, qui garantit à ce dernier de toucher une indemnité correspondante au revenu de solidarité active (RSA) tout en bénéficiant d’un accompagnement personnalisé vers une future embauche, un stage ou la reprise d’une formation. En renforçant ce dispositif, le gouvernement met donc l’accent sur l’intégration d’une population fragile, qu’il cherche à accompagner depuis 2012 (emplois d’avenir, contrats « starters », bourses étudiantes, aides au logement etc.).
Plus que d’agir pour l’avenir de la jeunesse, la loi travail est tout à la fois gage de souplesse pour les entreprises, et sécurisation de la position des travailleurs. Une plus grande place sera notamment laissée aux négociations d’entreprise avec une généralisation progressive jusqu’en 2019 des accords collectifs majoritaires. Dans les firmes sans syndicat, le patronat pourra également négocier avec les salariés mandatés par un syndicat sur l’ensemble des sujets susceptibles de faire l’objet d’un accord d’entreprise. De plus, le dispositif de compte personnel d’activité (CPA), véritable couverture professionnelle à vie qui devrait être opérationnelle dès 2017, sera renforcé. Un « compte d’engagement citoyen » prenant notamment en considération le temps employé bénévolement (dans le cadre d’un projet associatif, d’une mission de service civique, d’un engagement dans la réserve militaire etc.), en plus du compte personnel de prévention et de pénibilité et du compte personnel de formation, sera notamment créé.
Malgré la colère persistante des syndicats et de la jeunesse, dont une partie s’est mobilisée hier, le texte qui nous est proposé me semble donc prometteur, entre flexibilité accordée aux entreprises et sécurité individuelle. Il marque de nombreuses améliorations qui, je le pense, permettront d’accélérer la reprise, sur la durée, de notre économie et de l’emploi et de réduire le chômage.