Mardi 13 novembre aura marqué pour la France le début d’un nouveau mouvement social contre la réforme des régimes spéciaux de retraite. Sujet épineux, récurrent, longtemps mis de côté, et pourtant si fondamental.
La nécessité de réformer semble désormais acceptée par l’opinion publique, et par une partie de ceux-là même qui sont concernés. Les données démographiques, tout comme les indicateurs sociaux sont clairs : allongement de la durée de vie, arrivée à la retraite de la génération du babyboom, contexte économique peu réjouissant avec un taux de chômage élevé. La survie de notre système de retraites exige, et c’est inéluctable, des mesures conséquentes. La CFDT elle-même reconnaît depuis un an et demi la légitimité de l’harmonisation de la durée de cotisation à 40 ans de travail.
Cependant, pour ne pas être injuste, cette réforme doit être menée de façon concertée et négociée, et intégrer des éléments qualitatifs : la pénibilité des métiers, et quantitatifs : les salaires.
C’est bien là que le bât blesse.
D’une part, on ne peut revenir sur des engagements figurant dans un contrat de travail, surtout quand ces changements portent sur des points déterminants pour l’employé, comme le travail le week-end ou la nuit. La pénibilité de certains métiers doit être prise en compte, et l’évolution des carrières débloquée : les conditions de travail d’un marin-pêcheur ne sont pas les mêmes que celles d’un clerc de notaire !
D’autre part, pour être absorbable la réforme devra se faire de façon progressive. Certes, un agenda a été annoncé par Sarkozy – la durée de cotisation nécessaire pour un retraite à taux plein passerait progressivement de 37,5 ans à 40 ans d’ici 2012 ; le problème est que ce calendrier est imposé, et qu’à côté figurent d’autres dispositions, également non négociables, comme l’indexation de la pension sur les prix et non plus sur les salaires.
Par sa volonté de passer en force, il semblerait presque que Sarkozy fasse un appel à la grève. Et l’on peut légitimement se demander quel est son but.
Veut-il remettre à plat le régime des retraites ? C’est en effet indispensable, mais si tel est son intention, il doit faire accepter cette réforme difficile, donc prendre son temps, et instaurer une véritable concertation. Notons en passant que la plupart des régimes dits « spéciaux » sont équilibrés voire bénéficiaires, et que donc l’économie réalisée pour la caisse de retraite serait dérisoire.
Veut-il « faire un coup » et passer à tout prix sur une question dont il a fait un symbole de sa volonté de réformer ? Alors pour avoir satisfaction sur ce point il faudra qu’il lâche du lest sur d’autres, des contreparties salariales par exemple.
Le pire scénario est hélas le plus probable. En annonçant son refus de négocier, Sarkozy pousse à une grève dure, dont il espère qu’elle sera impopulaire.
Le véritable but de Sarkozy ne serait-il pas de casser les syndicats, un plan à la Thatcher ?