Dans un avis du 25 mai, l’Académie nationale de médecine s’est prononcée en faveur de la vaccination obligatoire contre la Covid. Même si la question ne se pose pas forcément aujourd’hui, alors que près d’1 Français sur 3 sera bientôt vacciné, nous devons être prêts à en débattre dans les mois qui suivent.
Les exemples d’Israël et du Royaume-Uni illustrent la réalité d’un « plafond de verre des antivaccins » - et lorsque l’on regarde les chiffres pour les populations prioritaires en France, il y a un réel aplatissement des courbes lorsque l’on atteint un certain seuil (situé aux alentours de 70 %). Dans l’état actuel des choses, atteindre un taux de 90 % de vaccinés chez les personnes âgées et vulnérables n’est pas accessible. La cadence de la vaccination risque donc de ralentir progressivement.
Dès lors, rendre la vaccination obligatoire serait une question légitime. Elle s’est déjà posée pour les soignants, alors que beaucoup rechignaient à recevoir une injection. Il y a eu des cas de réinfection à l’hôpital dû à des soignants non-vaccinés. Les restaurateurs, dont les établissements réouvrent progressivement, les enseignants, qui sont avec leurs élèves tous les jours, les forces de l’ordre, les employés du secteur culturel : la question se pose aussi pour toutes ces professions, qui sont souvent au contact du public. Atteindre l’immunité collective via la vaccination sera compliqué lorsque l’on atteindra le seuil de populations hésitantes, dont certains de ses professionnels font sûrement partie.
Aujourd’hui, à part pour les nourrissons (qui, à la naissance, doivent recevoir 11 vaccins), aucune autre maladie n’est soumise à la vaccination obligatoire, à l’exception des Guyanais qui doivent recevoir un vaccin contre la fièvre jaune. Mais nous l’avons déjà fait dans l’Histoire à plusieurs reprises : l’exemple le plus récent est celui de la tuberculose, pour laquelle tout Français était soumis à un vaccin de 1950 à 2007. C’est, en France, la Haute autorité de santé qui a la compétence de rendre un avis sur la vaccination obligatoire (celui de l’Académie de médecine est purement consultatif), pour laquelle une maladie doit répondre à de nombreux critères épidémiologiques. La décision ultime, sur avis de la HAS, revient toutefois au Gouvernement - elle est donc aussi éminemment politique. Il doit présenter un projet de loi devant le Parlement. Je comprends que le Gouvernement ne souhaite pas encore se poser cette question difficile : nous sommes encore loin des seuils de 70 % de la population vaccinée. Mais, alors que la vaccination pour tous les plus de 18 ans est désormais possible, et que des livraisons massives de BioNTech arrivent en juin, nous risquons de nous heurter à ce fameux plafond de verre plus rapidement que prévu.