Je suis de retour de 4 jours à Berlin. La situation économique et financière n'est pas fondamentalement meilleure, en termes de croissance, d'inflation et de chômage que celle de la France mais l'Allemagne garde sa puissance d'exportations (excédent de la balance commerciale prévu pour 2009 : 150 milliards d'euros au lieu des 200 habituels).
Un déficit des finances publiques de l'ordre de 80 milliards d'euros (soit 68% du PIB) avec un calendrier de 10 à 15 ans pour revenir au critère de Maastricht (la dette ne peut dépasser 60% du PIB) et encore plus pour respecter la règle des 35% qui a été constitutionnalisée récemment par la CDU.
Sur les élections fédérales, je ne reprends pas les commentaires que l'on a pu lire dans les journaux : abstention élevée due à une campagne terne, peu d'engagements, stabilité des grands partis, ménage à 5 partis), ... On verra demain quelle type d'alliance gouvernementale sort des urnes. Les Allemands ont toute une série de belles appellations pour les qualifier :
- feux tricolores ou camerounaise (SPS, Verts, FDP) : avec peu de chances d'être réalisée
- le diable ou libanaise (SPD, Verts, Die Linke) : idem
- jamaïcaine (CDU, Verts, FDP) : idem
- grande coalition (CDU-SPD) : reconduction de la coalition actuelle
- mozambicaine (CDU, Verts, FDP, SDP)
- la favorite (CDU-FDP) avec le danger d'une droitisation forte
Dans la plupart de ces cas, le SPD se trouve en situation difficile. Une reconduction de la grande coalition risque de le marginaliser encore plus puisqu'on a vu que les quelques -rares- mesures prises ces dernières années étaient pour l'essentiel des idées du SPD empruntées par la CDU. (Cela ne vous rappelle rien ?) Du reste Angie pense que si telle devait être la coalition, il y aurait un risque grave de voir le SPD « lâcher » la CDU après deux ou trois ans. Le SPD est bloqué par son refus de coopérer avec Die Linke, ce qui compréhensible parce que les dirigeants SPD actuels (Munterfuring, Steinmeyer, Steinbock et autres) ont été les concepteurs de la politique de Schroeder (Hartz IV, retraite à 67 ans, blocage des salaires, ...). Ils ne peuvent donc accepter les critiques de Die Linke qui sont celles de la gauche (fiscalité redistributive, hausse du pouvoir d'achat, retraite à 65 ans, nationalisations, ...). Il y a donc un problème de passage de relais à la génération suivante. (Cela ne vous rappelle rien ?)
Mais plus que les élections, ce qui m'a frappé c'est le changement de rapport que nous avons avec le passé de l'Allemagne. Je vais à Berlin depuis plus de 30 ans. Jusque là, nous étions submergés par le poids de l'horreur nazie qui était elle même en quelque sorte recouverte par l'occupation et le régime soviétique en DDR. Aujourd'hui, nous sommes capables de nous intéresser à cette histoire si riche sur le plan historique comme sur celui des idées et de la mettre en perspective.