Bientôt un « New Deal pour l’Europe » ? C’est ce qu’a annoncé François Hollande, mardi, à l’occasion d’un colloque sur l’avenir de l’Europe en présence des ministres du travail français, allemand, et italien. Il s’agit de lancer une offensive européenne pour l’emploi des jeunes.
Les chiffres sont accablants : avec 6 millions de jeunes européens sans emplois, le taux de chômage des moins de 25 ans en Europe dépasse les 25%, avec de tristes records en Espagne (56%) et en Grèce (60%). Cette situation n’est pas seulement intolérable, elle est dangereuse tant elle suscite de sentiments de frustration, d’injustice et de colère parmi la jeunesse européenne. L’erreur serait de croire que cette jeunesse sans perspective, sacrifiée sur l’autel d’une crise dont elle n’est en rien responsable, restera silencieuse face au sombre destin qui l’attend si rien n’est fait pour lui redonner courage et dignité. La fracture sociale et générationnelle menace nos sociétés de l’intérieur en offrant un terreau propice aux idées contestataires et parmi elles les plus nauséabondes – l’extrême droite réalise ses meilleurs scores auprès des moins de 25 ans.
C’est pourquoi je salue l’annonce de ce plan pour l’emploi des jeunes en Europe. Je constate avec satisfaction que le couple franco-allemand, dont la droite nous répète à l’envi qu’il bat de l’aile, est à l’origine de cette initiative. François Hollande s’est d’ailleurs montré particulièrement offensif et a réussi à rallier à cette cause commune plusieurs partenaires européens, au premier rang desquels l’Allemagne, qui, avec seulement 8% de jeunes au chômage, aurait pu choisir de rester en retrait. Le président de la République a eu raison d’insister sur l’urgence de la situation et d’inviter à un sursaut des États membres pour que ce plan puisse être définitivement adopté lors du prochain sommet européen des 27 et 28 juin. Nous en connaissons d’ores et déjà les orientations.
Concrètement, le plan proposé repose sur trois piliers. Le premier est le soutien aux PME via un accès facilité au crédit. En effet, alors qu’elles constituent un véritable bassin d’emplois potentiels pour les jeunes, beaucoup de PME sont freinées dans leur développement et leurs investissements par des taux d’emprunts déraisonnables. La Banque européenne d’investissement (BEI) sera donc chargée d’apporter 40% de fonds en plus, soir 70 Milliards d’euros, dans les trois prochaines années, pour financer les projets à fort potentiel de création d’emplois à court ou long terme. Prenant exemple sur la réussite allemande en la matière, le développement de l’apprentissage et de l’alternance représente le deuxième levier de ce plan. Couplé au renforcement de la mobilité, troisième chantier prioritaire, l’aboutissement en serait la création d’un Erasmus pour les apprentis.
Je souhaite que cette initiative se concrétise au plus vite et que les financements suivent. S’agissant de l’alternance et de la formation, 6 Milliards d’euros sont déjà inscrits au budget européen pour l’emploi des jeunes. La ministre allemande du Travail, Ursula von der Leyen, a annoncé hier que 16 Milliards du FSE seront également réaffectés à la lutte contre le chômage des jeunes. Est-ce suffisant ? Je me permets d’exprimer mon doute. J’ai déjà eu l’occasion de regretter le manque d’ambition et de moyens du prochain cadre financier pluriannuel européen, notamment en termes d’investissements pour stimuler la croissance et l’emploi (voir Budget européen 2014-2020 : un bien triste accord). Le chômage des jeunes – et des moins jeunes – est une bombe à retardement pour l’Union européenne. Espérons que les États membres en prennent conscience et débloquent de nouveaux financements pour lutter contre le chômage. La France l’a fait à son échelle avec les contrats d’avenir, les contrats de génération et le crédit d’impôt compétitivité-emploi. C’est au tour de l’Union européenne de développer une véritable stratégie de lutte contre le chômage. Le plan présenté hier constitue sans aucun doute une avancée considérable, mais il faudra que cet engagement ambitieux se traduise dans les actes et que les États prennent leurs responsabilités en consentant à un effort plus important pour augmenter la part du budget européen dédiée à la lutte contre le chômage des jeunes.