Les mesures d’économie (700 millions au total) sur la politique familiale annoncées par le gouvernement ce lundi 29 septembre 2014 dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale ne me semblent pas aller dans le bon sens. Certes, la réduction des dépenses est nécessaire pour remettre nos finances publiques à l’équilibre et stopper l’emballement de la dette mais le choix de faire peser ces économies sur la politique familiale ainsi que les modalités choisies sont contestables. J’ai déjà exprimé mon point de vue sur le sujet dans un billet précédent mais je voudrais en rappeler l’essentiel.
Premièrement, le déficit de la branche famille est relativement faible (3 milliards d’euros) et artificiellement gonflé par la prise en charge de dépenses du FSV qui lui sont rattachées (majoration des pensions pour les retraités ayant eu trois enfants ou plus). En outre, si la branche famille souffre conjoncturellement de la baisse des cotisations due au chômage, elle est structurellement bénéficiaire car les prestations sont indexées sur les prix et non les salaires qui évoluent plus rapidement. L’équilibre de la branche famille n’est donc pas menacé à long terme contrairement à celui de la branche retraite par exemple.
Deuxièmement, au-delà de l’aspect budgétaire immédiat, il faut regarder les gains économiques que nous procure notre politique familiale à travers une vitalité démographique sans équivalent en Europe. La forte natalité française mais aussi un taux d’emploi des femmes supérieur à la moyenne de nos voisins européens est un véritable atout. Il me parait donc précipité de décider ainsi de mesures d’économies sans préalablement évaluer leurs effets à moyen et long terme, sur notre système de retraite par répartition notamment.
Troisièmement, les mesures d’économie choisies ne me semblent pas toutes pertinentes. Si l’on peut comprendre la nécessité de moduler la prime de naissance en fonction du rang de l’enfant car certains matériels liés à l’arrivée d’un enfant (poussette, lit bébé, etc.) peuvent être réutilisés, la diviser par trois est tout à fait exagéré. Le décalage de la majoration des prestations familiales à partir de 16 ans et non 14 peut quant à lui se justifier car c’est à cet âge qu’on entre généralement au lycée. En revanche, la réforme du congé parental (déjà réformé il y a à peine deux mois !) relève d’une pure hypocrisie : sous couvert de favoriser l’égalité homme-femme, on va pénaliser les femmes dont le congé va être raccourci, le gouvernement faisant le pari que le congé plus long donné au père ne sera pas pris par celui-ci. Si l’on veut véritablement permettre une articulation entre vie familiale et vie professionnelle bénéfique aux hommes comme aux femmes, il vaudrait mieux revaloriser la rémunération du congé (à 80% du salaire par exemple dans une limite fixée autour de 1800 euros) pour inciter le père à le prendre. Enfin, la réforme des aides à la garde pour les rendre plus progressives en fonction du revenu des familles est sans doute la mesure d’économie la moins injuste car on sait que les aides à la garde – de même que le quotient familial qu’il faudrait peut-être forfaitiser – ont un fort caractère anti-redistributif.
Je ne me sens pas vraiment à l’aise avec la modification de la prime à la naissance et celle du congé parental. Je souhaite qu’il y ait débat sur ces deux questions.